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Une pédagogie Parasitée

par Ahmed Farrah

C'est la première fois dans les annales de l'école algérienne que des interférences extrascolaires secouent, réellement, le processus d'une réforme annoncée. Les antagonismes deviennent visibles dans une société hétérogène et divergente. Des intellectuels s'entredéchirent. Ceux qui se mettent en travers du nouveau cap contre ceux qui le soutiennent. Des dogmatiques et des réformistes s'affrontent par médias interposés. Le grain à moudre n'en manque pas. Les erreurs, provoquées ou pas, s'accumulent. La société attend que ces absurdités cessent de l'ennuyer. Elle n'en peut plus. A qui peut-elle s'en remettre ? A qui va-t-elle faire confiance ? A ceux d'hier, les éternisés, longtemps décriés ? A Benghabrit la mal-aimée ? Dès sa nomination, les socles du temple ont tremblé. La guerre lui a été déclarée. Ses origines, son passé et ses prises de positions sont épiés et étalés sur la place publique. Vérité ou intox, peu importe. L'user et la fatiguer pour la faire renoncer. La pousser au doute pour l'effondrer. C'est le but recherché. Mais pour l'instant, elle est toujours debout, elle ne s'écroule pas. Elle tient bon. Pourra-t-elle tenir encore longtemps, en faisant cavalier seul comme elle en donne l'impression ? Et pourtant, avant elle et durant des décennies, les coquilles au baccalauréat étaient légion, les fraudes se faisaient étouffer là où elles ont eu lieu, les livres scolaires étaient médiocres dans le fond comme dans la forme? Tout passait. Personne ne pouvait se plaindre. L'enseignant faisait avec et corrigeait à son niveau, ou bien, il utilisait carrément des livres étrangers disponibles à la SNED. Ce fut une autre époque, celle de l'espoir et des espérances. Celle de l'école, ascenseur social pour tous. Celle de l'école unique qui n'avait pas une autre dans son sillage et dispensée dans des garages à coups de milliers de dinars. Celle qui poussait à dévorer les livres pour écrire le monde. Celle qui ne savait pas ce que c'est que googler ou copier puis coller. Celle qui ne subissait pas le pouvoir foudroyant des réseaux sociaux. Benghabrit a eu la malchance d'être une ministre d'un secteur très sensible au moment où Facebook est venu offrir à tout un chacun, un canal pour déverser ses grands jeux, ses opinions personnelles, ses inimitiés et ses ragots? Il est devenu impossible de trier et vérifier les millions d'informations incontrôlées qui y circulent sans aucune censure et partagées par des milliers d'internautes. Moi-même, j'ai relié un «Fake», une fausse information dans mon billet du 18 septembre 2016, sur des statistiques ethniques qui auraient paru dans le manuel de géographie décrié; alors qu'en vérité, elles se trouvent dans un livre parascolaire paru dans une édition privée. Je présente des excuses aux lecteurs et à ceux que cette erreur pourrait porter atteinte.