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Opération marketing

par Moncef Wafi

Juppé, candidat aux primaires des Républicains et accessoirement maire de Bordeaux, est depuis hier en Algérie. Si, en théorie, il vient signer une quelconque convention à Oran, jumelée avec sa ville, la nature même de sa présence n'est un secret pour personne. Il vient en fait chercher l'appui d'Alger, se présentant comme le meilleur des amis de l'Algérie au cas où il viendrait à représenter la droite française à la course pour l'Elysée. En effet, Alger est devenue une étape incontournable pour le futur président français, obligé d'y faire un crochet, histoire de tâter le pouls de l'ancienne colonie et toujours fidèle alliée de l'Etat français. Hier, Hollande et Sarkozy, aujourd'hui Juppé en premier, suivront d'autres certainement et pourquoi pas l'ancien locataire d'El-Mouradia de Paris. Si ce dernier ne rate aucune occasion de cracher sur nos gueules, nous accusant d'être la pire engeance du Maghreb, incapables de réformer une économie malgré les milliards du pétrole, ce qui en soit n'est pas faux, il est bien foutu de fouler le tarmac de Houari-Boumediene pour venir nous dire qu'on l'a mal compris. Juppé, donc, s'amène, sourire de commercial à la vitrine, nous faire croire que son blaze à la présidence serait une belle promesse pour un avenir radieux pour nos deux pays. Nous, on fera semblant de le croire, lui suggérant de nous donner plus de précisions sur le plan marketing qu'il a ramené dans ses bagages. On l'écoutera nous promettre davantage de visas, plus de contrats sur notre dos, cela s'entend, une plus grande liberté de circulation, plus de prédateurs au col blanc pour manger un peu plus notre pays, et on sourira. Un sourire de circonstance parce qu'on ne peut pas fâcher un futur président même si cela reste dans la case des éventualités parce qu'il y a encore Sarkozy, Le Pen et Valls. On lui signera un chèque en blanc à encaisser seulement en cas de victoire, mais on se méfiera, de cette méfiance rurale, atavique, propre aux tribus des montagnes parce qu'on nous fait toujours le même coup et on se fait toujours avoir au tournant. Le dernier à nous avoir entubés avec ses joues roses, son air de bon père de famille est Hollande qui nous a promis la repentance, une nationalité française gratuite, l'indépendance de la Palestine et un dédommagement sur les 132 ans de souffrance et de crimes commis par ses ancêtres. En fin de compte qu'est ce qu'on a eu ? Rien, sinon le retour de nos frères déchus de leur passeport français, un petit mot d'excuse griffonné sur un bout de papier jeté à la Seine et une France plus que jamais sioniste. Un gouvernement ultra-sécuritaire, des soldats français tirant sur les musulmans de l'Afrique et une manipulation de l'opinion publique pour qu'elle vote extrême droite. L'Algérie devra exiger de recevoir Taubira en porte-parole de la gauche sinon personne et de toute façon le monde prie pour que Hollande ou Valls ne puissent jamais plus gouverner en France.