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Le bilan est dans le détail

par A. Walid

Les responsables algériens n'aiment pas les pénuries. Cela les révolte, surtout quand la chose est visible? dans les médias. En témoigne la montée au front de certains d'entre eux dernièrement pour apporter des démentis. Cela peut s'apparenter à une attitude normale, dans un pays tout autant normal, qu'un responsable, investi de mission et payé en conséquence, veille à ce qu'il n'y ait pas de dysfonctionnements dans son secteur. Mais est-ce réellement le cas quand on s'évertue à nier les évidences ?

On peut spéculer longuement sur certaines questions, aussi importantes qu'elles soient, comme la révision de la Constitution, les conflits supposés au sommet de l'Etat? Mais qu'en est-il lorsque les situations sont concrètes, matérielles ? A l'image des longues files d'attente observées dernièrement devant des stations-services ou les recettes des impôts. Une règle universelle veut que lorsque l'offre est moins importante que la demande, une tension se crée. C'est un fait palpable, vérifiable. Quand le patron de Naftal invoquait la rumeur pour expliquer le problème de la disponibilité du carburant, l'automobiliste qui avait poireauté de longues heures dans une station d'essence pour quelques litres de fuel, ne pouvait que rester perplexe. De même lorsque la Direction générale des impôts affirmait qu'il n'y a pas de «pénurie de vignettes», mais «plutôt un épuisement rapide de certaines catégories de vignettes au niveau de quelques centres de recettes et de bureaux d'Algérie Poste», le même automobiliste, obligé parfois de faire la chaîne pendant toute une matinée, ne peut que s'arracher les cheveux.

Si le P-DG de Naftal avait démenti l'existence d'une «pénurie de carburant» à Alger et ailleurs parlant d'effet de la «rumeur», ayant conduit à l'épuisement du stock de carburant à Blida, le ministre de l'Energie, Youcef Yousfi, pose, lui, le véritable problème à l'origine des crises récurrentes du carburant, celui des capacités de stockage limitées. Il a assuré que le gouvernement était décidé à régler le problème «à l'horizon 2020». Comment ? Tout simplement en portant ces capacités à 30 jours au lieu de 10 actuellement. Une réponse précise à un dysfonctionnement récurrent. Les files d'attente des automobilistes ne sont donc ni manipulation, ni main étrangère, ni? rumeur. Une explication qui va peut-être rassurer ces milliers d'Algériens, qui perdent des heures dans les chaînes, qu'ils ne sont pas victimes d'un effet d'optique. Ils le seront davantage si, concernant la vignette automobile, le ministère des Finances y allait lui aussi de son explication.

En l'an un du quatrième mandat de Bouteflika, il est peut-être temps de se poser la question du pourquoi les conditions n'ont pas été réunies pour que cet Algérien justement puisse enfin relever la tête comme on le lui demandait. Car au-delà des bilans des grandes réalisations, c'est à travers ces «petits détails» qui empoisonnent la vie à des millions de citoyens que l'on peut apprécier si les promesses faites par nos gouvernants, l'espace d'une campagne électorale, ont été tenues ou non, loin de toute politique politicienne.