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Défense des droits de l'homme à géométrie variable

par Kharroubi Habib

Dans le cas où le roi d'Espagne Juan Carlos qui effectue une visite officielle au Maroc n'aurait pas bien été renseigné sur l'ampleur de la répression que subissent au Sahara Occidental occupé par ce pays les militants des droits de l'homme, l'organisation internationale de défense de ces droits basée à Londres s'est chargée de lui en dresser un tableau qui en démontre toute la gravité en lui rappelant que son pays l'Espagne a une responsabilité historique dans le conflit du Sahara Occidental qui doit lui faire obligation de soulever la question du respect de ces droits en ce territoire occupé par le Maroc lors de ses entretiens avec le monarque de ce pays.

Juan Carlos est peut-être sensible au drame des Sahraouis et conscient que l'Espagne n'a pas été étrangère à cette situation, mais il est tenu par la raison d'Etat qui fonde la politique de son pays sur ce dossier consistant à ne pas soulever ce qui fâche dans les relations hispano-marocaines. Le Roi s'abstiendra donc d'aborder avec son homologue marocain cette question du respect des droits de l'homme en territoires sahraouis occupés dont l'évocation est toujours très mal accueillie à Rabat. Le roi d'Espagne agira en la circonstance comme le font les Premiers ministres de l'Etat espagnol quand ils visitent le Maroc ou reçoivent les représentants de ce pays.

L'Espagne n'est pas la seule démocratie occidentale à avoir une position à géométrie variable sur la question du respect des droits de l'homme. Presque toutes subordonnent leur défense de ces droits à la protection de leurs intérêts nationaux dans les pays que le bafouent. Au Maroc, l'Espagne a des intérêts géopolitiques et économiques qui dictent à ses gouvernants de ne pas se montrer trop regardants et désapprobateurs des atteintes aux droits de l'homme qui se commettent au Sahara Occidental. D'autant que la géographie, l'histoire et la densité du partenariat hispano-marocain ont fait que Madrid a opté pour reconnaître au Maroc un rôle «clef» dans la vision de sa politique à l'égard du Maghreb et pour la région méditerranéenne. Quitte à déplaire à l'Algérie avec laquelle l'Espagne se flatte pourtant de vouloir établir aussi une relation «stratégique».

D'où l'énoncé par Madrid d'ambiguës prises de position sur le dossier du Sahara Occidental en fonction que ses interlocuteurs sont Marocains ou Algériens. Ce lyrisme finira cependant par se révéler non payant, car l'opinion internationale finira pas s'en lasser et en dénoncera la perfide hypocrisie. Ce que vient de faire l'organisation internationale des droits de l'homme et que sont de plus en plus nombreuses les autres organisations humanitaires qui le pourfendent. Juan Carlos fera l'impasse sur la question des droits de l'homme au Sahara Occidental. Son silence ne grandira pas le respect porté à l'Espagne qui fera preuve en la circonstance que le credo de la défense des droits de l'homme n'est opposable par elle qu'aux Etats avec lesquels elle n'a pas de liens d'intérêts qui comptent pour l'économie et l'industrie espagnoles.