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Alibi recyclé

par Moncef Wafi

Les relations conflictuelles entre Alger et Rabat reviennent derechef au devant de la scène médiatique avec une nouvelle offensive marocaine contre notre pays. Cette fois l'alibi, même s'il est recyclé, est la situation humanitaire de migrants syriens que le Maroc accuse l'Algérie d'avoir poussés à entrer sur son territoire.

Si l'ambassadeur d'Algérie à Rabat a été convoqué pour se voir signifier la «profonde préoccupation» du Makhzen suite à la tentative de 54 ressortissants syriens «d'entrer illégalement à partir de l'Algérie sur le territoire marocain au niveau de la zone frontalière de la ville de Figuig», Alger n'a pas encore répondu pour l'instant.

Faut-il pour autant attendre une réponse de la diplomatie algérienne, connaissant la stratégie de provocation des Marocains à chaque revers de leur diplomatie ? Ce n'est ni la première ni la dernière fois que Rabat allume un contre-feu en s'attaquant à son voisin pour détourner son opinion publique de ses revers intérieurs.

A chaque fois que le royaume alaouite se retrouve dos au mur, rattrapé par l'ONU sur la question sahraouie ou pour gérer des problèmes internes, il tire une balle contre les Algériens. Rabat a justement été attaqué sur cette question des migrants en mars dernier avec l'arrestation et le refoulement de 34 migrants africains vers l'Algérie.

Le communiqué inter-associatif signé par le Groupe antiraciste de défense et d'accompagnement des étrangers et migrants (GADEM), une association de droit marocain, ainsi que par une vingtaine d'autres sigles associatifs, dénonçait les pratiques violentes des services de sécurité marocains.

Cette politique de détournement savamment orchestrée par les spin-doctors de Sa Majesté, surtout que le roi vient d'essuyer deux affronts successifs à La Havane et à Washington, est alimentée par une désinformation ciblée et des rumeurs distillées. Alger, consciente de ce jeu, avait clairement indiqué que ce sont les ennemis du pays qui sont derrière ces informations «tendancieuses» et cherchent à déstabiliser sa sécurité.

Cette guerre diplomatico-médiatique pourrait à la longue avoir son prix à payer quand en janvier 2014, excédé par la tournure que l'affaire des Syriens refoulés du Maroc avait prise et par la férocité des attaques de la presse de Sa Majesté, Farouk Ksentini, président de la désormais défunte Commission nationale consultative de promotion et de protection des droits de l'homme (CNCPPDH), préconisait la rupture des relations diplomatiques avec Rabat. «L'Algérie doit prendre une position ferme pour mettre définitivement fin à ces provocations. A mon sens, il faut rompre les relations diplomatiques», avait-il déclaré.

Ira-t-on jusque-là ?