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Le retrait de l'administration, vrai gage de transparence ou écran de fumée

par Kharroubi Habib

Il n'est pas sûr que les partis d'opposition qui vont participer aux élections locales de novembre ont vu dans l'annonce faite par l'inspecteur général au ministère de l'Intérieur, des Collectivité locales et de l'Aménagement du territoire d'un retrait de l'administration le jour du scrutin en vue selon lui de laisser le personnel d'encadrement et les partenaires politiques jouer leur rôle et assurer à cette opération la transparence la plus totale, le gage que les autorités ne vont pas encore une fois s'immiscer dans le processus électoral et en dévoyer les résultats en faveur du camp de leurs relais partisans en course dans la compétition.

Le retrait de l'administration peut toutefois être l'indice que le pouvoir est tenté pour les élections locales de permettre que la compétition soit plus «propre» qu'il est de tradition en Algérie, et qu'il constitue un signe de sa part dans ce sens en direction de l'électorat visant à le convaincre de ne pas plomber le rendez-vous électoral de novembre comme il l'a fait pour celui des législatives de mai dernier en se réfugiant dans l'abstention massive. Celle-ci, on le sait, a sérieusement ébranlé les certitudes du pouvoir en l'adhésion populaire aux politiques qu'il mène et à sa gouvernance qu'il pare d'un «soutien» que lui prodiguerait la majorité des citoyens. Sa récidive dans un scrutin de proximité que sont les élections locales équivaudrait à faire paraître que les Algériens refusent purement et simplement de s'impliquer dans toute échéance électorale se déroulant sous ses auspices.

Il n'est pas impossible qu'il se soit imposé à lui l'obligation de faire prendre du champ à l'interventionnisme de l'administration dans la supervision du processus électoral en cette occurrence. Il peut en effet s'y résoudre sans se mettre en péril car les enjeux dans le scrutin ne sont pas cruciaux pour lui en terme de menace pour la carte politique nationale qu'il a configurée et sachant que même une victoire significative que pourraient obtenir les opposants qui sont dans sa contestation et la revendication du changement de système et de régime n'est pas de nature à donner corps à un contre-pouvoir dont il aurait à craindre le poids et les initiatives.

Au niveau local, la percée de l'opposition n'entraînera pas en effet la fin de la mainmise de l'administration sur la gestion des collectivités locales censée revenir aux élus désignés par les urnes. Là comme à tous les autres niveaux de la gestion des affaires, le pouvoir a verrouillé la porte par des dispositions et une règlementation qui font des élus des exécutants sans capacité réelle de faire contrepoids à la tutelle décisionnelle de l'administration étatique.

Un saupoudrage qui se concrétiserait par une percée électorale de l'opposition aux locales n'est pas donc pour inquiéter le pouvoir et peut même être le scénario qu'il veut voir se réaliser en novembre pour s'en attribuer le résultat et en faire la preuve de sa volonté d'ouverture politique et de changements visant à conforter la démocratie dans le pays. Il y a un impondérable à ce calcul que le pouvoir est dans l'incapacité de maîtriser. C'est celui de l'attitude qu'adoptera l'électorat qui a été jusque-là l'abstention sanction par laquelle il exprime son refus de cautionner des scrutins dont la seule raison d'être a été de créer l'illusion que le pouvoir en place bénéficie de la légitimité électorale.