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Une question de volonté politique

par Moncef Wafi

La Roumanie, c'est tellement loin que c'en est proche de nous. Loin dans la géographie mentale pour les Algériens, pour lesquels l'étranger reste confiné à la barrière du langage; exotique par l'image renvoyée par les Roms, nos Subsahariens à nous, mais ô combien d'actualité par la mobilisation citoyenne contre les ordonnances du gouvernement assouplissant le code pénal contre la corruption. Les Roumains ont renoué avec le macadam pour dénoncer les mesures prises par le gouvernement en place pour affaiblir la lutte anti-corruption. De l'Algérie, cette action est du domaine de la science-fiction tant la corruption s'est confondue avec le génome algérien. Les chiffres sont aussi révélateurs de ce fossé qui existe entre les pays classés dans les profondeurs des classements de Transparency International et ceux qui luttent contre la corruption.

En 2015, un Premier ministre, cinq ministres, 16 députés, cinq sénateurs, 97 maires ou maires adjoints, 15 présidents ou vice-présidents de conseils départementaux, 32 directeurs de compagnies publiques ont été poursuivis par la justice en Roumanie. Du domaine de l'impossible chez nous où la volonté politique se limite à des slogans aussi creux qu'un palmier mort planté sur les avenues de l'Algérie et à des organismes mis en place par ceux-là mêmes qui sont suspectés d'organiser la corruption à grande échelle. La justice roumaine n'hésite pas à déclarer la guerre à la corruption étatique faisant de Laura Kodruta Kovesi, la chef du parquet anti-corruption, l'icône de cette mobilisation populaire. Face aux manœuvres gouvernementales d'assouplir la loi, des dizaines de milliers de Roumains ont battu le pavé obligeant le gouvernement à retirer son décret sur la corruption. Ces manifestations ont également donné naissance à une société civile, véritable contre-pouvoir qui se nourrit de la légalité pour faire pression. Si la corruption existe partout, et n'est pas une exclusivité algérienne, ce qui l'est plus, c'est cette tendance à détourner le regard, à faire semblant de la combattre, empêchant les bonnes volontés de s'exprimer. Pire, en attaquant les lanceurs d'alerte qui dénoncent les dépassements, les passe-droits et la corruption, gangrénant l'économie nationale. Un fléau qui fait mal, érigé en mode de gouvernance avec la bénédiction des puissants, véritables parapluies politiques pour leurs protégés. Alors, la Roumanie, c'est par où s'il vous plait !