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Déferlement de violences

par Moncef Wafi

Deux faits divers aussi dramatiques qu'illustratifs de la situation des minorités en Algérie, si on peut les appeler ainsi. L'immolation de Amira Merabet, brûlée vive par le prétendant de sa sœur à El Khroub, à Constantine, et le meurtre du petit Nasseredine, un gosse de cinq ans, tué par sa tante à Oum El-Bouaghi, rappellent dramatiquement la vulnérabilité de ces deux composantes sociales dans un pays définitivement patriarcal. La place de la femme et de l'enfant en Algérie est assujettie à la volonté de l'homme, animal social et politique par excellence qui n'a jamais offert une chance d'émancipation ou d'égalité à la femme ni assuré une protection utile à l'enfant.

Ces attaques contre l'enfance et la féminité, loin d'être uniques dans les annales judiciaires nationales, n'ont pas cessé de mobiliser l'opinion publique ni d'alerter les consciences sur des dépassements parfois tolérés, mais sans grands résultats. Le durcissement des peines contre les violences faites aux femmes ne sera ni suffisant ni préventif pour endiguer ce phénomène lorsqu'on sait que le texte de loi laisse une porte de secours aux agresseurs moustachus avec la possibilité de voir leurs victimes retirer la plainte en dernier recours. Cette absence de tolérance zéro fait que toutes les initiatives prises et les discours de bonne intention ne soient que partiellement répressifs et qu'un goût d'inachevé ne vienne habiller cet arsenal juridique.

L'assassinat de Nasseredine fait partie également de ce constat d'échec d'une prise en charge judiciaire des violences faites aux enfants. Du kidnapping pour rançons au viol pédophile en passant par les meurtres règlements de compte, on assiste impuissants à un déferlement de violences sans limites. Où se situe alors le problème ? Dans les textes mais aussi dans leur application. Si la peine de mort est théorique en Algérie, le peloton d'exécution, lui, reste soumis à une caution morale. Le propos ici ne se trouve pas dans une quelconque volonté de lobbying pour une partie ou une autre mais dans cette obligation morale de poser un débat national autour d'une question qui divise. Entre les faits divers sordides, les appels à la mobilisation citoyenne et le silence du gouvernement, le dossier doit être ouvert et traité loin de toute passion suspecte.