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De l'inévitable débat sur l'inflation et les prix

par Yazid Alilat

Le coût de la vie, ou l'inflation, reste encore haut en Algérie. Les prix des principaux produits de consommation, comme ceux des services ou des loyers, continuent d'augmenter, en dépit autant de la disponibilité de produits et de la présence de l'Etat à travers le système de subvention. Dès lors, de larges pans de la société sont directement touchés par une sorte de misère sociale qui ne dit pas son nom, puisque la plupart des ménages arrivent à subvenir à leurs besoins. Mais, pas tous. Car si l'essentiel du budget des Algériens va à la consommation (produits agricoles frais et industriels), beaucoup n'arrivent pas à habiller correctement leurs enfants, à payer leurs loyers, l'eau et l'électricité. Il y a également les dépenses de transport et celles liées à la scolarité de leurs enfants qui grèvent encore le budget des ménages. La situation devient difficile lorsque les prix des principaux produits de consommation enregistrent des hausses, conjoncturelles ou structurelles, et là, l'absence de l'Etat, dans son rôle de régulateur de la sphère commerciale, se fait le plus ressentir. Car il est extraordinaire de constater que, sous le fallacieux prétexte du respect de la loi de l'offre et de la demande, les marchés de gros des fruits et légumes, tout comme d'ailleurs ceux des produits de la pêche et industriels, sont laissés dans l'anarchie, avec des prix souvent renversants ! Ce qui, souvent, a provoqué autant la colère des consommateurs qu'un débat biaisé sur le rôle de l'Etat dans la régulation des produits de large consommation et le contrôle des prix. Et, il est loisible aujourd'hui de dire qu'il n'y a plus de mercuriale, du moment que le ministère du Commerce laisse faire, refusant d'intervenir, même devant la prolifération de marchés clandestins. Sans parler d'absence inquiétante de l'Etat dans certains circuits commerciaux, tout autant que la fixation inexpliquée et aléatoire des prix des produits de l'industrie agroalimentaire (yaourts, jus, boissons, fruits conditionnés,?), le fait est que, aujourd'hui, les salaires n'arrivent plus à rattraper une hausse démentielle des prix des produits alimentaires et agroindustriels. A fin juillet dernier, le niveau moyen des prix des biens alimentaires a enregistré une hausse de 3,9% et de 5,1% pour les produits agricoles frais par rapport à la même période en 2013, et 2,7% pour les produits alimentaires industriels. Théoriquement, les hausses des prix des produits de large consommation et agricoles frais doivent être contrôlées et maîtrisées au départ, dès la confection de la loi de finances. C'est pour cela que dans toute loi de finances, le gouvernement avance le niveau de l'inflation à ne pas dépasser chaque année et la réduire le plus possible par une maîtrise des prix. Dans le cas algérien, il semblerait qu'il n'y a aucune relation entre le niveau de l'inflation prévu par le gouvernement dans ses lois de finances, et celui réel, celui du marché, celui de l'économie réelle du pays, celle en fait non maîtrisée par les mécanismes mis en place par les ministères concernés. Sinon, comment expliquer qu'en pleine saison agricole, la tomate se vend à plus de 60 Da/Kg, la pomme de terre au même prix et des produits du jardin qui ne descendent plus de 25 Da/kg. Assurément, il y a quelque part dans ce schéma une défaillance de l'Etat régulateur, comme il est évident que les prix subventionnés de beaucoup de produits de large consommation sont, dans leur conception même, dépassés. A ce stade-là, il faudrait peut-être subventionner la pomme de terre et la tomate, le tablier des écoliers et les vêtements des enfants, plutôt que la semoule et l'huile, importées. Au moins pour cautériser une inexorable fracture sociale.