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Signe
des nouveaux temps de réactivation de l'esprit colonial ou simple coïncidence chez
les libraires ? Des ouvrages sur la guerre d'Algérie -principalement des
témoignages de soldats engagés sans états d'âme- sont présentés à la FNAC et
dans d'autres grandes librairies à côté de livres traitant des conflits actuels
en Afghanistan, en Libye et au Moyen-Orient en général. Cette volonté du
secteur de l'édition, mais aussi de l'industrie du film et des médias,
d'assumer ce qui a été commis comme dévastation coloniale des pays et des êtres
correspond-elle à un changement de cap, un nouvel effort de propagande visant
l'opinion publique pour les guerres actuelles et à venir?
Deux d'entre eux ont retenu mon attention, et montrent une militarisation des esprits : il s'agit de Commandos de chasse, Les embuscades en Algérie, ou Les têtes chercheuses du Général Challe1, de Pierre Cerutti, et Pour la gloire du fanion. 1951 ? 1991, un légionnaire allemand au service de la France2, du Major Horst Roos. Des Commandos de chasse aux ex-soldats nazis de la Légion étrangère : Alors que le premier ouvrage met en avant cette réorganisation mortelle de l'armée française pour lutter contre les kataieb de l'ALN, avec le lancement des commandos spécialisés (qui ont fait régner la terreur), le deuxième indique dès le début, et sans gêne, la germanisation et la nazification de la Légion étrangère de Sidi Bel-Abbès après 1945. En guise de préface titrée «Képis blancs», on y lit en effet sous la plume de P. Dufour :« Dès la fin de la Deuxième Guerre mondiale, l'afflux des candidats d'origine germanique à la Légion étrangère modifia sensiblement l'orientation socioculturelle de cette institution. De nombreuses importations linguistiques apparurent, le comportement se fit plus rigide et la tradition légionnaire s'enrichit de nombreux chants d'origine germanique dont les chants des 1er et 2eme REP et le Panzerlied qui a été intégré au carnet de chant de la Légion étrangère avec d'autres paroles sous le titre «les képis blancs» par les volontaires français de la LVF et de la division Charlemagne sur le front de l'Est engagés plus tard dans la Légion.» Celui-ci rappelle aussi, page 13, la dureté des combats et des opérations en Algérie : «Roost et ses camarades font leur métier, consciencieusement, efficacement, selon les critères de la Légion étrangère, «mais le fellagha n'est pas le Viet !» a coutume de dire le sergent Roost nommé au mérite. La transition entre l'Indochine et l'Algérie est une période difficile pour la Légion étrangère.» Le major Roost se remémore aussi, dès la fin de la 2ème Guerre mondiale, avoir vu des colonnes motorisées alliées traversant son village et parlant allemand, et avec lesquelles il s'entendait bien (comme les autres de son âge adolescent). S'agissait-il uniquement de combattants français de l'Alsace-Lorraine ? Ou véritablement de soldats vaincus de la Wehrmacht et très vite incorporés dans les rangs alliés -et dont la discrétion évitait d'en donner la nationalité ? Photographie : «Monument aux morts de la Légion étrangère en Algérie»3. Lors de la dernière commémoration du 20 août 1955, les anciens vétérans Moudjahidine se sont peut-être rappelés la participation de ces anciens soldats de la Wehrmacht allemande au sein de la Légion étrangère -qui les pourchassaient dans les montagnes et les rivières. Au prix d'une virginité refaite -compensation officielle du mercenariat pour la France-, ces anciens militaires nazis n'ont pas refusé l'offre d'une armée de plus en plus impliquée dans ce qu'on appelait pudiquement «les évènements d'Algérie». Et l'on peut imaginer sans peine les première surprises du commandement de l'Armée de Libération Nationale, ou celui des résistants de l'Indochine : «À la fin de la 2ème Guerre mondiale, de nombreux prisonniers de guerre allemands se sont engagés dans la Légion étrangère et ont été envoyés directement en Indochine pour lutter contre le VietMinh. On estime leur nombre à 20.000 ou 30.000 soldats, sur un contingent de 70.000 hommes. Parmi eux, entre 8 et 10% étaient des Waffen SS qui cherchaient à se faire oublier. Ainsi, 2.600 Allemands sont morts «pour la France» lors de cette guerre d'indépendance.»4 Triste ironie du sort : certains de ces combattants algériens ont en effet constaté la présence des ces chiens de guerre allemands qu'ils ont déjà combattus en Europe, avec leurs officiers français, dans les années 1943-19455. L'ennemi de mon ennemi n'est pas toujours, et obligatoirement, mon ami? Un ancien de la guerre d'Algérie, Henri Pouillot, confirme : «Dès les années 1950, la Légion recrutera massivement en particulier pour faire face aux guerres coloniales qu'allait engager la France en Indochine puis en Algérie. Dans les années 1950/55 les effectifs se composent de près de 50% d'Allemands d'origine dont de nombreux Waffen SS qui trouvent ainsi un refuge, mais qui avaient acquis une «formation». Il y avait aussi environ 20% d'origine autrichienne, italienne, suisse.. et le reste de nationalités diverses. En Algérie, la Légion Etrangère a été essentiellement utilisée pour effectuer le «sale boulot». Elle avait acquis une réputation de sanguinaire, de «têtes brûlées». Pendant la période de la Bataille d'Alger, principalement avec le 1er REP, elle se «distingua» tout particulièrement, laissant pour longtemps une image terrible dans la population algéroise. »6 Loin d'être marginal, cet aspect du recyclage de criminels de guerre nazis par la France et, en général, les Alliés et le maintien de leurs entreprises coloniales, est un tabou de l'histoire contemporaine des vainqueurs. Les historiens ont du mal à traiter cette partie obscure de la fin du conflit, tant les dangers pour leurs carrières et les subventions sont grands. Plus incroyable encore, et sans que cela n'émeuve les cercles bien-pensants ici -pourtant prompts à réagir durement-, Roost et Dufour nous apprennent aussi qu'un chant militaire nazi est toujours repris officiellement dans un régiment de blindés et la Légion étrangère ! «Le Panzerlied est l'un des plus célèbres chants militaires allemands de la Wehrmacht. Il a été composé en juin 1933 par l'Oberleutnant Kurt Wiehle (?). Wiehle a repris l'air d'une chanson de marins, en y mettant des paroles plus appropriées à la Panzerwaffe. Actuellement ce chant est toujours en usage dans la Bundeswehr ainsi que dans les forces armées autrichiennes. En France, le 501e régiment de chars de combat l'a adopté en tant que Marche des Chars.» Des chants militaires nazis sont donc chantés de nos jours par des unités en France et en Europe... Ajoutons à cette découverte pour le moins embarrassante, le phénomène de plus en plus préoccupant de l'adhésion d'une partie non négligeable de soldats, sous-officiers et officiers de l'Armée allemande (mais aussi d'autres armées culturellement proches, notamment en Autriche et en Suisse7) aux idées ultra-nationalistes et faisant la promotion du nazisme. Cette dérive est évidemment minorée par les commandements et les gouvernements concernés. Selon l'hypocrisie et le cynisme habituels, à chaque fois qu'une unité de combat plus ou moins spéciale arbore sur le terrain des drapeaux ou insignes nazis8, les autorités militaires comme politiques concernées communiquent sur «une plaisanterie de mauvais goût (?) qui ne relève pas du néonazisme.»9 En France, la progression de l'extrême droite dure et du «suprématisme blanc» au sein de certaines unités militaires commence aussi à filtrer. Évoqué par le journaliste et polémiste Eric Zemmour, le projet de nettoyage des «banlieues musulmanes» qui aurait été préparé en secret par une partie de l'élite de l'Armée de Terre (au moins) semble en effet confirmé par d'autres témoins plus directs. L'un d'entre eux, Stan Maillaud, ancien sous-officier des forces spéciales10, a tiré la sonnette d'alarme à ce propos, via des réseaux sociaux et des plateformes vidéos, et appelé ces camarades à déjouer cette tentation mortelle. Il suffit -comme le fait l'un de mes amis, Alain-, de fréquenter les cercles d'officiers des troupes d'élite, REP ou RIMA (l'Infanterie de marine, qui a beaucoup œuvré pour la conquête et le maintien de la colonisation), toujours influents et rassemblant les anciens à ceux de l'active, pour s'apercevoir que les propos stigmatisants ou racistes du Front national sont bien en-deçà de ce qui s'y dit ici et là. Guerre froide oblige, dans l'opération de recyclage post-mai 194511, de part et d'autre des deux blocs, soviétique et occidental, les savants et les scientifiques nazis rescapés ont, eux aussi, été largement réutilisés dans les secteurs sensibles (aérospatiale, défense et armement, chimie, nucléaire, etc.). L'essor de la France dans ces domaines est loin d'être étranger à ce genre de recrutement, sous la houlette du Général de Gaulle qui cherchait -ce fut bien le dernier- les moyens de son indépendance politique, économique et militaire face aux Anglo-Saxons. Plus occulté encore, nombre de politiciens et de décideurs, parfois de premier plan, ont été issus de l'appareil nazi ou des réseaux locaux de collaboration, en Allemagne, en Autriche, en France et dans d'autres pays libérés en 1945 -même en URSS. François Mitterrand, par exemple, s'est distingué dans le Gouvernement pro-nazi de Vichy pour ensuite s'occuper du ministère de l'Intérieur à Paris, et signer sans états d'âme l'ordre d'exécution de plus de 300 condamnés à mort algériens. La mise en spectacle du procès de Klaus Barbie ou de Maurice Papon, à l'initiative de la famille Klarsfeld et d'autres associations influentes, avait-elle pour but l'effacement de cette collaboration honteuse d'une partie de l'élite française (dont Henri Amouroux12 et quelques rares historiens nous ont parlé) ? En tout cas, c'est bien cette même élite qui mobilisa par la suite la classe ouvrière (et ce qui resta de la paysannerie) dans les guerres coloniales, la répression des populations métropolitaines, tout en impulsant le réarmement face à l'URSS -pourtant vrai libérateur de l'Europe13 Photographie : «Dossier de photographies soumises aux témoins du procès Barbie, portrait de Klaus Barbie»14 Cet usage des «classes laborieuses», doublée d'un conditionnement des catégories dites supérieures -les plus complaisantes et les plus perméables à la propagande droit-de-l'hommiste et guerrière-, se poursuit aujourd'hui sous d'autres formes, plus massives, plus pernicieuses aussi, face à une Russie diabolisée et régulièrement provoquée15. Les populations européennes prises en tenaille entre néonazis et islamistes radicaux En réaction à l'arrivée massive des «migrants fuyant la guerre et la répression en Syrie» (selon le discours officiel), des groupes de contestataires se sont progressivement constitués dans toute l'Europe. Ces groupes sont combattus par leurs États respectifs16. Généralement infiltrés par des militants néonazis, certains de ces groupes auraient été récupérés au sein de cette mouvance. Depuis quelques années déjà, avant même 2014, assez régulièrement, des foyers d'hébergement d'«immigrés» sont attaqués et incendiés par des groupuscules de skinheads. Des morts ont été enregistrés lors de ces raids, souvent nocturnes, ou d'agression de personnes. Ceci démontre la montée en puissance du sentiment de rejet de l'immigration imposée, du racisme et de la violence plus ou moins organisée et récupérée par des militants radicaux à l'idéologie néofasciste. Deux tendances fortes, communautaires et nationales, ont pris position par rapport à cette question explosive des migrants : d'une part les gauchistes libertaires pro-migrants, d'autre part les groupes dits identitaires, parmi lesquels les néonazis ou les fascistes progressent. Ces deux pôles extrêmes ont commencé depuis quelques temps à s'affronter sur la voie publique, notamment en Allemagne et en France, et à s'en prendre aux forces de l'ordre et aux biens. Par ailleurs, nous avons vu, par exemple, la facilité et l'impunité avec lesquelles les Antifas se sont violemment attaqués à des manifestations et des évènements initiés et encadrés par le Front national, devant des forces de l'ordre impassibles (obéissant aux consignes socialistes du ministère de l'Intérieur tenu par Manuel Valls puis Le Drian), dans différentes villes de France et notamment en Bretagne. Photographie : Magdeburg 18.01.2014 Neo-Nazis und ihr «Trauermarsch»17 L'usage opportun et planifié de violences urbaines -ou l'injection graduelle du «chaos constructif»- sert-il à la gestion du mécontentement des populations et au durcissement du contrôle de la société ? Comme je l'écrivais à propos du rôle occulte des grandes ONG impliquées dans la gestion de ces nouveaux flux, l'aide humanitaire en zones de guerre et le soutien aux groupes terroristes (en Syrak) : «Comme aux USA, mais à une toute autre échelle et avec une coloration bien spécifique, ces violences urbaines sont encadrées par des organisations qui mettent en action des groupes rompus au combat de rue et à la provocation. «No Border», «Antifas» et autres groupuscules radicaux, ces nébuleuses, assez facilement manipulables, sont globalement les mêmes que celles qui s'opposent violemment aux forces de l'ordre à Calais, en défense des «migrants». Autant en France donc qu'aux USA, des organisations militantes et des ONG prônant notamment l'absence de frontière -soit la suppression à terme des États et de leurs services publics- et l'installation massive de millions de réfugiés -comme traitement de choc destiné aux Européens, n'hésitent pas à agir avec une violence organisée. Elles s'activent dans un but ultime, celui des élites globalistes supranationales, ultra-puissantes et absolument intouchables, représentées par les Georges Soros, Bill Gates et bien d'autres encore.» Si ces mouvances d'extrême gauche «antifas» et «no borders» venaient à se retourner contre le pouvoir oligarchique, à Paris ou Berlin, voire à devenir simplement contre-productives et non nécessaires, la frange identitaire radicale pourrait sans doute être instrumentalisée à son tour contre ces premiers, voire même contre des organisations syndicales ou d'opposition à cette politique d'austérité et contrôle. Photographie : «Antifa 8973ag»18 Diabolisation du «populisme d'extrême droite» mais préparation d'un nouveau (et déguisé) fascisme européen ? À un niveau d'ébullition à la fois mondiale et nationale, la diabolisation du Front national, lors de ces dernières élections présidentielles, et la mise hors-jeu du candidat donné gagnant F. Fillon (par un véritable cabinet secret19) a servi à propulser E. Macron au rang de chef d'État. Cette diabolisation a permis, pour une bonne partie de l'électorat, de faire le lien entre ce parti et le fascisme en agitant le vieux (et si commode) péril des années 1930. Cette stratégie de manipulation s'est développée partout en Europe, comme l'analyse Brandon Smith dans «L'opération Temperer -U.K: Probable mise en place de la loi martiale cette année» : « (?) la grande peur des Européens à prédominance libérale est un retour à la ferveur nationaliste qu'ils croient à l'origine de la montée du nazisme et du Troisième Reich (j'ai écrit de nombreux articles décrivant l'implication des élites corporatives et bancaires dans le financement et la fourniture de technologies essentielles aux nazis avant et pendant la Seconde Guerre mondiale). C'est cette «culpabilité» d'association avec l'héritage nazi qui a laissé l'Europe vulnérable à la manipulation de l'autre extrémité du spectre politique -le bout socialiste / marxiste.»20 Or, contrairement aux apparences, il semble que cette désignation (facile et unanime) de l'extrême droite comme le seul et unique «ennemi de la République »21 cache un véritable «proto-fascisme» bien réel qui risque d'entraîner une explosion sociale sans précédent : «Bataille terminale au lieu du noyau dur -le rapport salarial, via le code du travail-, intégration ouverte de l'état et du capital, presse «en plateau», extase de la classe nuisible et radicalisation antagoniste des électeurs, colère grondante des classes populaires promises à l'équarrissage, fin des possibilités théâtrales de l'alternance, disparition définitive de toute possibilité de régulation interne, de toute force de rappel institutionnalisée, de tout mécanisme de correction de trajectoire : à l'évidence il est en train de se former une situation. À quelque degré, ce gouvernement-du-barrage-contre-le-pire doit en avoir conscience puisqu'il approfondit le mouvement, déjà bien engagé, de proto-fascisation du régime : avec les ordonnances du code du travail, la normalisation de l'état d'urgence en droit ordinaire a été logiquement sa première préoccupation. Ultime moyen de contrôle de la situation, lui semble-t-il, mais qui contribue plutôt à l'enrichissement de la situation. Et confirme que la question de la police va se porter en tête d'agenda, comme il est d'usage dans tous les régimes où l'état d'illégitimité n'est plus remédiable et où ne reste que la force armée, la seule chose opposable à la seule opposition consistante : la rue. Car il est bien clair qu'il n'y a plus que la rue. Si «crise» désigne le moment résolutoire où les trajectoires bifurquent, nous y sommes. Quand tout est verrouillé et que la pression n'en finit pas de monter, il doit se passer quelque chose. Ce dont les forces instituées sont incapables, seul l'événement peut l'accomplir. »22 Comme le dit encore John Pilger, alors que les Globalistes-mondialistes font la guerre aux «Populistes» sous prétexte de la «peste brune» ou fasciste -dont le souvenir est sans cesse réactivé comme un épouvantail (monstrueux) destiné uniquement aux masses-, nul ne peut mieux représenter le nouveau fascisme transatlantique que les USA, avec la militarisation de sa police, l'assassinat de milliers de Noirs pauvres chaque année par celle-ci, et les crimes perpétrés dans le monde (tels que les programmes d'exécutions extra-judiciaires par des équipes spéciales et des drones) : «Le fascisme est considéré comme de l'histoire ancienne, comme dans ces vieux films tremblotants de chemises noires marchant au pas, leur criminalité aussi terrifiante qu'évidente. Et pourtant dans nos sociétés libérales, alors même que des élites va-t-en guerre nous poussent au devoir de mémoire, le danger grandissant d'une forme moderne du fascisme est ignoré. Car c'est leur fascisme. »23 Le journaliste précise que cette idéologie fasciste, suprématiste et expansionniste, est basée essentiellement sur le mensonge, la falsification et l'usurpation tant des textes fondateurs de la Nation, des outils politiques, judiciaires et économiques mais aussi culturels et historiques : «Depuis 1945, plus d'un tiers des membres des Nations unies -69 pays- ont souffert, entre les mains du fascisme moderne américain, en partie ou totalement, de l'un de ces sévices: ils ont été envahis, leurs gouvernements renversés, leurs mouvements populaires réprimés, leurs élections manipulées, leur population bombardée, leurs économies malmenées et soumises à un embargo connu sous le nom de sanctions. L'historien britannique Mark Curtis compte le nombre de victimes en millions. A chaque fois un mensonge était utilisé. » Aspect fondamental de cette évolution sécuritaire, J. Pilger nous explique comment, à partir de l'expérience acquise lors des conquêtes et des guerres néo-coloniales actuelles, en continuité directe avec la colonisation moderne (depuis au moins le XIXème siècle), un régime policier est en train de remplacer les démocraties occidentales24: «La tragédie afghane concurrence les crimes épiques en Indochine. Dans son livre tant vanté, Le grand échiquier: La primauté américaine et ses impératifs stratégiques, Zbigniew Brzezinski, le père de la politique étrangère américaine de l'Afghanistan à nos jours, écrit que si les États-Unis devait contrôler l'Eurasie et dominer le monde, ils ne pourraient supporter une démocratie populaire, parce que «la poursuite du pouvoir n'est pas quelque chose qui entraîne la passion du peuple?La démocratie n'est pas l'amie de la mobilisation impériale». Il a raison. Comme WikiLeaks et Edward Snowden l'ont révélé, un État policier est en train d'usurper la démocratie. En 1976, Brzezinski, qui était alors conseiller à la Sécurité nationale du président Carter, fit ses preuves en portant un coup mortel à la première et seule période démocratique afghane. Qui connaît cette période de l'histoire?»25 17 ans après l'invasion illégitime et infondée de l'Afghanistan et l'installation d'une forte présence de l'OTAN aux portes de la Russie et de l'Iran, il est utile de rappeler le vif intérêt des leaders du IIIème Reich et des autres pays de l'Axe (Italie et Japon), mais aussi des ses ennemis (tardifs) -USA et Angleterre- pour les expériences coloniales, extérieures comme intérieures, en tant que système de domination et d'exploitation -compétition pour le partage du monde. L'origine du fascisme trouve en effet une part de sa source et de sa continuation dans l'idéologie coloniale (et néo-coloniale), qui œuvre à la mise en place permanente de la spoliation des richesses et de l'asservissement total de l'autre. Faut-il rappeler le rôle des USA et de la Couronne britannique, avec leurs oligarchies respectives, dans la mise en place et le renforcement du régime nazi en Allemagne. Comme l'indique N. Bonnal : «Selon (Guido Giacomo) Preparata, une analyse détaillée de l'émergence du nazisme pourrait révéler que l'arrivée des nazis au pouvoir n'a jamais été le fruit du hasard. La thèse du livre suggère que pendant quinze ans (1919-1933), les élites anglo-saxonnes ont corrompu la politique allemande avec l'intention de créer un mouvement réactionnaire, qu'ils pourraient ensuite mettre en place comme pion pour leurs intrigues géopolitiques.»26 Dès le début du XXème siècle au moins, l'Angleterre et les USA -son bras armé- ont en effet favorisé la montée du fascisme en Europe (Allemagne) et du bolchevisme en Russie, afin qu'ils finissent par se détruire mutuellement. L'implication des grandes oligarchies financières et industrielles liées au parti nazi, la préservation des intérêts des élites allemandes du même type27 pendant et après la 2ème Guerre mondiale ou, plus choquant encore, l'absence de destruction des camps de la mort (pourtant repérés dès 1942-1943 par le Renseignement aérien US), sont des exemples de cette alliance en apparence contre nature28. L'histoire officielle, telle que transmise dans les manuels et jalousement protégée en France, refuse tout débat contradictoire, pourtant en cours ailleurs -notamment aux USA et au Royaume-Uni, en dépit des éclairages tout à fait nouveaux qu'offrent l'émergence d'historiens indépendants et l'accès à des archives sensibles jusque-là interdites. Fascisme historique, nouveau fascisme Il est à ce sujet toujours amusant de voir, par exemple, de hauts cadres éviter soigneusement de poursuivre une discussion sur les réalités historiques de la victoire sur Hitler, lors d'un déjeuner d'affaires, ou cette jeune professeur d'anglais -c'est important de signaler sa discipline- franco-sénégalaise, défendre mordicus la «libération de l'Europe par les Américains», et refuser d'entendre un autre point de vue, tel celui d'Annie Riz-Lacroix, professeur émérite de l'Université de Paris VII - Jussieu (et de bien d'autres encore). J'ai assez souvent croisé sur mon chemin des personnes de ce genre, dans plusieurs milieux professionnels, jouant les nouveaux chiens de garde, diffusant à l'envi la parole orthodoxe en dépit (et peut-être à cause) de leurs origines sociales, ethniques ou nationales. Que l'exceptionnalisme US «(...) ne soit pas reconnu comme une idéologie prédatrice est le résultat d'un lavage de cerveau, lui-même non reconnu. Insidieux, caché, finement présenté comme un éclairage universel, son totalitarisme inonde la culture occidentale. J'ai moi-même grandi dans un environnement cinématographique à la gloire de l'Amérique, qui était presque toujours une déformation de la réalité. Je n'avais aucune connaissance du fait que l'Armée rouge avait détruit quasiment toute la machine de guerre nazie, au prix de la vie de 13 millions de ses soldats. Par comparaison, les pertes américaines, incluant celles du Pacifique, furent de 400.000 hommes. Hollywood avait inversé les faits.» Par une profonde hypnose mathématique, les pertes US estimées entre 300 et 400.000 GI's tués ont supplanté mystérieusement et irrévocablement celles, évaluées raisonnablement, entre 30 et 40 millions de soldats et civils russes29? «La différence, de nos jours, tient à ce que le public des salles obscures est invité à s'accrocher au fauteuil sur la tragédie de psychopathes américains devant tuer des gens partout dans le monde -comme le fait le président des Etats-Unis lui-même. Symbole de la violence hollywoodienne, l'acteur et réalisateur Clint Eastwood, fut nominé pour un Oscar cette année pour son film American Sniper, film qui raconte l'histoire d'un assassin légal fou furieux. Selon le New York Times, «patriotique et pour toute la famille, ce film a battu tous les records d'audience dans ses premiers jours». C'est dans un tel contexte de propagande à tous les étages et d'apologie du meurtre et de la vengeance, fondements de la violence des USA -il faut écouter l'ancien GI's et réalisateur Oliver Stone à ce sujet-, que l'esprit de la guerre et la fabrication de l'ennemi sont entretenus par les élites oligarchiques. «Aucun dirigeant occidental ne s'est insurgé contre cette renaissance du fascisme en plein cœur de l'Europe, à l'exception de Vladimir Poutine dont le peuple a perdu 22 millions de personnes dans l'invasion nazie qui arriva à travers les frontières de l'Ukraine. A la dernière Conférence sur la sécurité de Munich, l'assistante d'Obama pour les affaires européennes et eurasiennes, Victoria Nuland, a critiqué les dirigeants européens qui s'opposent à ce que les États-Unis arment le régime de Kiev. Elle a fait référence au ministre allemand de la Défense en le traitant de «ministre du défaitisme». C'est Nuland qui avait organisé le coup d'État à Kiev. Elle est la femme de Robert D. Kagan, une figure du mouvement néo-conservateur et cofondateur de l'association d'extrême droite Project for a New American Century (Projet pour un nouveau siècle américain). Elle a aussi été conseillère en politique étrangère de Dick Cheney. » Culte absolu de l'exceptionnalité (diffusée dans toutes les couches sociales) et conviction de faire partie de la nation la plus grande -qui œuvre pour le bien de l'humanité : cette pathologie a besoin d'un ennemi, qui va au-delà de l'idée de justifier la hausse vertigineuse du budget du Pentagone. Elle est complétée par un maintien de la population US dans un manichéisme du Bien et du Mal et une vision messianique de leur jeune histoire. Une telle vision démente consolide le suprématisme américain et ce culte de la supériorité si particulier. Ceci a largement été encouragé par les élites, depuis au moins la 1ère Guerre mondiale, et surtout la fin de la seconde, et constitue aujourd'hui une permanence forte : «Ce qui rapproche aussi l'ancienne et la moderne version du fascisme est le culte de la supériorité [le suprématisme, Ndt]. «Je crois en l'exceptionnalisme américain de toutes les fibres de mon être», a déclaré Obama, faisant écho aux déclarations ultranationalistes des années 1930. Comme l'historien Alfred W. McCoy l'a souligné, c'est un homme dévoué à Hitler, Carl Schmitt, qui dit un jour : «Le souverain est celui qui décide de l'exception». Cela résume tout à fait l'américanisme, l'idéologie qui domine le monde actuel. » A suivre... Notes : 1- Avec Jean-Christophe Damaisis d'Arès, 2018. 2- Avec Pierre Dufour, Edition Nimrod, 2018. 3- Centre de documentation de la Légion étrangère (Carte postale). 4- https://fr.spontex.org/le_saviez_vous/3328/indochine-waffen-ss-legionnaires-legion-etrangere 5- http://www.liberation.fr/planete/2014/03/05/indochine-la-legion-des-inconnus-de-la-wehrmacht_984735 ou http://laguerreenindochine.forumactif.org/t301-la-legion-et-les-allemands et https://www.francetvinfo.fr/histoire-des-soldats-allemands-a-la-legion-etrangere_589633.html 6- Henri Pouillot, http://www.henri-pouillot.fr/spip.php?article36 7- Un réseau associatif s'est constitué en Suisse, apportant aide matérielle et financière aux groupes de combat néonazis ukrainiens. Cf. « Les néo-nazis suisses envoient de l'aide au bataillon néo-nazi Azov en Ukraine », publié le 11 février 2015 http://lesakerfrancophone. net/les-neo-nazis-suisses-envoient-de-laide-au-bataillon-neo-nazi-azov-en-ukraine/ 8- Complétés par des têtes de mort et surtout des trophées humains?têtes décapitées, oreilles découpées, etc. 9- L'une des dernières affaires médiatisées en juin dernier a concerné une unité australienne en Afghanistan, opérant ses exactions en ? 2007. 10- Impliqué courageusement, depuis quelques années, dans la lutte contre la pédophilie et ses réseaux protégés. 11- Et les tractations secrètes la précédant avec les corps d'armées et les unités allemandes, mais aussi l'appareil administratif et politique national-socialiste. 12- Juin 1940-juin 1941, la Grande histoire des Français sous l'Occupation, R. Laffont, Tome 2 Paru en novembre 1977 13- Lire « Les Européens sous-estiment le rôle de l'URSS dans la défaite du nazisme » https://www.newcoldwar.org/europeans-underestimate-soviet-armys-role-in-wwii-victory-over-nazism/ et, de Annie Lacroix-Riz, « Le rôle de l'URSS dans la deuxième Guerre mondiale (1939-1945) ». 14- Archives du département du Rhône et de la métropole de Lyon, Section de recherche de la Gendarmerie nationale de Lyon. 15- Lire et écouter à ce sujet, mais aussi au sujet de « la crétinisation des classes aisées », Emannuel Todd et Jacques Sapir. 16- Comme cela a été le cas l'an dernier en Italie du sud, où en l'espace de deux jours, une petite ville a vu l'arrivée brutale de près de 12 000 personnes. Parmi les citoyens qui se sont organisés contre cet afflux massif, plusieurs personnes ont été condamnés à 60 jours de prison ferme ... 17- De Gustav Whormann in https://www.flickr.com/photos/60295744@N07/12046493454 18- de cantfightthetendies, https://www.flickr.com/photos/131295020@N06/38028798292 19- F. Fillon qui, au moins dans ses intentions, apparaissait comme celui qui souhaitait mener une vraie lutte contre les réseaux islamistes et ses commanditaires, Arabie Saoudite et Qatar réunis (ses discours et son livre ? programme : Vaincre le totalitarisme islamique), tout en se rapprochant de la Russie et de l'Iran. Erreur fatale... 20- http://alt-market.com/articles/3204-operation-temperer-uk-will-likely-institute-martial-law-measures-within-a-year 21- Selon la formule : FN = racisme, antisémitisme, islamophobie, etc. 22- Frédéric Lordon in https://lundi.am/Situation 23- www.johnpilger.com (nous soulignons). 24- Il est significatif de noter que les manuels de formation des forces de police (Garde nationale et même des comtés) aux USA s'inspirent largement des retours d'expérience des guerres d'Irak, d'Afghanistan etc. Des coopérations sont établies avec des organismes, notamment israéliens, et de nombreux vétérans y sont recrutés. 25- Jetons un coup d'œil à cette partie occulté du début du conflit en Afghanistan : « Le 3 juillet 1979, la Maison Blanche décida de soutenir secrètement les groupes tribaux fondamentalistes connus comme les moudjahidines, un soutien dont le coût monta jusqu'à plus de 500 millions de dollars par an en fourniture d'armes et autre assistance. L'objectif était de renverser le premier gouvernement laïque et réformiste d'Afghanistan. En août 1979, l'ambassade américaine à Kaboul rapporta que «les intérêts supérieurs des États Unis? seraient servis par la destitution [du gouvernement PDPA], quelles qu'en soient les conséquences pour les réformes sociales et économiques en Afghanistan. Les moudjahidines furent les précurseurs d'Al-Qaïda et de l'État islamique. Gulbuddin Hekmatyar, qui reçu des dizaines de millions de dollars en liquide, fut l'un des leurs. La spécialité d'Hekmatyar était le trafic d'opium et l'aspersion d'acide sur le visage des femmes qui refusaient de porter le voile. Invité à Londres, il fut présenté par le premier ministre Thatcher comme un combattant pour la liberté. De tels fanatiques seraient restés dans leur monde tribal si Brzezinski n'avait pas initié un mouvement international pour promouvoir le fondamentalisme islamique en Asie Centrale et donc miné la politique séculaire de libération pour déstabiliser l'Union Soviétique, créant, ainsi qu'il l'écrit dans son autobiographie,quelques musulmans agités. » Ibid. 26- N. Bonnal, « Comment l'establishment anglo-américain créa Hitler ». Lire également Financement et développement des deux côtés d'une belligérance : le meilleur ennemi qu'on puisse acheter ainsi que Wall Street et la montée en puissance d'Hitler du Professeur Antony C. Sutton, l'un des spécialistes de la 2ème Guerre mondiale. Lire aussi https://www.solidariteetprogres.org/documents-de-fond-7/histoire/hitler-pouvoir-par-londres-wall-strret 27- Tels que Krupp, IG Farben, le conglomérat formé de BASF, de Bayer, de Hoechst et d'autres entreprises chimiques et pharmaceutiques, grand soutien à Hitler, ainsi que d'autres grandes firmes. https://blogs.mediapart.fr/victorayoli/blog/301116/monsanto-bayer-quand-bayer-achetait-des-lots-de-femmes-auschwitz?utm_source=facebook&utm_medium=social&utm _campaign=Sharing&xtor=CS3-66 28- N. Bonnal, « Comment les anglo-saxons créèrent le nazisme à Versailles », https://fr.sputniknews.com/blogs/201701231029732030-Versailles-nazisme-Allemagne-URSS/ 29- De nombreuses recherches internationales donnent des estimations, qui varient entre 20 et 60 millions de morts russes au total. |
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