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La politique de la carotte et du bâton

par Kharroubi Habib



Quelle que soit l'option qui sera la sienne pour l'élection présidentielle, le pouvoir a émis des signaux qui ne laissent pas planer le doute sur son intention de l'imposer quitte à encourir l'accusation d'avoir faussé les règles du jeu démocratiques qu'il s'est engagé à respecter et à veiller à leur application à l'occasion de ce crucial rendez-vous électoral. C'est ainsi que s'interprètent en tout cas la série d'événements intervenus dans le pays après le retour de Bouteflika après son hospitalisation en France.

Le premier d'entre eux a été la « normalisation » au pas de charge du FLN dont tout candidat du camp officiel doit pour une question de symbolique se prévaloir de l'onction. Celle de l'autre parti relais du pouvoir, le RND en l'occurrence, est elle aussi en marche depuis le retour du président. Mais celui qui a clairement fait l'éclairage sur la façon dont le pouvoir entend organiser la compétition électorale a été le remaniement gouvernemental auquel Bouteflika a procédé. Un remaniement par lequel le président a confié à des fidèles parmi les fidèles à sa personne les postes clefs de l'exécutif.

Il a ce faisant fait tout le contraire de ce que réclamait l'opposition en prévision de l'élection présidentielle, à savoir la désignation d'un exécutif gouvernemental « neutre » sur les mesures de celle-ci, et instruit à l'organiser sans esprit partisan. Tout aussi inquiétante pour le climat dans lequel cette élection va avoir lieu est la poursuite ordonnée de la fermeture de l'accès aux médias lourds publics à tous les acteurs politiques dont le discours est à contre-courant de celui du pouvoir. Tout comme l'est l'interdiction administrative qui a empêché quatorze chefs de parti de l'opposition de se rencontrer publiquement en vue de se concerter sur la recherche d'une stratégie électorale commune face au pouvoir.

En fait d'ouverture, l'on assiste a un verrouillage tous azimuts dont l'objectif est de faire le vide face au camp officiel. Pour ce faire, le pouvoir a recours à la classique méthode de l'utilisation à la carte de la politique de la carotte et du bâton. La carotte étant de faire miroiter aux acteurs politiques que leur adhésion au dessein électoral du pouvoir leur vaudra un juteux renvoi d'ascenseur. C'est le FLN « normalisé » et chapeauté par Amar Saïdani qui est chargé de cette opération de séduction et racolage. Son but est la constitution d'un conglomérat de sigles partisans destiné à créer l'illusion que le candidat qui va porter les couleurs du pouvoir fait large consensus dans la classe politique et par extension dans l'opinion publique.

Il est évident que les prémices d'une dynamique unitaire anti-candidat du pouvoir qu'a fait entrevoir le débat qui s'est engagé dans les milieux politico-partisans ne laissent pas indifférents Bouteflika et son clan. Ils manœuvrent encore plus sournoisement pour faire avorter cette dynamique qui pourrait déboucher sur la constitution face à eux d'une force électorale susceptible de déjouer leur plan surtout si elle se fédère autour d'une candidature crédible.

Au lieu de s'enfermer dans le débat stérile de savoir si Bouteflika va ou non être candidat à sa succession, l'opposition qui prétend se mobiliser pour faire obstacle à la reconduction du système duquel il est issu se doit pour les mois qui restent avant l'élection présidentielle de centrer son action et ses revendication sur les assurance à arracher au pouvoir pour que la compétition électorale se déroule dans les conditions et normes de démocratie acceptables et que le choix populaire s'exprime librement et en toute transparence, que ses composantes qui s'agitent comme des cabris en clamant « tout sauf Bouteflika » changent de comportement et travaillent à en convaincre l'opinion et à faire émerger une alternative en laquelle une majorité de l'électorat se reconnaîtrait et se mobiliserait pour son succès.