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Pour le bien de tous

par Moncef Wafi

Même s'il est enveloppé dans des circonvolutions d'usage, l'arrêté fixant le mode de l'appel à la prière ainsi qu'à la modération des haut-parleurs de la mosquée ressemble à s'y méprendre à une véritable révolution. En effet, et depuis des décennies, des mosquées et salles de prières disséminées dans les quartiers imposent des décibels outrageusement agressifs lors des appels à la prière. Si dans la journée les bruits de la vie arrivaient à estomper un tant soit peu le bruit des haut-parleurs, le problème se posait surtout la nuit et au petit matin en termes de tapage nocturne. Si le sujet n'est pas à débattre, l'exagération dans les décibels, elle, devait être abordée puisqu'elle porte préjudice à la quiétude des riverains. Enfants, personnes âgées, malades chroniques étaient constamment agressés et les citoyens assistaient à une véritable cacophonie s'étendant sur une dizaine de minutes et les appels se faisaient entendre à des kilomètres à la ronde tant le haut-parleur était à son maximum.

Vu le nombre important des mosquées par quartier, pousser le son à son paroxysme devenait superflu, relevant à la limite de l'irrespect du bon voisinage. Le fait même d'aborder le sujet de ces nuisances sonores rendait son auteur suspect aux yeux de la communauté, interdisant de facto tout débat responsable autour de la réglementation de l'appel comme cela se fait un peu partout dans les pays musulmans. Sans arriver jusqu'à remplacer les muezzins agréés par des voix enregistrées, il était temps que l'Etat intervienne pour réglementer tout cela. La fiche technique, rapportée dans l'article 7 de cet arrêté, devra fixer notamment les normes spécifiques relatives à la qualité esthétique de l'appel à la prière et des haut-parleurs.

Cela va certainement être interprété comme une intrusion des pouvoirs publics dans les affaires de la mosquée mais la polémique, si cela en est une, est salutaire pour que cette discordance cesse. Les réactions les plus virulentes sont à attendre et les vieux réflexes de s'opposer mais la démarche du ministre des Affaires religieuses ne peut être que saluée pour son audace d'autant plus qu'aucun de ses prédécesseurs n'avait osé ouvrir ce dossier. Reste maintenant à espérer que les muezzins respectent ces nouvelles règles pour le bien de tous.