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Tébessa: La maintenance du réseau d'AEP en question

par Ali Chabana

«C'est triste de voir cette eau potable couler comme ça sur la chaussée, ça fait mal au cœur, quand on sait que d'autres quartiers en manquent énormément». Une réflexion pleine de bon sens d'une personne âgée, rencontrée sur l'artère allant de la cité des Bassatines au centre-ville de Tébessa. La vue désolante des fuites d'eau donne à réfléchir sur les opérations de maintenance du réseau de l'AEP, un liquide précieux par ce temps de sécheresse qui devient rare, mais injustement gaspillé par manque de civisme de certains usagers, quand on oublie facilement combien coûte ce service public à l'Etat. En cours de route, mon compagnon du jour me parla des conditions de vie de plus en plus difficiles. Il me disait qu'il est retraité, sa pension de 24 mille dinars est insignifiante par rapport à la cherté de tout : «Ecoutez mon fils, comment voulez-vous répartir cet argent entre les dépenses, pour entretenir une famille de six personnes» ? et d'ajouter : «Vous voyez, je vais maintenant payer la facture de l'électricité, je n'ai pas de gaz de ville, une virée au marché des légumes me coûtera 2.000 à 3.000 dinars, pour acheter de quoi manger pour une semaine. Non pas de fruits ou de viande, le poulet qui vaut 450 dinars le kilogramme, c'est pas pour moi, une petite bourse qui n'arrive même pas à couvrir la première dizaine de jours du mois». Le bonhomme continue son chemin, l'air hagard, de temps à autre, il relève la tête pour me dire quelque chose qui le rend perplexe, sur l'indifférence des gens, leur insouciance devant la complexité de l'existence. «Pourquoi tant de négligence de la part de certains, dans les moments délicats où il est exigé plus de solidarité ? Dans le temps, il était plus évident pour s'entraider, je sais que la vie est difficile pour beaucoup comme moi, peut-être moins lotis». Là encore, il rabaisse sa tête un instant, puis il me fait la remarque de cette file d'attente devant une superette, «encore une histoire de pénurie de lait en sachet», tout en m'interpellant : «Avez-vous entendu parler de la hausse des produits alimentaires, les légumes secs s'envolent, les pâtes alimentaires autrefois appelées la nourriture des pauvres, valent aujourd'hui leur pesant d'or, les œufs n'en parlons pas». Pendant le reste du parcours, avant de nous séparer, l'homme au visage bouffi par la lassitude ne cessa de me faire la morale sage de quelqu'un qui s'accroche à son espoir de voir les choses prendre une autre tournure, une meilleure trajectoire, que l'horizon se dégage pour tous.