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Une revendication et des doutes

par Abdelkrim Zerzouri

L'attaque terroriste contre une salle de concert au nord de Moscou, vendredi dernier, qui a fait 139 morts, n'a pas encore livré tous ses secrets. Même si les Occidentaux tentent de lever tout doute quant aux exécutants de cet attentat et ses commanditaires, la Russie ne veut pas suivre des conclusions qu'elle juge « hâtives » en pointant le groupe Etat islamique ‘Daech'. Peu de temps après cet attentat, la Russie a privilégié la piste de l'Ukraine, notamment en raison de la tentative de fuite des coupables par les frontières ukrainiennes, où un couloir leur a été préparé pour faciliter leur exfiltration.

Les autorités à Kiev nient d'une manière catégorique leur implication dans cet attentat, mais cela ne semble pas convaincre Moscou. D'habitude, quand l'EI revendique un attentat, les enquêtes aboutissent à la confirmation de sa responsabilité après l'authentification de la revendication en question, bien sûr. Dans ce sillage, les médias russes émettent des doutes sur l'origine de la déclaration de l'EI revendiquant sa responsabilité de ce qui s'est passé dans la salle de concert, attirant l'attention sur l'absence de mention de la branche régionale de l'EI, considérant ainsi la déclaration du groupe comme fausse et préfèrent pointer à l'index l'Ukraine.

Cette fois-ci, donc, les choses n'évoluent pas dans le sens d'une acceptation de cette revendication, et cela semble irriter au plus haut degré les Occidentaux et les Américains, qui cherchent à mettre un terme au doute entretenu par Moscou. Vainement.

Car, lors de sa dernière sortie à ce sujet, si le président russe Vladimir Poutine a reconnu, lundi 25 mars, que l'attaque terroriste qui a visé l'un des principaux théâtres de la ville de Crocus, faisant plus de 139 morts, avait été perpétrée par des extrémistes islamistes, il a également précisé que « la Russie sait qui a mené l'attaque terroriste contre Crocus, mais elle souhaite savoir qui l'a ordonné ». Le président russe a déclaré qu'»il est très important de répondre à la question posée de savoir pourquoi, après avoir commis leur crime, les terroristes ont tenté de se rendre en Ukraine. Qui les attendait là-bas ?». Plus tôt dans la même journée, la porte-parole du ministère russe des Affaires étrangères, Maria Zakharova, a été pour sa part tranchante dans ce cadre, faisant peser de graves soupçons sur Washington, qui cherchait des excuses à Kiev en accusant l'EI, a-t-elle soutenu. Zakharova a souligné que plusieurs facteurs indiquent, directement et indirectement, l'implication des autorités américaines actuelles dans le parrainage du « terrorisme ukrainien ». Moscou ne lâche pas la piste ukrainienne malgré l'insistance des Américains et des Occidentaux pour l'en détourner.

Les autorités russes restent dans le soupçon, en attendant les résultats de l'enquête en cours, mais elles semblent fixées sur les commanditaires de l'attentat terroriste. Reste seulement à savoir si on pourrait le confirmer preuve à l'appui ? Et qu'est-ce qui en découlerait comme actions de la part de la Russie ? Enfin, une chose est sûre, le monde est plus que jamais soudé dans ses positions face à « l'ennemi commun », le terrorisme islamiste sous sa nouvelle définition, mais plus que jamais divisé quand il s'agit d'ennemis particuliers, qui peuvent être des amis quand ils sont ennemis de ton ennemi et des ennemis quand ils sont amis de ton ennemi.