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Les penchants et les approches

par Abdou BENABBOU

Quelques voix s'accordent pour affirmer que l'Algérie n'est pas dans une crise économique. Leurs arguments reposent sur l'absence d'un endettement extérieur, sur la disposition de plus de 50 milliards de dollars comme réserve et sur une rente pétrolière annuelle autour des 12 milliards de dollars. Cet optimisme primaire renvoie à la bouteille à moitié vide et à moitié pleine et repose sur un préconçu trop élémentaire pour s'arrêter au simple énoncé de quelques chiffres en ne dévoilant en aucune manière la profondeur de l'économie algérienne.

D'ailleurs, les différents pouvoirs algériens se sont toujours ingéniés au tripotage des chiffres et se sont toujours gargarisés avec les données sommaires pour justifier une satisfaction trop élémentaire en donnant la tangible conviction qu'ils évoluent hors du temps et loin de la réalité du terrain.

De fait, les chiffres et les statistiques n'ont que la valeur de ce que l'on en fait et des dividendes de ce qu'ils produisent de concret. L'esprit rentier souligne toujours ce que l'on a et occulte ce que l'on en fait.

Aujourd'hui, n'importe qui peut discourir sur le sujet selon ses penchants et ses approches et il est offert à tout le monde de s'épancher sur les données. Mais pour l'heure, l'essentiel n'est pas dans les lectures rapides des graphiques et des tableaux, mais dans ce qui a été mal fait et bâclé hier pour pousser tout un peuple à se soulever et occuper les rues. Il s'agit de définir avec justesse et raison de quoi est né ce paradoxe qui a voulu qu'une révolution naisse alors que, par exemple, plus de trois millions de logements ont été distribués et des milliers de milliards fourgués contre le chômage. Si aucun Algérien ne meurt de faim, il faut bien se demander pourquoi l'espoir a été enterré et pourquoi les bonnes perspectives d'une vie heureuse se sont évanouies des horizons.

Si la gouvernance est souvent mise à l'index comme seul sujet de remontrance, elle ne suffit pas.

Avant de se nourrir de chiffres, il est sans doute profitable et peut-être essentiel que chaque Algérien se pose à lui-même la question.