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Le droit au devoir

par Moncef Wafi

Alors que l'on croyait que le conflit entre le Conseil national autonome du personnel enseignant du secteur ternaire de l'éducation (Cnapeste) et le ministère de l'Education nationale résolu ou du moins dans une phase de conciliation précaire entre les deux parties, voilà qu'un communiqué du syndicat ne vienne tout remettre en cause.

Le Cnapeste évoque une «véritable conspiration» contre les enseignants grévistes victimes de retenue du salaire de mars doublée d'une ponction sur la prime trimestrielle. Cette double peine est synonyme, aux yeux du Conseil, d'une volonté de nuire et de contribuer au pourrissement de la situation, indiquant que les responsables du secteur ont failli dans la résolution du conflit entre la tutelle et le syndicat. Le Cnapeste se donne jusqu'à la fin de ce mois pour prendre des décisions qualifiées de «décisives» et démasquer ceux qui sont derrière le «complot». En attendant, le syndicat devra organiser des assemblées nationales et locales pour décider des mesures et des moyens de répondre aux «provocations» du ministère de tutelle. Un plan de bataille qui se met en place et qui n'augure rien de bon, pouvant même déboucher sur la reprise de la grève alors que le retard pédagogique hypothèque déjà l'année scolaire. Il est même question de boycotter les cours de rattrapage comme moyen de pression. Des menaces à peine voilées qui interpellent derechef sur le droit à la grève et sa lecture nationale. Dans l'esprit, la grève n'est pas des vacances déguisées et lorsqu'on est en débrayage, on est tenu de se présenter à son poste de travail tous les jours. En Algérie, la grève est souvent synonyme de congé payé et la décision de la tutelle de frapper là où ça fait mal présuppose d'une intention de répression manifeste. Le ministère est-il dans son droit ? Certainement, mais la force des réflexes encouragés par les nombreux et différents rétropédalages ont nourri ce sentiment d'impunité chez les grévistes. Cette divergence dans les approches, ce tâtonnement dans les prises de décision, parfois irréfléchies de la part des ministres, ont sabordé des compromis fragiles et précipité les accords bancals dans la précarité des conflits à longue durée. Cette préférence à aller au combat au lieu de privilégier le dialogue a desservi les intérêts du pays et des Algériens et il serait grand temps de limiter la casse en obligeant les parties au conflit à s'asseoir autour d'une table, quitte à créer un ministère de médiation.