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Retour à l'âge de pierre

par Moncef Wafi

La deuxième session du bac, débutée hier pour durer jusqu'à jeudi, a réservé des surprises aux Algériens. Et elles sont mauvaises. En effet, et pour un max de sécurité informatique, l'Algérie officielle n'a pas trouvé mieux que de couper totalement l'accès à Internet. Si le verrouillage des réseaux sociaux n'était plus un secret pour personne au même titre que le brouillage de la 3G, les Algériens étaient loin de se douter que l'accès à Internet allait être interdit. Une mesure extrême prise pour éviter le scénario de la fraude démocratisée mais hautement préjudiciable pour le quotidien du pays. Hier avant 11h, les Algériens ont été replongés dans l'âge de pierre, coupés du monde extérieur et surtout pénalisés dans leur travail dépendant de la Toile. Les Algériens ont été pris au dépourvu, la mesure n'ayant pas été rendue publique et le gouvernement n'a même pas pris la peine d'avertir les citoyens sur les désagréments qui les attendaient. Cette mesure, qui risque de se reproduire tout au long de la durée des épreuves, témoigne de la fébrilité des ministères concernés par cet examen et le plus désolant est de constater avec effarement que le pays s'est noyé dans un bac décrédibilisé pour une énième fois. Entre les faux lauréats, les taux de réussite prédéfinis, la triche ordinaire et les fuites à grande échelle, le bac a fini par perdre son aura. La décision de couper la connexion Internet témoigne aussi de cette propension du gouvernement à adopter la solution de facilité. En effet, on se demande si dans d'autres pays dignes du nom, où la justice est indépendante et la liberté d'expression, de pensée et de culte est ancrée, on décide de couper Internet pour empêcher les candidats au bac de tricher. C'est comme si on interdisait la circulation automobile pour arrêter la mort asphalteuse. C'est comme si on fermait les plages pour éviter les noyades.

C'est comme si on construisait un mur de clôture de 10 m pour empêcher la main étrangère de nous chatouiller. L'Algérie nous a habitués à ce genre d'extrémisme où la punition collective prime sur la justice individuelle. Où la loi s'efface devant l'incapacité des responsables à solutionner les problèmes. Benghebrit, Feraoun et Sellal auraient été plus inspirés s'ils avaient réuni toutes les conditions pour éviter en amont un scandale national, alors qu'à cause d'une somme de conjonctures, on se retrouve à communiquer avec de vrais pigeons voyageurs à défaut de l'icône de Tweeter.