Bien que le Ramadhan et l'Aïd ne soient pas encore là, mais leur vent déboule déjà pour que les commerçants se frottent les mains et les ménages raclent leurs poches. Plis culturels et religieux intangibles pour imposer aux élans dépensiers d'aller assiéger les commerces et les boutiques. Le temps a quelques réticences à changer de couleur et de rythme. La société doit se plier aux habitudes et aux coutumes pour présenter une bonne figure à Dieu, aux us et aux coutumes et on devine à quel prix.

Dans la moyenne, un couple avec trois enfants gagne cinquante mille dinars pour vivre. L'attribut modique ne permet qu'une puisée ardue pour se nourrir, se vêtir et faire face à ce que le modernisme diffus réclame tous les jours. La batterie des exigences est lourde à porter. Aux doléances chagrinées du couffin s'ajoutent le loyer, les factures d'eau, de gaz et d'électricité dans lesquels s'infiltre depuis une décennie la saignée devenue courante, les frais des cours de rattrapage scolaire pour les enfants, de l'internet et la redondance du «flexy». Pour le reste, on va jusqu'à négocier avec le pharmacien sur le contenu de l'ordonnance médicale pour rogner de sa lourdeur.

Mais au cœur du magma de ses pesantes déconvenues financières s'érige une des qualités fondamentales humaines. La faculté d'adaptation est une permanente et indéfectible attribution accordée à l'homme pour s'aligner sur les exigences de la vie. La société algérienne est d'évidence en mue. Du fait des différentes crises, petites et grandes qui n'ont épargné personne, elle modèle et modère sa culture de consommation. Il est vrai que dans sa majorité, elle ne le fait pas de gaieté de cœur mais elle a dû s'y plier malgré elle. Elle s'y applique parfois avec philosophie, foi et sagesse. Parfois avec réticences et colères. Mais elle s'y met avec ce que l'on croit être du fatalisme. Car le lent changement de cap existentiel est l'apanage du monde entier.

Alors la venue du Ramadhan et de l'Aïd n'est qu'un nouvel exercice d'adaptation.