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Un méga contrat qui n'inquiète que modérément Israël

par Kharroubi Habib

Chaque fois que les Etats-Unis concluent un accord de vente d'armement avec un Etat arabe, c'est le tollé en Israël dont la propagande se déchaîne contre l'opération en la présentant comme allant provoquer un changement au détriment de l'Etat sioniste du rapport de force militaire entre lui et le monde arabe. Les protestations israéliennes aboutissent à ce que, quasi systématiquement, les Américains octroient le plus souvent gracieusement à l'Etat sioniste les compensations financières et en armement qu'il estime indispensable pour conserver sa suprématie militaire dans la région. A l'annonce du méga contrat d'armement de 110 milliards de dollars signé entre les Etats-Unis et la monarchie saoudienne pendant la visite de Donald Trump, Israël n'a pas failli à son habitude mais étrangement avec moins de véhémence dans ses protestations, alors que le contrat en question est le plus faramineux que son allié stratégique a passé avec un Etat arabe. Il n'y a pas eu en effet de la part des dirigeants israéliens l'affichage d'une inquiétude névrotique à voir l'Arabie Saoudite appelée à être dotée d'un énorme arsenal militaire. Ce qui induit clairement que les rapports entre l'Etat sioniste et la monarchie wahabite sont désormais d'une nature tout autre que conflictuelle. Le rapprochement qui s'est opéré entre les deux Etats est un secret de Polichinelle. Il leur a été dicté par la communauté du danger auquel ils s'estiment exposés du fait de l'ambition d'hégémonie régionale que manifeste l'Iran. Pour s'en prémunir, l'Arabie Saoudite et Israël se sont non seulement rapprochés mais jeté aussi les bases d'une alliance politico-militaire contre leur ennemi régional commun. Ne se considérant plus comme des ennemis, leur intérêt mutuel est que leur alliance revête au plan militaire une capacité dissuasive pour le régime en place à Téhéran. Pour Israël, le surarmement de l'Arabie Saoudite n'est plus à considérer comme représentant un péril inacceptable pour sa sécurité nationale et sa primauté militaire dans la région d'autant qu'il est assuré que l'Amérique qui en est le fournisseur lui offrira les compensations qu'il s'estime dues pour conserver celle-ci. Cette course à l'armement provoquée chez les émirs saoudiens est tout bénéfice pour les Etats-Unis auxquels elle fait engranger un faramineux pactole financier dont Donald Trump s'est réjoui car allant lui permettre de financer en partie les projets créateurs d'emplois en Amérique.

Il l'est tout autant pour Israël qui a conditionné la modération de son opposition à l'opération à l'accélération et à l'intensification de la normalisation de ses relations avec l'Arabie Saoudite et partant avec les autres Etats arabes s'étant rangés derrière elle. L'on saisit que le renversement d'alliance qui se produit au Proche-Orient est la pire des choses qui arrive pour les Palestiniens. Leur drame national, le déni historique qu'ils subissent ne sont rien pour les acteurs de ce renversement à côté de l'intérêt géopolitique qu'il sous-tend pour eux. Donald Trump ne fera que donner sa caution à l'alliance israélo-saoudienne anti-iranienne et fera preuve de la même indifférence à l'égard du sort des Palestiniens que celle de ses acteurs.