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Le problème qui se pose aujourd'hui
sur le plan économique mondial et les divergences entre les grandes puissances
économiques du monde au sein desquelles les Etats-Unis, qui sont le pays-centre
de l'économie mondiale et remettent en cause l'ordre économique mondial par le
protectionnisme, nous interpelle à plus d'un titre. Alors que la Chine pose en
«champion du multilatéralisme», au moment où l'administration Trump est critiquée pour son approche unilatéraliste des
affaires du monde. Et la Russie se fait aussi le chantre du multilatéralisme,
accusant les Etats-Unis de recourir au «chantage politique, à la pression
économique et à la force brutale» pour empêcher l'émergence de puissances
mondiales rivales. La question est pourquoi cette inquiétude des États-Unis qui
passent au protectionnisme tous azimuts ? Craignent-ils qu'ils soient détrônés
par la Chine sur la scène mondiale ? Ou y a-t-il
d'autres causes qui ne sont pas révélées au grand public ?
L'Europe, le Canada, le Mexique n'échappent pas à la décision unilatérale des États-Unis d'imposer des tarifs sur leurs exportations. Et tous sont unanimes tant en Europe, en Chine, qu'au Canada... pour dire que les mesures protectionnistes prises par l'administration Trump sont injustifiées. Et qu'elles ne leur laissent pas d'autre choix que d'imposer, en représailles, des droits de douanes sur des produits américains. Et cette hausse du prix du baril de pétrole, comment l'expliquer ? La première remarque essentielle que l'on doit dire d'abord est que le programme projeté par Trump vient en droite ligne de la politique économique d'Obama durant ses huit ans de mandature. En clair, Donald Trump doit la réalisation à venir de son programme à l'héritage économique et financier que lui a laissé son prédécesseur. Sans la sortie de la crise financière de 2008, et sans les Quantitative easing (QE) opérés par la Banque centrale américaine (Fed), c'est-à-dire les liquidités créées ex nihilo, qui sont venues à la fois relancer l'économie occidentale et du monde et dégonfler la dette extérieure américaine, le programme du nouveau président américain serait irréalisable. Donald Trump ne pourrait ajouter de la dette à la dette extérieure. Les États-Unis seraient tout simplement en faillite vis-à-vis du reste du monde. Ils ne pourraient répondre au service de la dette externe sauf à créer de l'inflation, ce qui signifierait le déclin, voire la fin du dollar. Ce qui nous fait dire que c'est l'héritage d'Obama qui permettra à Donald Trump de réaliser son programme. Ouvrant ainsi un nouveau cycle de financement. Comment va s'opérer ce nouveau cycle ? Tout d'abord, les États-Unis enregistrent année après année des déficits jumeaux, budgétaire et courant. Pour l'année 2015, «Le déficit des finances de l'Etat fédéral s'est établi à 587 milliards de dollars sur la totalité de l'exercice clos fin septembre 2016 contre 439 milliards en 2015.» Quant au déficit courant, pour l'ensemble de l'année 2015, il a atteint 484,1 milliards de dollars, le plus important depuis 2008. (Reuters France) Dès lors, la seule issue pour réaliser le programme de Trump, ce sont des injections monétaires comme ont procédé ses prédécesseurs, c'est-à-dire Bush junior et Obama. On peut postuler que la politique américaine, tout en étant restrictive sur le plan du taux d'intérêt, sera très expansive sur le plan monétaire. Ce processus a commencé en 2017. Dans un premier temps, le dollar va s'apprécier par rapport aux autres monnaies avec la hausse du taux d'intérêt de la Fed, mais les injections de liquidités qui s'opèreront sur injonction de Trump feront forcément baisser le dollar par rapport à l'euro, la livre sterling et le yen. Une dépréciation du dollar qui sera inévitable, comme dans les années 2002 à 2008 sous Bush, et 2008 à 2014, sous Obama. Pour éviter une dépréciation continue et risquée pour le dollar, le recours à l'augmentation du cours du pétrole est, lui aussi, inévitable. C'est une condition sine qua non pour la réalisation de l'ambitieux programme du nouveau président qui veut créer 25 millions d'emplois. Et cela passe par une financiarisation de l'économie américaine que la Réserve fédérale (Fed) nolens volens sera obligée d'opérer. Il faut le répéter : «Sans ces liquidités massives, il est strictement impossible pour Donald Trump de remplir ses promesses». Par conséquent, le prix du pétrole sera probablement porté à la fin de l'année 2018 à plus de 90 dollars. Evidemment tout dépendra de l'application du programme économique qui, bien qu'il ne soit pas divulgué, est connu dans ses grandes lignes. On peut penser que Trump cherchera à accélérer le processus. En 2018, le prix du pétrole pourrait même atteindre 100 dollars le baril si Donald Trump augmente rapidement les dépenses publiques et la baisse d'impôts pour les entreprises américaines. Les baisses d'impôts s'apparentent à des subventions pour doper la compétitivité des entreprises américaines. Qui seront évidemment contrebalancées par des émissions monétaires conséquentes de la Fed. Le relèvement du taux d'intérêt directeur de la Fed sera probablement porté à 3% fin 2018, ou au premier semestre 2019. Il ne constituera pas un frein à la croissance pour l'économie américaine. Cependant, si normalement, comme par le passé, il devra attirer des liquidités du monde entier vers les places financières américaines, ce qui, par le recyclage, permettra de pondérer la politique monétaire américaine, il demeure un dilemme pour les Etats-Unis ; c'est la guerre qu'ils livrent à leurs partenaires commerciaux. Les achats d'obligations souveraines américaines par la Russie, par la Chine vont forcément s'amenuiser eu égard à cette guerre commerciale. Déjà, le portefeuille en obligations américaines de la Russie a été divisé par deux. De même, la Chine a fortement baissé ses achats en bons de Trésor américain. Dès lors, les pays achetant du pétrole en d'autres monnaies mettront en difficulté les États-Unis pour financer leurs déficits extérieurs. Moins de dollars émis absorbés par les pays du reste du monde ne fera que pousser les États-Unis à augmenter le prix du pétrole obligeant ainsi les pays importateurs de pétrole à acheter plus de dollars pour régler leurs importations pétrolières. On comprend dès lors que les États-Unis, détenant le libellé monétaire du pétrole, c'est-à-dire la monnaie de facturation des transactions pétrolières, le prix du pétrole va flamber. Il va fortement augmenter, et probablement en décembre 2018, il atteindra les 100 dollars. Le prix du pétrole continuera certainement à progresser, en 2019 et 2020, probablement au-dessus des 100 dollars, hormis quelques rares exceptions de chute qui ne seront pas durables.» Donc, ce qu'on peut dire sur la hausse du pétrole, c'est la conjoncture économique qui l'appelle. Et surtout l'échec sur toute la ligne de la stratégie militaire au Moyen-Orient. Une stratégie menée pour maintenir, à travers la mainmise sur le pétrole moyen-oriental, l'hégémonie US sur le monde. Sauf qu'il y a les contingences de l'histoire. De plus, cette volte-face avec la montée protectionniste aux États-Unis est en complète opposition avec les chantres de la dérégulation financière et la globalisation que furent Ronald Reagan et Margaret Thatcher dans les années 1980 ? Les temps ont visiblement changé ? De même, les réticences des pays européens de revenir au régime de sanctions contre l'Iran. Alors que la Chine et la Russie considèrent l'Iran comme leur chasse gardée. Et que représente l'Iran dans l'imbroglio au triple plan économique, financier, monétaire et militaire au point que Donald Trump a invité à rencontrer le président iranien Rohani, et celui-ci a refusé compte tenu de la virulence des propos de Trump contre son pays. Et si l'Iran est le talon d'Achille de l'Amérique ? Et c'est l'Iran auquel on peut joindre le Venezuela qui va faire, dans les années qui suivent, pièce à l'ordre américain dans le monde. En libellant son pétrole en monnaies autres que le dollar, l'Iran rebattra forcément les cartes du monde. L'Inde, par exemple, achète le pétrole iranien en roupies. La Chine également en Yuans. Les Européens ont déjà annoncé qu'ils instaurent un troc pour échapper aux sanctions américaines contre l'Iran. Comme l'annonce est diffusée par l'AFP. «Nations unies (Etats-Unis) (AFP)- Les Européens ont annoncé la création d'un système de troc afin de préserver leur commerce avec l'Iran tout en échappant aux sanctions américaines, défiant Donald Trump qui a appelé mardi à «isoler» le régime «corrompu» de Téhéran. Cette initiative vise à sauver l'accord sur le nucléaire iranien de 2015, malgré la sortie fracassante des Etats-Unis de ce texte en mai. «Concrètement, les Etats membres de l'Union européenne vont instaurer une entité légale pour faciliter les transactions financières légitimes avec l'Iran», a expliqué la cheffe de la diplomatie de l'Union européenne, Federica Mogherini, dans une déclaration lue lundi soir conjointement avec le ministre iranien des Affaires étrangères, Javad Zarif, à New York. «Ce système permettra aux compagnies européennes de continuer à commercer avec l'Iran (...) et pourrait être ouvert à d'autres partenaires dans le monde», a-t-elle ajouté à l'issue d'une réunion des six pays encore parties à l'accord. Depuis la tribune de l'ONU, Donald Trump n'a pas répliqué à cette initiative, mais il a demandé mardi à «toutes les nations d'isoler le régime iranien tant que son agression se poursuit» et à celles qui importent du brut iranien de «réduire substantiellement» leurs achats à ce pays. Le «véhicule dédié» européen (Special purpose vehicle - SPV) fonctionnera comme un système de troc ou une bourse d'échanges à partir de la vente du pétrole iranien, première ressource du pays. A suivre... *Auteur et chercheur spécialisé en économie mondiale, relations internationales et prospective. |