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La crise économique algérienne n'était pas une fatalité

par Kharroubi Habib

Dans le message qu'il a adressé aux travailleurs à l'occasion de la célébration de la fête internationale du travail, le chef de l'Etat n'a pas masqué ni même minimisé la gravité de la situation au plan économique et financier que le pays vit en conséquence de la crise économique mondiale. Il a en effet admis que l'Algérie est de ce fait confrontée à une conjoncture difficile qui ne laisse d'autres choix à l'Etat que « d'opter pour la rigueur dans la gestion des fonds publics, l'utilisation de nos ressources naturelles et la poursuite et l'approfondissement des réformes économiques structurelles en cours ».

Les travailleurs à qui le message a été adressé mais aussi l'ensemble des citoyens ayant pris connaissance de son contenu auront sans nul doute compris qu'il leur est demandé de ne plus compter sur les « largesses » de l'Etat même si Bouteflika a tenu à préciser que la rigueur en question « doit être assortie de choix qui préservent autant que possible nos principes sociaux et notamment le maintien du niveau de vie des catégories aux revenus modestes ». Ils ne s'empêcheront pas néanmoins de rejeter sur sa gouvernance le fait que l'Algérie se retrouve prise à la gorge aussitôt que les cours du pétrole ont dégringolé. Et ils n'auront pas tort ni ne seront injustes en cela car cette gouvernance qui a eu la durée pour elle et surtout une aisance financière prolongée ne s'est pas préoccupée de libérer l'économie nationale et partant le pays de leur dépendance de la rente pétrolière.

Bouteflika a été dans le vrai en affirmant dans son message que « ni les Algériens ni d'autres peuples qui luttent quotidiennement pour arracher leur droit au développement et au progrès » n'ont de responsabilité dans la crise économique mondiale cause de la conjoncture difficile que le pays traverse actuellement lui imposant rigueur et austérité. Lui et les gouvernements qu'il a chargés de gérer le pays ne peuvent être exonérés du fait que tout en ayant été parfaitement conscients de la nocivité de la dépendance de l'économie nationale de la rente pétrolière et renseignés sur les conséquences inéluctables qu'aurait son prévisible tarissement, ils ont maintenu et même aggravé cet état. Au lieu de la rigueur dans la gestion des fonds publics que Bouteflika prône désormais, il a été pratiqué une aberrante utilisation de ces fonds à des fins dont l'objectif ne fut pas la mise en place d'une économie nationale diversifiée en capacité d'atténuer l'impact sur l'Algérie des reculs des prix du pétrole.

Il n'est pas niable que l'aisance financière aidant, il a été réalisé dans l'ère Bouteflika des infrastructures de base indispensables au développement socio-économique du pays lui permettant d'aspirer à l'édification en un court laps de temps d'une économie productive diversifiée et compétitive. Celle-ci est pourtant loin d'avoir pris corps tant il a été mis d'entraves à son émergence, pour la raison que prédomine dans la caste dirigeante l'esprit rentier qui n'est satisfait que par l'économie du container source d'une prédation qui s'est socialisée dans ce milieu. S'il n'est pas trop tard pour l'Algérie à être dotée d'une économie diversifiée et productive, le prix à payer par les citoyens pour cela en va être plus rude et amer pour eux que si cet objectif avait été visé quand l'Algérie disposait du moyen financier les mettant à l'abri de réajustements sociaux préjudiciables pour leur niveau de vie.