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Les logos de la discorde

par Moncef Wafi

Sellal est en colère contre les chaînes de télévision informelles et il le fait savoir. L'intervention du Premier ministre, hier, à l'ouverture de la rencontre internationale sur les droits d'auteur à Alger a tourné particulièrement autour des chaînes de télévision privées, l'audiovisuel à majorité offshore. On retiendra du discours inaugural de Sellal cette volonté délibérée de l'Etat de lâcher la bride à un secteur naissant dans l'espoir qu'il s'autorégule. Une démarche qui résume à elle seule cette logique du pouvoir de laisser faire et de n'intervenir qu'en aval, en pompier.

Grave est cet aveu d'échec dans la bouche d'un Premier ministre censé faire respecter les lois de la République qu'aujourd'hui il estime bafouées. En effet, il est difficile de comprendre ses regrets sur la profusion des chaînes de télévision privées, offshore, «dans une Algérie libre», voleuses d'images pourtant protégées, alors qu'à l'origine c'est son gouvernement qui leur a permis d'exister. Alors comment prendre au sérieux un gouvernement qui ouvre la porte de la bergerie puis crie au loup ? Lorsque Sellal évoque la violation de la vie privée, les insultes et les atteintes à la dignité des citoyens algériens, le régionalisme et la fitna, l'apanage exclusif de certaines chaînes tolérées, il oublie que ces mêmes logos sont instrumentalisés à des desseins politiciens et à des fins personnelles.

Le Premier ministre menace et demande à son ministre de la Communication d'assainir la situation. Comment ? En fermant leurs bureaux et en interdisant à leurs journalistes de travailler sans agrément. La solution paraît si simple si on l'avait au préalable envisagée mais la permissivité de l'Etat régulateur a compliqué les choses. Que faut-il alors espérer de l'intervention de Sellal appelant à l'assainissement d'un secteur qui a complètement échappé aux compétences de Grine, empêtré lui dans le dossier d'El Khabar ? A vrai dire pas grand-chose dans la mesure où toutes les déclarations officielles faites à ce sujet, toutes les menaces proférées contre ces chaînes informelles de se conformer aux lois algériennes sont restées sans suite. Difficile encore une fois de prédire un assainissement général en l'absence d'une réelle volonté de faire le ménage dans tout ce fouillis des chaînes qui font, qu'on le veuille ou non, les affaires du pouvoir.