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Solidarité

par Kamal Guerroua

Sans aucun doute, l'une des choses qui fait froid dans le cœur à l'approche de chaque hiver, c'est la situation difficile de beaucoup de sans-abris qui errent dans l'indifférence presque totale à travers les rues de nos villes à la recherche d'un quelconque coin chaleureux pour s'abriter et...survivre. Les services sociaux dans notre pays semblent dépassés et le phénomène devient malheureusement aussi routinier que contagieux, surtout avec l'affluence de milliers de réfugiés du Sahel, et aussi récemment de Syriens qui fuient la guerre et la misère! Certes, on ne dispose pas de statistiques précises là-dessus mais il n'en reste pas moins que ce fléau soit d'une ampleur jusque-là inédite. Le but de ce propos ici n'est guère de «dramatiser» ni de revenir sur un état des lieux connu de tous mais de mettre en évidence le manque chez notre jeunesse et notre population en général de cette «solidarité institutionnalisée» à même d'alléger ce climat délétère. Autrement dit, si la culture traditionnelle qui sert d'ossature à notre société nous incite à aller vers l'autre, lui venir en aide et prendre soin de lui dans les durs moments de la vie, nos structures administratives ne sont plus, paraît-il, en mesure d'encadrer efficacement aujourd'hui cette dimension humaine bienveillante inscrite dans nos coutumes ancestrales de manière à ce qu'elle soit «une dynamique citoyenne permanente». Toujours est-il clair que la faille n'est pas seulement dans l'insuffisance des moyens mais aussi dans ces relais sociaux et ces cellules solidaires étatiques qui ne sont pas étroitement liés aux réseaux éducatifs, universitaires et culturels. Du coup, on remarque que, quoique parfois fort généreuses, les initiatives de la plupart des associations caritatives ou des comités de quartiers agissant sur le terrain sont peu performants en termes d'adhésion de nouveaux membres, de mobilisation et d'utilité publique. Inspirons-nous donc des nations développées qui dans certaines filières de l'enseignement supérieur exigent même de l'étudiant un engagement en tant que bénévole dans une association caritative ou citoyenne de son choix afin que ce dernier soit au contact direct des réalités sociales que vivent ses compatriotes. La culture du bénévolat s'apprend et s'enseigne au fur et à mesure que l'éducation gagne les esprits. Pas question de vanter superficiellement les valeurs ancestrales mais de les diluer dans une approche institutionnalisée, cadrée par les lois, avec une panoplie de facilités humaines et matérielles à la hauteur des défis lancés. Or, bien qu'étoffé en nombre, notre tissu associatif est, lui, sclérosé par un tas d'obstacles bureaucratiques ; une politisation excessive qui tue l'humain et le social dans l'œuf ; son financement au compte-gouttes par les autorités ; l'affaissement notable d'une sensibilité envahie par le culte de la rente, etc. Bref, tout le monde oublie que la solidarité est un apprentissage au quotidien qui commence déjà pour les élèves à la crèche et lors des «colonies de vacances», puis continue dans les lycées et les universités.