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Le retour des vieux tacots !

par Moncef Wafi

Grave est la déclaration du ministre du Commerce qui a affirmé, lors du forum El Moudjahid, que certains constructeurs fabriquent des véhicules spécialement pour l'Algérie et qui sont loin des normes internationales. Une situation que la majorité des Algériens connaît mais qui sonne comme un aveu d'échec et d'impuissance de l'Etat incapable d'assurer son rôle de régulateur dans un secteur hautement technologique en l'absence de compétences nationales.

Nos routes continuent de recevoir des véhicules inadaptés aux normes internationales de sécurité, de véritables cercueils ambulants qui roulent en dépit de tout bon sens. Comment ces quatre-roues ont pu atterrir sur le bitume national ? Des complaisances envers certains concessionnaires au manque de maîtrise des organismes de contrôle, les réponses sont à chercher du côté des pouvoirs publics qui ont lamentablement failli à leurs obligations envers la sécurité des Algériens. En évoquant la décision du gouvernement, dans le cadre du projet de loi de finances 2017, de lever l'interdiction de l'importation des véhicules d'occasion mais «sous certaines conditions», comme l'a si bien indiqué Belaïb, l'Algérie a fait un bond remarquable? en arrière.

A une certaine époque, des parlementaires avaient rejeté la proposition du retour de l'importation des véhicules d'occasion de moins de trois ans expliquant que «l'Algérie ne sera jamais une poubelle pour ce genre de véhicules». Mais c'était à une autre époque où la crise n'était qu'un mauvais souvenir. Réalité économique oblige, l'Algérie va rouvrir son marché aux voitures de moins de trois ans avec obligation de respecter un cahier des charges pour éviter l'importation des poubelles à moteur. C'est en quelque sorte le message du gouvernement véhiculé par son représentant du commerce qui souligne l'interdiction d'importation de voitures «représentant des dangers à la circulation».

Outre l'aspect intrinsèquement mercantile de la mesure, il est à se demander sur quelle base et qui va juger de la dangerosité de ces engins. Qui pourra aussi importer ? Le citoyen, le concessionnaire ou le distributeur, l'Etat n'ayant pas encore tranché dans le vif de la question ? Ce retour aux vieux tacots presque 11 ans après la décision de Bouteflika d'interdire leur importation repose avec acuité cette lancinante question sur la compétence des uns et des autres. Pourquoi a-t-on interdit en amont avant de rétablir en aval après avoir déstructuré un segment du marché en entier, envoyant des milliers de travailleurs pointer au chômage ? Qui va enfin payer pour tous ces mauvais choix ? Le citoyen en premier qui n'en finit plus de mettre la main à la poche, mais qui d'autre ?