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Réformons la culture dans notre pays !

par Kamal Guerroua

Formons le vœu aujourd'hui, au risque de pécher par naïveté ou excès d'optimisme, que nos autorités prennent la gageure de s'investir sérieusement pour l'avenir du pays dans la technologie du savoir, la connaissance, les arts et la culture. Et que les clans au pouvoir s'arrêtent par là de s'écharper dans des luttes inutiles à coups d'anathèmes, d'excommunications et de dérives verbales! Si je dis cela, c'est parce que, justement, j'ai lu récemment un article dans la presse nationale qui parle du cas très calamiteux du secteur du cinéma à Mostaganem : salles obscures fermées, dégradées ou transformées pour la plupart en salles de fêtes à but lucratif, imbroglios judiciaires, mobilier en piteux état, négligence et manque d'entretien des lieux, incompétence, aucune technologie sophistiquée pour gérer, etc. Et la production cinématographique, le talent et le génie créatif? Que dalle!

On y voit de l'insolence et du laxisme à tous crins. Une situation qui ressemble sans doute à celle des autres régions du pays, Alger en particulier. En effet, le nombre de salles obscures au niveau national ne dépasse pas une trentaine, soit moins du total des 48 wilayas existantes. Ce qui est d'une extrême gravité vu les rentrées d'argent considérables de l'Algérie depuis au moins 10 ans! Or comment peut-on imaginer une génération de jeunes cultivés, tolérants et ouverts sur le monde sans cinéma et culture? De l'impossible! Les Américains sont-ils idiots lorsqu'ils ont installé le Cinéma de Hollywood? La culture devrait être le dada de la patrie dans les prochaines décennies si celle-ci veut vraiment éviter qu'elle s'écroule à vue d'œil.

Il est nécessaire, tant qu'il en est encore temps, de sauver ce qui peut l'être, en disant «non» à la capitulation des volontés et à cette régression tous azimuts, «en quoi les puissances occidentales nous dépassent-elles?» s'est interrogé il y a une vingtaine d'années feu président Boudiaf quelques secondes seulement avant sa mort, «par la science!» répondit-il. Répéter cela n'est pas oiseux quand on voit le budget alloué au ministère de la Défense augmenter chaque année alors que la culture, l'éducation et le savoir restent les parents pauvres des politiques gouvernementales!

Serait-il de notre intérêt de nous ruiner par ce mépris de tout ce qui fait notre progrès? Pourquoi nos élites rechignent-elles à raviver la flamme dans l'esprit des jeunes par l'encouragement des écoles d'élite, les pôles d'excellence universitaires, les cinémas, les théâtres, etc. ? Pourquoi n'accordent-elles que peu d'importance au statut du chercheur, artiste, intermittent du spectacle et de créateur? Les producteurs de la richesse culturelle, des biens de l'esprit et de la connaissance en général ne sont pas reconnus à leur juste valeur en Algérie! On ne s'agite en jouant des coudes que dans l'arène du pouvoir. Des responsables qui s'envoient des piques et des injonctions contradictoires tandis que ceux qui sont censés défendre le temple de la culture cafouillent. Que nous reste-t-il enfin à part cette sensation de perdition qui nous étrangle et nous envahit de partout!