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Des augures alarmistes qui sont en train de se vérifier

par Kharroubi Habib

La rentrée sociale s'étant effectuée dans un climat de relatif apaisement sur le front social, il a semblé que les augures alarmistes avertissant qu'il fallait s'attendre à ce que le pays connaisse une déferlante de contestations sociales ont été démentis. Ils ont repris du crédit pourtant et suite à la plus inédite et donc inattendue poussée de fièvre sur ce front sous la forme d'un débrayage dont les protagonistes ne sont nullement adeptes de cette sorte d'expression revendicative que sont les policiers qui plus est agents des unités républicaines de sécurité (URS) dont la mission première est d'exercer un contrôle sur la société visant à empêcher à ce qu'elle s'implique dans des mouvements de cette nature.

Ce sont donc paradoxalement ces gardiens de la paix sociale qui ont fait monter la température sur le front social. Ce qui n'était certainement pas le but visé par la fronde qu'ils ont animée en s'appuyant sur des revendications socioprofessionnelles dont les autorités ont annoncé la satisfaction quasi totale avec une célérité dont on comprend d'ailleurs les raisons étant à l'origine. D'autres agents étatiques leur ont aussitôt emboîté le pas en faisant savoir qu'ils vont suivre l'exemple de ces policiers et mener à leur tour des actions de revendication de la même veine. Le corps de la protection civile est le premier à avoir ouvert le bal en annonçant que ses agents préparent un imposant sit-in en novembre prochain.

D'autres corps étatiques dont on pensait que la flamme contestatrice en leur sein avait perdu de sa vigueur menacent de leur retour en force dans la protestation sociale. Ce qui est le cas pour les gardes communaux qui préparent semble-t-il une grande action nationale pour le jeudi 23 octobre dans la ville de Bouira. Le secteur de l'éducation n'est pas en reste puisque des syndicats autonomes exerçant en son sein semblent décidés à renouer avec la grève pour cause de l'infructuosité du dialogue social initié par la nouvelle ministre de l'Education nationale. D'autres milieux socioprofessionnels ne tarderont certainement pas à entrer dans la danse auxquels s'ajoutant ceux dont les protestations s'expriment déjà mais ont été moins visibles et audibles parce que concernant des effectifs contestataires restreints, l'on sera alors en présence d'un mouvement social d'envergure et d'intensité tel que prédit dans les augures faits sur la rentrée sociale.

Cette montée de la protestation sociale doit probablement inquiéter un pouvoir dont les moyens financiers d'acheter «la paix sociale » fondent proportionnellement à la dégringolade qu'enregistrent les cours des hydrocarbures sur les marchés internationaux. Pouvoir qui est dans le même temps confronté à une fin de règne entraînant une crise de succession et en butte à une offensive politique de l'opposition qui a trouvé incontestablement du répondant dans l'opinion publique et la société civile. Dans ce contexte, persistera-t-il dans sa traditionnelle gestion autoritaire du mouvement social qui s'enclenche ? Ou se décidera-t-il enfin à nouer le dialogue avec ses véritables acteurs ?

S'il s'enferme dans son penchant naturel : l'autoritarisme et l'autisme, il accélérera sans aucun doute la jonction entre contestation politique et sociale que les partis de l'opposition ne sont pas jusque-là parvenus à établir et à exploiter. Cette opposition pourra alors se présenter et de façon crédible comme détenant l'alternative à son maintien aux commandes du pays.