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La Palestine membre de la CPI, et puis après ?

par Moncef Wafi

Les Palestiniens sont devenus officiellement membre de la Cour pénale internationale (CPI), mercredi 7 janvier, le jour même de l'attaque des frères Kouachi contre les locaux du journal satirique Charlie Hebdo. Si la tentation de lier les deux événements est grande, il n'en demeure pas moins qu'elle est le ciment des tenants du complot. Cette adhésion, objectée par Washington, est le premier jalon qui conduira, peut-être un jour, Israël à répondre de crimes contre l'humanité devant le CPI qui pourra enquêter, dès le 1er avril, sur les allégations de crimes commis dans les Territoires palestiniens. Ainsi, la procureur de la CPI, Fatou Bensouda, a ouvert ce vendredi un examen préliminaire de la situation en Palestine après l'adhésion, le 2 janvier 2015, du gouvernement palestinien au Statut de Rome qui régit la Cour. Une démarche qui n'est pas encore totalement une enquête, mais le premier pas pour décider, sur la base d'informations disponibles, s'il existe une base raisonnable pour initier une enquête au regard des critères posés par le Statut de Rome. Une précision de taille voulue par la Cour pour éviter tout amalgame et faux espoirs qui pourraient naître de cette décision. Le communiqué de presse du CPI ajoute, en outre, que l'analyse «indépendante» et «impartiale» du bureau du procureur fera foi. Aucun délai n'est imposé à la Cour pour rendre une décision relative à un examen préliminaire. Un autre point du règlement pour soustraire la Cour à toute pression. Selon les analystes, le cheminement, de l'ouverture d'une enquête au procès est toujours un processus long et compliqué. Si Fatou Bensouda a décidé de procéder à un examen préliminaire sur la situation en Palestine, il n'est pas dit qu'elle demandera l'ouverture d'une enquête. Et l'adhésion de la Palestine à la CPI n'y changera rien. En effet, le bureau du procureur mène actuellement des examens préliminaires dans dix situations : le Honduras, l'Ukraine, l'Irak, l'Afghanistan, la Colombie, la Géorgie, la Guinée et le Nigeria, alors que l'ancien procureur général de la Cour, Luis Moreno Ocampo, a mis plus de trois ans pour décider qu'il ne pouvait pas se prononcer sur le statut de la Palestine qui avait introduit une demande en 2009. C'est dire que ce n'est pas pour demain qu'on verra Israël aux box des accusés à La Haye et qu'il faudra attendre des années pour que la CPI réponde à la question préalable de savoir s'il faut ou non ouvrir une enquête. Autre levier de sécurité pour l'Etat hébreu, le pouvoir du Conseil de sécurité de l'ONU contrôlé par les Etats-Unis d'Amérique d'empêcher l'ouverture ou la poursuite d'une enquête pour une année renouvelable, grâce à une résolution adoptée en vertu du chapitre VII. Même dans le cas où la procureur a commencé à enquêter, si Israël informe la Cour qu'il ouvre une enquête de son côté, elle est obligée de reporter la sienne jusqu'à nouvel ordre.