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Les mots justes

par Moncef Wafi

Infime est la ligne entre l'humanitaire et le sécuritaire et Ouyahia vient de l'apprendre à ses dépens. Se fendant d'un commentaire sur les réfugiés subsahariens, le SG du RND a provoqué une polémique dont il se serait volontiers passé. On voit pourtant mal Ouyahia, qu'on présente comme un présidentiable en puissance, faire étalage d'un racisme et d'une xénophobie primaires, repris et condamné par tous. L'homme a sans doute péché par malentendu car ce dossier, plus qu'un autre, est hautement sensible dans le contexte actuel.

Notre propos n'étant pas de dédouaner quiconque, mais comme nous l'avions souligné dans ce même espace, la question des migrants risque de valoir pas mal de migraines au pays. Même l'intervention du ministre des Affaires étrangères, mettant en cause non pas la migration mais les réseaux qui l'entretiennent, a été interprétée autrement. Messahel accusé, lui aussi, de verser dans la littérature de l'extrême droite. En évoquant la sécurité nationale, le chef de la diplomatie algérienne et le SG du RND ne sont pas loin de la réalité. Si le parallèle choque, la distance doit relativiser les explications et l'Algérie sait pertinemment que cette question des migrants est devenue une carte de pression politique et économique.

Alger fait la part des choses et si sur les plans politique et humanitaire plusieurs actions ont été entreprises, il ne fait aucun doute que la menace ne vient pas de ces migrants mais des réseaux mafieux qui les instrumentalisent. Des organisations criminelles à l'origine du flux migratoire clandestin de Nigériens et des réseaux spécialisés dans la traite d'enfants ont déjà été démantelées par le passé. L'Algérie se trouve actuellement sous surveillance et le moindre mot de travers peut être utilisé contre elle. Le temps de la retenue est venu et celui de l'action aussi. Le projet de loi sur les réfugiés qui sera bientôt devant l'APN devra être le premier jalon pour baliser leur prise en charge et surtout éviter les mauvaises surprises et les procès inutiles devant les commissions onusiennes.

Il est vrai aussi que la cohabitation, comme toute promiscuité, appelle son lot de désagréments et de mésentente. Et c'est ce qui s'est passé entre ressortissants africains et populations locales ces deux voire trois dernières années. Les différents épisodes sanglants de règlements de compte entre les deux communautés ont donné une image négative de l'Algérie, vite utilisée à des fins de nuisance par certaines parties. Alger n'a pas besoin de prêter le flanc et doit gérer une situation dont elle est la première responsable.