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La paix sociale en rupture de stock

par Moncef Wafi

Pas si loin que ça, de sombres nuages nous attendent charriant leurs lots de problèmes prêts à exploser à tout moment. La crise n'est plus un mort mais une réalité doublée d'une politique d'austérité dont la première victime expiatoire est le citoyen. L'Etat, lui, continue à soutenir mordicus que tout va bien. Alors qui faut-il croire, les déclarations lénifiantes des ministres et relais du pouvoir ou les chiffres têtus et loquaces ? En dehors de la sphère des experts, le sujet des finances tel qu'il nous est vendu aujourd'hui reste un monde ésotérique pour la majorité des Algériens qui se perd entre dérives et dépenses budgétaires, soldes du Fonds de régulation des recettes (FRR), rythme de croissance ne comprenant en fin de compte que les augmentations des prix de tout ce qui se consomme. Le ministre des Finances affirme que le pays «n'est pas en crise» accusant les oiseaux de mauvais augure -comprendre l'opposition et la presse indépendante- de semer le pessimisme au sein de la population. Les chiffres, eux, augurent d'un lendemain très incertain où, en amont, on fait serrer la ceinture au pauvre citoyen et, en aval, on gaspille son argent dans des dépenses de prestige. Le FRR, le bas de laine de l'Algérie, sera asséché d'ici juin prochain, c'est-à-dire dans un peu moins d'un mois, prédisent les analystes, si le niveau des dépenses se poursuit à ce rythme. En parallèle, des mouvements de protestation s'organisent dans presque tous les secteurs d'activité. A Air Algérie, à la SNTF, parmi les fonctionnaires, les débrayages font irruption sans préavis alors que le niveau de vie des Algériens est plus que jamais instable. Ce prélude à un été chaud sera particulièrement scruté et le manque de liquidités empêchera l'Etat de jouer au pompier en arrosant la crise sociale avec des revalorisations salariales. Le temps d'acheter la paix sociale est bel et bien révolu et le gouvernement vient clairement de le souligner en excluant toute augmentation du SNMG alors que tous les prix ont pris la tangente. Que faire ? Le pouvoir a pris ses précautions, renforçant l'arsenal répressif et réduisant les libertés d'expression. Conscient de la dangerosité de la situation et surtout de l'absence d'alternatives, sauf en cas de départ de ces hommes qui nous gouvernent, le pouvoir multiplie les fausses pistes, renforce les manœuvres de diversion à travers les épisodes d'El Khabar ou de Chakib Khelil. L'important est que les Algériens soient focalisés sur des cibles secondaires. Ce cas de figure a été vécu dans les années 90 mais là, la lutte contre le terrorisme a été le ciment du peuple, mais demain, qu'en sera-t-il ?