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La Darija, Akim et l'école

par Yazid Alilat

Plus de 8 millions d'élèves prendront le chemin de l'école, la semaine prochaine. Finies les vacances! Finies les escapades en mer ou en montagne, et, surtout, terminés ces temps d'insouciance pour ces jeunes, de 6 à 19 ans. Les choses sérieuses commenceront, donc, cette année, contrairement aux autres, dès le 6 septembre, soit dimanche prochain. La ministre du secteur, qui a mené durant cet été 2015, une guerre par réseaux sociaux interposés contre les anti-darija, et les milieux qui veulent l'affaiblir, a reçu un soutien de ceux qui veulent qu'à leur entrée à l'école, les petits enfants, en Algérie, parlent leur langue maternelle plutôt que l'arabe classique, pour comprendre et se faire comprendre. A « l'annonce » de cette réforme linguistique, sémantique et « barbare » pour certains, des questions avaient inondé; pis, provoqué un ?tsunami' sur les réseaux sociaux. Mais, petit à petit, le vacarme fait autour de cette question de la Darija s'est estompé pour laisser place à un retour au calme que berçaient les flots de la Mare Nostrum, où se sont réfugiés enfants, parents et racoleurs-intellectuels, qu'ils soient ou non de service, ou à la solde de quelque obscur Méphisto, revenu des Temps anciens. Non, cette rentrée scolaire que nous prédit la ministre de l'Education nationale sera, pour la première fois, depuis longtemps, normale. Parce qu'elle prédit qu'il n'y aura pas de grèves, cette année, que les manuels scolaires ont été distribués, qu'une armée d'enseignants nouveaux sont en passe d'être recrutés pour grossir les rangs de bataillons d'instituteurs-enseignants-professeurs, que les syndicats ont été apprivoisés, et que la réforme de l'Ecole est une réussite. Les écoliers, eux, déjà des Affranchis des Claviers, attendent de voir pour y croire. Sur les réseaux sociaux, ce sont eux qui animent des débats cosmogoniques sur cette question de la Langue maternelle à l'école, ce sont eux, également, qui font le gros tapage sur les conditions des examens de fin d'année, et ce sont eux, également, qui en sont les destinataires. Alors, question: si Benghebrit parle de plus de justice sociale, d'égalité des chances à l'école, ne fallait-il pas également associer ces élèves, ces cyber-écoliers, au débat de la réforme de l'Ecole, leurs parents également, maintenant, et non pas souhaiter, du bout des lèvres, la formation d'associations de parents d'élèves, mais déconnectés de la décision finale, quant à l'avenir de leurs enfants. Ailleurs, où les principes de bonne gouvernance à l'Ecole sont, strictement, respectés, ce sont les élèves et leur confort scolaire qui sont au devant des préoccupations, pas les syndicats et les enseignants. Chez nous, que les règles du jeu soient mises à l'envers, pas à l'endroit. Ici, donc, c'est l'élève, peu importe qu'il soit du primaire ou du secondaire, qui est à la périphérie de la prise de décision, et au centre, cette fameuse centralité, on retrouve ex aequo, syndicats et enseignants, qui détournent ainsi pour leurs intérêts, la sollicitude de l'Etat, par ministère interposé. Et, à partir de cette figure de Centralité, l'élève et tout son environnement pédagogique et social, et donc sa formation, en sont évacués. Pas étonnant, dès lors, d'avoir ces taux d'échec inquiétants, devant l'école? Avant, au moins, on passait l'été à lire des Pim, Pam, Poum, Tartine, Akim, et Blek le Roc, histoire de stocker des mots de français, et de voyager un peu, en prévision d'une dure année scolaire qui nous attendait.