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Une dispute, un mort et 15 ans de prison

par Rabah Benaouda

Entamant les toutes dernières séances de sa première session pour cette année 2012, le tribunal criminel près la cour de justice de Médéa vient de juger une affaire «d'homicide volontaire avec préméditation et guet-apens» dans laquelle pas moins de huit accusés étaient concernés, douze témoins appelés à la barre et treize avocats engagés, dont deux pour la partie civile et onze pour la défense.

Une affaire dont les faits remontent, selon l'arrêt de renvoi dressé par la chambre d'accusation, à cette fatidique soirée estivale du vendredi 22 juillet 2011 lorsque, sur le tronçon de la RN1 entre Médéa et Ouzera, le chauffeur d'un véhicule de type Atos voulut dépasser un véhicule de marque Hundaï ? Accent. Ce qui n'a pas été apprécié par le chauffeur de ce dernier véhicule qui fera preuve de manœuvres dangereuses sur la route pour empêcher ce dépassement. Les deux véhicules s'arrêtent et s'ensuivent des palabres. Arrive alors le dénommé Mehdi Y., âgé d'un peu plus de 20 ans au moment des faits, sur sa moto. Croyant que ses amis, les trois occupants de l'Atos, étaient malmenés par ceux (cinq) du véhicule Accent, Mehdi Y., qui allait perdre «bêtement et inutilement» la vie quelques instants plus tard, s'en mêla et porta un coup de pied violent au niveau de la poitrine d'un autre jeune, Mohamed F. âgé aujourd'hui de 22 ans, qui le fera tomber à terre. Avec la précision que, selon toujours l'arrêt de renvoi, Mehdi Y. tenait un couteau à la main. Pris d'un sentiment de vengeance très vif, Mohamed F. monta dans l'Atos avec ses amis et démarrèrent vers Ouzera. Ils s'arrêteront à hauteur du parc pour engins automobiles, d'où Mohamed F. s'emparera d'un manche de pelle. Et ce fut un véritable guet-apens qui allait être préparé à la future victime, selon toujours l'arrêt de renvoi, en haut de cette côte qui vient tout juste après ce barrage de la gendarmerie nationale, en allant vers Benchicao. Arrivé là sur sa moto, Mehdi Y. recevra un violent coup, à l'aide d'un objet contondant, sur la poitrine au niveau précisément du cœur. Ce dernier décédera quelques instants plus tard, sur la route, au cours de son évacuation vers l'hôpital de Médéa et ce, suite à une très forte hémorragie interne, selon le certificat médical de l'autopsie. Une affaire qui fera huit accusés.

Durant son interrogatoire par M. Mohamed Martil, le président du tribunal criminel, le principal accusé dans cette affaire, Mohamed F., niera en bloc tous les faits qui lui étaient reprochés. «Je n'étais pas présent au moment des faits. Je n'ai rien à voir avec cette affaire», maintiendra-t-il. Par contre, son coaccusé S. M., le chargera en confirmant, devant le tribunal que «c'est Mohamed F. qui avait porté le coup du bâton à la victime», dira-t-il. Dans leurs plaidoiries, les avocats de la partie civile diront tout simplement: «L'acte a été prémédité et le lieu (une côte) du crime bien choisi. Les faits de l'homicide volontaire sont établis. Nous demandons que justice soit rendue à la famille de la victime». Pour le ministère public: «Il n'y a aucun doute, les trois accusés principaux ont voulu déguiser leur crime en simple accident de la route. Aussi, nous réclamons 20 ans de prison ferme à l'encontre de M. F., S. M. et S.E.B., 10 ans de prison ferme pour F. K. et S.H.T., 2 ans de prison ferme à l'encontre de Ho. B. et S. K. Quant à l'accusé Ha. B., j'en laisse le soin au tribunal criminel». Dans sa longue plaidoirie, Me Djamel Boulefred, l'avocat du principal accusé Mohamed F., démontera toute l'accusation, plaidera non coupable et demandera l'acquittement pur et simple au profit de son mandant. Et il en sera de même pour les dix autres avocats de la défense qui demanderont pour leurs mandants respectifs l'acquittement pur et simple «pour la simple raison qu'aucune preuve matérielle n'a été apportée par l'accusation devant cet honorable tribunal». Et après de longues délibérations, le tribunal criminel près la cour de justice de Médéa condamnera l'accusé principal, Mohamed F., à un emprisonnement ferme de 15 ans, Ho. B. et S. K. à 6 mois de prison avec sursis alors que tous les autres accusés ont été acquittés.