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UN G20 SANS OBJET

par K. Selim

Qui se souvient des avancées de la démocratie mondiale proclamées au plus fort de la crise mondiale lors des sommets du G20 de Londres en avril 2009 et de Pittsburgh en septembre de la même année ?

 Les espoirs d'un changement fondamental de la gouvernance économique mondiale, solennellement proclamés, se sont progressivement évaporés au fil de la timide reprise globale. En dépit des déclarations volontaristes des dirigeants d'un G8 qui étaient sur la défensive, les mécanismes de l'économie mondiale demeurent inchangés, aucune règle nouvelle n'ayant été imposée aux marchés. Seuls les Européens, menacés par leurs déficits et la spéculation financière, souhaitent taxer les transactions bancaires.

 Personne n'attend de décisions significatives de la réunion de Toronto. Le sommet se tient dans un camp retranché, dont le coût supérieur à un milliard de dollars est à mettre en parallèle avec les cinq milliards que le G8 a promis pour la santé maternelle et l'enfance dans les pays les moins avancés.

 Qu'attendre donc d'une réunion du G20 qui ressemble fort à une opération de relations publiques pour le conseil d'administration du monde ? Les pressions exercées sur la Chine pour revaloriser sa monnaie seront sans doute réitérées, mais les Chinois ont déjà accepté une légère modification du taux de change.

 Ce pourrait être l'occasion de mettre les pays riches face à leurs responsabilités. Si ces pays ont pu débloquer près de 17.000 milliards de dollars pour sauver les banques et le système financier, ils n'ont toujours pas réussi à réunir les 18 milliards qui font défaut pour respecter les engagements en termes d'aide au développement pris lors du G8 de 2005 à Gleneagles. Lors du G20 de Pittsburgh, la décision avait été formellement prise de mettre fin aux subventions dédiées à la production de combustibles fossiles. Au Canada, elles s'élèvent à 2 milliards de dollars par an, notamment pour le développement de l'extraction, hautement polluante, de pétrole des sables bitumineux. Concrétiser ces engagements à Toronto aurait du sens. C'est peu probable, alors qu'il n'est toujours pas certain que les questions climatiques et environnementales fassent partie de l'agenda des discussions.

 Car, dans la répartition des tâches qui émerge clairement, le G8 a vocation de débattre des questions de sécurité et de politique mondiale, alors que le G20 est confiné à des thématiques économiques autour desquelles les consensus sont impossibles. Le doute et le scepticisme quant à l'efficacité de telles réunions dominent.

 On pourra toujours se consoler en espérant que ce cénacle sera un lieu où les pays émergents et en développement expriment leurs préoccupations. Mais, ainsi que l'a démontré le rejet occidental de l'accord turco-brésilien passé avec l'Iran sur la question de l'enrichissement, les puissances dominantes n'entendent en rien modifier des règles à leur avantage exclusif.

 Le G20 n'est donc qu'une instance purement consultative, dont la signification est plus symbolique que réelle. Il faudra probablement attendre une autre crise majeure provoquée par les Etats-Unis et leurs alliés occidentaux pour redonner du souffle à un cadre aujourd'hui sans objet.