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Bureaucratie

par Mahdi Boukhalfa

La bureaucratie est un mal incurable dans notre pays. Cela est autant dommageable pour l'image de marque de l'Algérie auprès des grands décideurs financiers et industriels mondiaux que pour l'intérêt des investisseurs pour le marché algérien. Les plus hautes autorités du pays l'ont déclaré et répété à l'envi que la bureaucratie doit être éliminée, éradiquée. Mais, depuis l'ère Sellal, qui avait dans son plan d'action gouvernemental en 2012 prôné la réhabilitation des services publics, le rapprochement du citoyen de l'administration, les facilitations dans le domaine des investissements et l'allégement fiscal pour les entreprises, tout est allé de mal en pis.

Depuis maintenant une dizaine d'années, la lutte contre la bureaucratie a pris des allures de serpent de mer et, fatalement, les grands projets industriels, agricoles sont bloqués, sinon doivent passer par le trou de la serrure bureaucratique pour voir le jour. Résultat : le pays n'attire plus les investisseurs et reste lourdement lesté par les risques à l'investissement et l'incertitude quant à la suite à donner aux demandes d'investissement. Le constat de la Banque mondiale reste sans complaisance mais, surtout, douloureux pour tous ceux qui luttent vraiment pour donner un meilleur visage de l'économie algérienne et ses potentialités aux milieux d'affaires internationaux. Car les données rendues publiques par la Banque mondiale sur le climat des affaires en Algérie sont plutôt décevantes et, plus que tout, montrent que rien n'a été fait, pratiquement, pour améliorer le climat des affaires dans notre pays.

Les données chiffrées de la Banque mondiale montrent que le pays n'arrive vraiment pas à se débarrasser de sa bureaucratie, un cancer, qui mange irrémédiablement toutes les opportunités de développement économique et social. D'abord, l'Algérie est parmi les derniers, selon le classement Doing Business de la Banque mondiale, en matière de création d'entreprises ou pour le transfert de propriété, qui peut s'étaler sur 55 jours quand cette durée n'est que de 5 jours dans la région Mena. Plus grave, les entreprises algériennes sont assujetties à 27 taxes différentes et y laissent 72% de leurs profits contre seulement trois impôts en Chine. Cela laisse rêveur, d'autant que la liste noire ne s'arrête pas là, puisque pour l'obtention du permis de construire l'opération nécessite 19 procédures et 136 jours.

Fatalement, et vue de l'extérieur, l'Algérie reste un pays où il est très difficile d'investir, de monter des projets agricoles ou autres et de faire des placements financiers. Non seulement le risque commercial et financier devient réel avec la baisse des réserves de change et le recours au financement non conventionnel du Trésor, mais il y a surtout les lourdeurs bureaucratiques qui dissuadent les plus téméraires. Et, paradoxalement, rien ne semble avoir été fait pour améliorer le climat des affaires en Algérie, où même la règle des 51/49% a été acceptée, mais les pesanteurs bureaucratiques jouant un rôle d'inertie, que vient de dévoiler la Banque mondiale. D'autant que, pour contourner ces difficultés à attirer les investisseurs, les autorités financières n'ont rien fait pour tester l'attractivité de l'économie nationale en allant demander un «rating», même sévère et qui peut par la suite être corrigé, auprès des grandes agences de notation pour montrer les potentialités du marché algérien. La bonne gouvernance économique passe d'abord, en fait, par la fin de la bureaucratie.