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L'école a perdu son âme
par Hamid Dahmani
Une rentrée
scolaire plutôt timide. Un retour à l'école qui ne déborde pas d'énergie. C'est
tout à fait normal, puisque le cœur n'y était pas. Une rentrée sans plaisir ni
grand protocole. Et en attendant la prochaine sortie de vacances, c'est une rentrée
sans tambour battant, ni allure solennelle. L'école ne fait pas la fête et les
éducateurs en font à leurs têtes. Une cérémonie d'ouverture sans couleurs, avec
un grand portail ouvert pour fêter la rentrée scolaire, accomplie par les
éducateurs et le concierge. La grande pourvoyeuse d'hommes et de femmes de
demain ne créera pas l'inédit. Elle suit le cours de la formalité et de la vie
qui s'apparente à une corvée sans intérêt. Une formule qui se répète au fil des
ans, comme une conjugaison non saisie par le dernier de la classe. L'école est
triste dans son destin oblique. L'école, cette vieille institutrice, génitrice
des sciences et des technologies, n'arrive pas à se mettre au diapason de l'art
de prodiguer le brillant enseignement dans le pays. Notre école n'invente pas.
Elle fonctionne avec les moyens de bord. Ce n'est plus l'endroit de la lumière
et du savoir. Elle n'est plus intelligente comme jadis, où elle avait une
réputation d'efficacité dans les cours dispensés aux étudiants. Les défis mondiaux
nous guettent, et le pays demeure à la traîne des autres nations. Notre école
n'a plus d'âme, ni soif de connaissances. Elle est victime de sa pédagogie
insuffisante. L'école a été désertée par les plus expérimentés. Ils ont été
admis à la retraite anticipée parce qu'ils étaient écœurés de subir sans
pouvoir réagir. L'école a été saignée par les médiocres. On règle ses comptes
avec l'école. Les cancres d'hier gardent un mauvais souvenir de leur enfance
écolière. Aujourd'hui, ils sèment de la médiocrité à l'école, et éprouvent de
la haine à la main qui leur donne à manger. Même l'enthousiasme était absent.
L'école ne sait plus sur quel pied danser. Les valses sont nombreuses, et l'air
n'est plus entraînant dans la classe. Hier, c'était la bonne vieille école des
aînés, et les élèves étaient bien dans leur peau d'enfants scolarisés. L'école
était l'endroit de la culture et de la morale et le maître était un pilier
incontournable pour façonner la bonne école. « Allez chercher le savoir même en
Chine ! » est une référence pour connaître et apprendre « El Ilm ». Dans le présent, si les gens se rendent en Chine,
c'est pour ramener des containers chargés de produits manufacturés en toc. Youm El-Ilm, ou journée du
savoir, n'est qu'un slogan sur les pages d'un cahier mal noté. Ne dit-on pas
que la discipline est mère du succès. L'école algérienne ne veut pas prendre le
train de l'air du temps. Fraude, fuite de sujets d'examens, perte de crédit,
sont des scandales récurrents qui ont terni son image. Les écoliers font de
petites fautes, et l'école fait de grosses bourdes.
Les
enfants, les étudiants et les universitaires ont perdu le goût et le plaisir de
lire. Le comble, même les librairies ont baissé les rideaux et les quelques
bibliothèques encore ouvertes ne suscitent plus l'esprit à la lecture. L'école
ne sème pas assez, la passion, la distraction et les loisirs dans le cœur des
enfants pour les stimuler à aimer l'école. La qualité de l'enseignement ne se
constate pas dans les innombrables infrastructures scolaires et universitaires
bâties, mais dans l'aptitude et le mérite qui font le cachet et la réputation
de ses établissements. Le contenant, il y en beaucoup, mais le contenu est vide
et laisse à désirer dans sa qualité. Notre école a négligemment chuté de son
piédestal. Pour se consoler et exprimer cette insatisfaction continue, il y a
un dicton populaire qui dit « Hadha ma helbete el bagra ! » (C'est tout
ce qu'a donné la traite de la vache).
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