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La fin d'une époque pour Israël

par Kharroubi Habib

Les revers s'additionnent sur le plan diplomatique pour l'Etat sioniste. Le dernier en date lui a été infligé par l'Assemblée nationale française dont les députés à l'instar de leurs homologues britanniques, irlandais et espagnols ont à leur tour adopté une motion invitant leur gouvernement à reconnaître l'Etat palestinien.

Devant la cascade en Europe de prises de position prônant cette reconnaissance, les dirigeants israéliens font feu de tout bois pour en minimiser la portée et marteler qu'ils considèrent nulle et non avenue pour leur Etat une décision dans ce sens que les gouvernements européens concernés pourraient prendre en conformité avec le vœu exprimé par leurs parlements respectifs. Mais l'arrogance de leurs déclarations ne masque nullement la panique qui s'est emparée d'eux. Ils sont en effet réellement en panique au vu que les votes des parlements européens sont la traduction du revirement intervenu au sein des opinions de ce continent sur le conflit israélo-palestinien qu'elles ont longtemps apprécié sous un angle favorable aux positions et thèses israéliennes. Ils comprennent parfaitement que le temps où Israël pouvait agir et se comporter comme il voulait à l'égard des Palestiniens tout en bénéficiant d'un soutien européen inconditionnel est désormais révolu.

Certes, les motions votées à Londres, Dublin, Madrid et Paris sont effectivement non contraignantes pour les gouvernements destinataires. Mais ces gouvernements qui ont fait connaître leur intention de ne pas suivre dans l'immédiat les invitations de leurs parlements ne peuvent plus exprimer de soutien inconditionnel à l'Etat sioniste dont les dirigeants sont manifestement déterminés à camper dans le déni des revendications palestiniennes ayant désormais une écoute favorable au sein de leurs opinions nationales. Certains d'entre eux l'ont déjà fait savoir à Israël. Mais entretenant toutefois des liens particuliers avec cet Etat, ils repoussent l'irréversibilité de leur reconnaissance de l'Etat palestinien en affirmant pour la plupart qu'elle n'interviendra qu'après qu'Israéliens et Palestiniens auront conclu par des négociations directes un accord sur la question.

Ce retrait que les pays européens concernés observent sur le sujet par rapport à leurs opinions nationales et à leurs propres majorités parlementaires est principalement dû aux pressions exercées sur eux par les Etats-Unis totalement acquis à l'Etat sioniste. Ces pays n'ignorent pas pourtant qu'un tel accord par des négociations directes a été rendu impossible car non voulu par l'Etat sioniste qui formule pour cela des conditions et exigences qui sont inacceptables pour les Palestiniens. Ils devront tôt ou tard par conséquent reconnaître que leur préalable de négociations directes à leur reconnaissance de l'Etat palestinien ne tient pas la route et sera combattu par leurs opinions.

Ceux qui pour faire pièce à la demande de leurs parlements se réfugient derrière ce préalable font mine d'oublier que leurs Etats respectifs ont admis en 1948 la création de l'Etat sioniste et procédé à sa reconnaissance sans se soucier d'un accord préalable sur le sujet entre Juifs et Palestiniens. A l'époque, il est vrai que les Palestiniens n'en voulaient pas ce qui a donné prétexte à la « communauté internationale » de leur imposer son fait accompli. L'affaire de l'Etat palestinien bute aujourd'hui sur un obstacle à l'identique mais du fait des Israéliens. Pourquoi alors la « communauté internationale » ne s'estimerait pas habilitée à réagir de même qu'elle l'a fait en 48 ? La réponse est dans l'allégeance faite par les élites dirigeantes de certaines puissances européennes aux Etats-Unis et lobbys sionistes à l'influence avérée sur leurs décisions.