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En finir avec les féodalités locales de la représentation

par Kharroubi Habib

Depuis sa nomination en tant que Premier ministre, Abdelmalek Sellal enchaîne les sorties sur le terrain sous la forme de visites de travail et d'inspection à travers les wilayate du territoire dont il consacre un espace temps à des rencontres avec les «sociétés civiles locales». Cet exercice était prévisible de sa part sachant que contrairement à ses prédécesseurs, il a le goût du contact sur le terrain et du dialogue qu'il implique. Cet exercice il se l'est d'ailleurs fixé comme mode de travail dans le plan d'action gouvernemental qu'il a présenté à l'Assemblée populaire nationale en faisant du rétablissement de la confiance des citoyens envers l'Etat la priorité phare de cette action dont lui revient la responsabilité de l'impulser. L'intention est louable, son objectif est d'une absolue nécessité pour combler le dangereux fossé qui s'est creusé entre ces citoyens et leur Etat dont il risque d'en découler des situations d'une extrême gravité pour la stabilité du pays.

Les sorties sur le terrain du Premier ministre comme celles d'ailleurs des ministres de son gouvernement ne sont pas pour autant la panacée dont il faut attendre qu'elles vont renouer par le simple fait qu'elles ont lieu le lien de confiance rompu entre les citoyens et l'Etat. Pour cela, il faut que ces citoyens ne voient plus dans ces visites des déplacements de circonstance et des occasions exploitées par ceux qui les font à délivrer des satisfecit souvent surfaits aux autorités et administrations locales et à se gargariser d'autosatisfactions sur leurs bilans. Il faut aussi que ces hauts représentants de l'Etat en finissent avec ces fausses vraies prises de contact avec les «sociétés civiles locales» qui se résument à pérorer devant des auditoires composés de féodalités de la représentation populaire dans lesquelles les populations ne se reconnaissent plus depuis bien longtemps en raison de l'éloignement de leurs préoccupations respectives.

Abdelmalek Sellal a été wali. Il a eu donc à s'apercevoir que les prétendues notabilités auxquelles les autorités locales ouvrent grandes les portes de leurs bureaux et écoutent les «conseils» sont en fait et en majorité déconnectées des véritables problèmes auxquels les simples citoyens se confrontent et à l'origine des explosions de colère qui sont la forme d'expression revendicative. En tant que Premier ministre, il constate que partout où la contestation sociale s'organise et se manifeste elle englobe dans son rejet la «représentation» autoproclamée de ces notabilités. Vouloir par conséquent perpétuer le dialogue entre l'Etat et les populations à travers ces faux médiateurs c'est condamner à la stérilité les prédispositions dialoguistes qui font la particularité de Abdelmalek Sellal.

A Oran, le Premier ministre a admis que dans notre pays il existe une crise de confiance dans les institutions étatiques et que par conséquent si l'on aspire «à aller de l'avant nous devons mutuellement nous faire confiance». Pour y arriver faut-il encore que l'Etat renonce à imposer à ces citoyens leurs représentations et renouent le dialogue avec eux à travers d'autres interlocuteurs que ces féodalités de la représentation qui dans chaque wilaya constituent un écran entre les autorités étatiques et la population.