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Il a tout raté, même sa sortie

par Kharroubi Habib

Contrairement à ce qu'ont essayé de faire croire des médias proches du pouvoir, la réapparition mercredi du chef de l'Etat présidant le Conseil des ministres ne mettra certainement pas fin à la polémique sur la vacance de pouvoir qui a rebondi dans le pays suite à l'ahurissant cafouillage au sommet de l'Etat auquel a donné lieu le feuilleton Tebboune. Ni les acteurs politiques qui l'ont relancé ni la majorité des Algériens qu'ils sont parvenus à alarmer n'ont été convaincus par la mise en scène télévisée dont l'objectif a consisté à montrer un président qui n'est pas dans l'incapacité d'accomplir ses obligations comme l'affirment les premiers et s'en inquiètent les citoyens « trompés » par leurs spéculations formulées et distillées selon la version officielle dans un but de politique politicienne.

Le Bouteflika que les Algériens ont entraperçu brièvement à travers les écrans de télévision après les nombreuses semaines qu'aura duré son occultation médiatique leur a renvoyé l'image d'un homme à qui on a soumis une pénible corvée excédant ses capacités physiques amoindries par les séquelles de sa maladie. Même ceux qui dans un premier temps se sont refusé à faire foi en la théorie de la vacance de pouvoir induite par son état de santé dont l'opposition en a fait son cheval de bataille dès que le Président a eu son attaque, en sont désormais à la considérer avérée. Comment y mettre un terme sans que la stabilité du pays n'en subisse de funestes conséquences est l'interrogation qu'ils se font, à laquelle la plupart n'ont pas trouvé réponse dans les scénarios avancés comme possibles par les tenants lointains ou récents de la situation de vacance de pouvoir. Ceux à qui elle profite ont en effet verrouillé à tous les niveaux les voies qui permettraient à l'un des scénarios d'être mis à exécution.

Tant que l'Algérie parviendra à se maintenir à flot, ce que lui permet momentanément le matelas financier dont elle dispose encore, le sérail du pouvoir continuera à s'abriter derrière la fiction que la théorie de la vacance de pouvoir consécutive à l'incapacité physique du chef de l'Etat serait une invention suscitée par l'opposition. Le maintien de Bouteflika en sa fonction continuera de ce fait à faire unanimité en son sein d'autant que les clans qu'il recèle ne parviennent pas à l'évidence à s'entendre sur sa succession si ce n'est qu'elle doit déboucher sur le maintien du statu quo qui arrange leurs intérêts respectifs.

Pour aussi nombreux, de plus en plus, que sont les appels qui s'élèvent pour préconiser qu'il soit mis fin à la pathétique mais dangereuse situation d'un Etat dirigé sous couvert de l'autorité d'un président malade mais apte à remplir ses fonctions, par des acteurs n'ayant aucune sorte de légitimité à le faire, ils ne seront pas entendus car émanant de milieux qui ne sont pas des contre-pouvoirs dissuasifs, et que les citoyens en seront encore à craindre que ce qui pourrait s'entreprendre dans ce but présenterait plus de risque pour le pays que le maintien de Bouteflika et les cafouillages qui en résultent au sommet de l'Etat. Jamais depuis son indépendance l'Algérie n'a été confrontée à pareille situation que celle qu'elle vit en ce quatrième mandat d'un président qui a tout raté même sa sortie.