Envoyer à un ami | Version à imprimer | Version en PDF

On ne fait pas du nouveau avec l'ancien

par Ahmed Farrah

Des personnages publics, et non des moindres, se positionnent en commentateurs de l'histoire et en adeptes de la voyance, prédisent un futur prochainement sombre et chaotique pour l'Algérie. Le souhaitent-ils ? Non, ce serait diabolique ! Dans un article de presse largement partagé sur les réseaux sociaux, le pays y est assimilé à une pseudo- nation, et le peuple ne serait qu'une plèbe assistée et nourrie aux mamelles de la providence d'un faux Etat. Aussi pertinente soit-elle, cette analyse ne constitue qu'une parmi tant d'autres ressassant, après coup, le marasme d'une société noyée dans ses propres contradictions. Au lieu de proposer de vraies solutions aux problèmes posés à la société, ces frondeurs contestent, aujourd'hui, les incohérences et les absurdités d'une gouvernance dans laquelle ils étaient partie prenante et au fait de la situation, des pratiques et des mystères du pouvoir qui les a promus. Sans qu'il soit nécessaire de le rappeler, le clash est bien flagrant entre un peuple indolent et une classe politique pervertie et renvoyée à son impuissance face à l'omnipotence d'un système qui l'a secrétée.

Pour ne plus se résoudre à la fatalité de demeurer dans son rôle de spectateur du temps qui passe, le pays a besoin de sang neuf et de nouveaux visages crédibles et convaincants. La majorité démographique représentée par une jeunesse n'ayant rien à envier à celle qui a fait émerger au-devant de certains pays, de jeunes dirigeants comme en Italie, en Belgique, en Grèce, au Canada, en Pologne,? tous quadragénaires ; elle pourrait s'engager et ne plus laisser le terrain politique en friche sous la mainmise des vétérans, qu'ils soient aux affaires, dans l'opposition ou ceux qui s'improvisent les Nostradamus des temps nouveaux. Ils sont tous perçus dans la société comme étant sortis du même moule, celui de l'accident de l'histoire. En tout cas et quoi qu'il arrive, tout système, aussi longtemps mis en place, déclinera et penchera inéluctablement vers sa fin, c'est la règle imposée par le cours du temps et la biologie. La pérennité de toute nation repose d'abord sur ses valeurs, sa puissance intrinsèque, ensuite sur sa capacité de pouvoir diffuser dans ses profondeurs géostratégiques son savoir, son savoir-faire et son savoir-être pour faire face aux récurrences de l'histoire. Caresser le rêve de rompre l'immobilité étreignant la société ne devrait pas se heurter à une réalité amère due à l'apesanteur d'un conservatisme archaïque et d'un modernisme superficiel et futile. Trouver l'équilibre pour faire face aux défis du monde ne serait possible que si l'on savait qui sommes-nous?  Où sommes-nous? Où allons-nous? Pour quoi faire et avec quels moyens nous pourrions le faire? Répondre à ces questions serait déjà une vraie feuille de route toute tracée pour un pays qui ne peut plus demeurer inféodé à l'inconstance du monde et au souci de chaparder sa nourriture dans la mangeoire des communautés qui sèment le savoir et récoltent la puissance créative et innovante.