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Daech, le reflux

par Kharroubi Habib

Sous les coups de boutoir que lui assènent ceux qui la combattent en Irak, en Syrie et en Libye, l'organisation terroriste Daech perd à la fois un grand nombre de combattants aguerris, du terrain et des sources qui lui procuraient jusque-là une partie de l'argent dont le pseudo-khalifat qu'elle a érigé a besoin pour financer les dépenses indispensables à son fonctionnement et à sa survie. Ses revers, son recul et le tarissement progressif de ses ressources financières font que le flux de volontaires venant grossir les rangs de ses troupes combattantes se fait de moins en moins consistant alors qu'ils sont affectés par des désertions, elles de plus en plus massives.

Les revers que subit Daech et la situation défensive à laquelle elle se trouve réduite l'ont contrainte à se rabattre sur la tactique des opérations terroristes spectaculaires médiatiquement et terrorisantes à l'extrême par les carnages qui en résultent. Plus Daech est acculée militairement dans les territoires encore sous son contrôle, plus cette tactique devient son ultime recours d'où il faut s'attendre à la multiplication d'attentats de ce genre non seulement dans les pays où elle a la prétention d'avoir implanté son prétendu khalifat islamique, mais également chez les Etats qui participent sous une forme ou une autre à la lutte contre elle.

Ces attentats sont à considérer comme conçus par Daech comme sa réplique à l'intensification de la pression militaire qu'exercent sur elle ses ennemis de tous bords et la démonstration qu'elle est malgré cela en capacité de leur infliger des coups à pertes humaines insupportables pour leurs opinions publiques nationales respectives. Mais s'il est vrai que les attentats barbares de l'organisation terroriste frappent de sidération dans les pays où ils sont perpétrés, ils sont en train de provoquer un revirement salutaire au sein des milieux dirigeants politiques et militaires qui dans la région ou en Occident se déclarent en guerre contre elle mais ne la lui font que secondairement et sans la détermination nécessaire car préoccupés qu'ils sont d'utiliser les ressources et la puissance militaire dont ils disposent à des fins autre que l'éradication de la menace terroriste universelle qu'elle représente.

Les attentats de Paris, de Bruxelles, d'Orlando puis d'Istanbul suivis par ceux commis au Bangladesh et en Arabie saoudite ont incontestablement contraint les dirigeants concernés à replacer la lutte contre Daech et le terrorisme international en général au centre de l'action gouvernementale de leurs Etats respectifs. Même la Turquie et l'Arabie saoudite qui pour des raisons relevant de leur conception de l'intérêt national prioritaire dans le contexte qui prévaut dans leur région et à leurs frontières émettent désormais le signal qu'ils sont en train de reconsidérer les fondamentaux de leur positionnement sur les conflits dans lesquels Daech est partie prenante.

Il résulte pour Daech que si sa tactique de la riposte par le mode des attentats suicides ou à la voiture piégée lui vaut la médiatisation créant l'illusion que ses défaites militaires n'entament en rien ses capacités à frapper ses ennemis, elle lui vaut de favoriser la constitution par ceux-ci d'un front leur permettant de la combattre d'une manière coordonnée et assurément ainsi plus efficace dans ses résultats. Elle lui vaut même par la barbarie de ses concepteurs et exécutants d'avoir provoqué du rejet quant au caractère djihadiste de son terrorisme au sein de la frange extra-minoritaire parmi les musulmans ayant à un moment cru et défendu sa « légitimité » au plan religieux.