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DES ESPACES COMMUNS PERSONNELS

par M. Abdou BENABBOU

Peu d'élus et d'administrants s'en inquiètent mais la majorité des estivants ne peste pas à tort ! Le minimum ressort de divertissement qui restait au citoyen moyen pour se désaltérer en famille n'a plus cours. Et il s'offusque avec raison de l'accaparement des plages par des roitelets qui ne font plus la différence entre bien public et celui privé pour voir revenir au galop l'esprit du bien vacant. Après les trottoirs et les chaussées, après les territoires, les logis et les crédits, ce sont les bords de mer qu'on rançonne.

La propriété de l'Etat serait donc devenue un espace personnel qui appartient aux effrontés aux gros bras qui n'ont comme titre de propriété que le bras d'honneur. Mais avant d'être levé à la face du contribuable, il l'est d'abord à celle de l'Etat lui-même. Quand les villes et les territoires sont cédés aux forts-à-bras, avec un silence complice des autorités, il ne faut plus s'étonner que la rapine soit érigée en reine et il est à craindre que dans un futur proche, il faudra mettre la main à la poche pour accéder à son domicile et peut-être même payer pour voir ses propres enfants.

Le laisser-faire dans la gestion des espaces communs au nom d'une vague et incertaine paix sociale ne cesse d'interpeller et pose de graves questions. La première et la plus importante serait de s'entendre sur la définition de cette vague notion sur la paix sociale et ses tenants pour savoir qui des gouvernants ou des gouvernés doit d'abord en profiter et évaluer à sa juste mesure la teneur de ce profit. La deuxième, non moins importante, serait de se demander pourquoi cette prétendue paix sociale serait si inestimable qu'il importe peu de savoir qui en paie le prix.

Les approches galvaudées sur la culture de la rente ne pourraient être que des explications fallacieuses sinon superficielles sur un état des lieux mortifère par bien des aspects et il est faux de croire que l'aisance financière nationale serait due au seul fruit pétrolier. Nombreux Algériens triment, suent et paient leurs impôts avec une irréprochable civilité. Persister à expliquer l'état d'esprit rentier des Algériens par la providence ou par les attributs divins est dévastateur et serait ne pas rendre grâce au travail d'une vie du vieux retraité qui attend des journées entières devant les guichets de la poste pour toucher son dû.

Si les vermines se sont multipliées ce sont d'abord des hyènes et leurs relais censés être les planificateurs de la sérénité générale qui sont à incriminer.