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«Au nom de Dieu,
le Clément, le Miséricordieux! Que Dieu comble de bénédictions Notre Seigneur
Mohammed, sa famille, ses compagnons, et qu'il leur accorde le salut ! Tu m'as
demandé, frère au cœur pur, (que Dieu t'accorde la vie éternelle et la félicité
sans fin !), de te révéler ce que je pourrais des secrets de la Philosophie orientale
communiqués par le Cheikh, le Prince [des philosophes], Abou Ali ben Sina (Avicenne).
Sache-le bien : «celui qui veut la vérité pure doit chercher ces secrets et travailler à en obtenir «la connaissance»». Or la demande que tu m'as adressée m'a inspiré une noble ardeur, qui m'a conduit (Dieu en soit loué !), à la perception d'un état dont je n'avais pas eu conscience auparavant, et m'a transporté à un terme si reculé, que la langue ne saurait le décrire, ni les ressources du discours en rendre compte ; car il est d'une autre espèce et appartient à un autre monde. Le seul rapport qu'il ail au langage c'est que, par suite de la joie, du contentement, de la volupté qu'inspire cet état, celui qui y est arrivé, qui est parvenu à l'un de ses degrés, ne peut se taire à son sujet et en cacher le secret: il est saisi d'une émotion, d'une allégresse, d'une exubérance et d'une gaieté qui le portent à communiquer le secret de cet état en gros et d'une façon indistincte. Alors, si c'est un homme à qui manque la culture scientifique, il en parle sans discernement. L'un, par exemple, est allé jusqu'à dire, à propos de cet état : «Louange à moi ! Combien ma position est élevée !» (*) ; tel autre : «Je suis la Vérité !» ; tel autre enfin : «Celui qui est sous ces vêtements- n'est autre que Dieu !» Quant au Cheikh Abou Hamid (al-Ghazali), il a fait à cet état, lorsqu'il y fut parvenu, l'application du vers suivant : «Ce qu'il est, je ne saurais le dire.» Penses-en du «bien et ne demande pas d'en rien apprendre.» Mais c'était un esprit affiné par l'éducation littéraire et fortifié par la culture scientifique. Considère aussi les paroles d'Abou Bekr ben es-Saigh (Ibn Badja) qui font suite à ce qu'il dit au sujet de la description de la conjonction (l'intellect humain avec l'intellect divin) : «Lorsque, dit-il, on est arrivé à comprendre le sens «caché» de sa doctrine, alors on voit clairement qu'aucune connaissance des sciences ordinaires «ne peut être au même rang que lui. «L'intelligence de ce sens caché» est donnée dans une condition où «l'on se voit séparé de tout ce qui précède», avec des «convictions nouvelles qui n'ont rien de matériel», trop «nobles» pour être rapportées à la vie physique, états «propres aux bienheureux», affranchis de la composition «inhérente à la vie naturelle, lignes d'être appelés des «états divins accordés par Dieu à qui il lui plait d'entre «ses serviteurs.» Cette condition que désigne Abou Bekr, on y arrive par la voie de la science spéculative et de la méditation. Pour lui, il y est parvenu, sans nul doute, et n'a point manqué ce [but].» (1) Arrêtons-nous dans ce préambule de l'ouvrage qu'Ibn Tofaïl a écrit au XIIe siècle après J.C. ou, dans le calendrier musulman, au VIe siècle hégirien. Ces lignes ne nous interrogent-ils pas sur notre existence ? Qui sommes-nous en fin de compte ? Quel est le sens de notre existence ? A plus forte raison, aujourd'hui ? Le monde s'est accéléré par la nouvelle trajectoire qu'a prise l'existence moderne. Un monde différencié. L'Occident a pris une trajectoire, le reste du monde aussi. L'islamisme, une doctrine qui est en train de bouleverser l'équilibre géostratégique mondial. Et enfin, les croyances et les incroyances tranchent avec ce qui a prévalu avec le passé. Pourquoi cette accélération de l'histoire de l'humanité ? LA DOUBLE RATIONALITE DE L'HOMME DANS L'EXISTENCE La première réponse qui s'impose est de dire que rien n'est crée au hasard dans un monde qu'on connait, en réalité, si peu. Et que tout ce qui se produit tant en bien qu'en mal est un processus naturel de l'évolution de l'humanité. C'est dans un certain sens ce qu'énonce Ibn Tofaïl quand il cherche à parler ce qu'apporte la philosophie orientale à l'homme. «Tu m'as demandé, frère au cœur pur, (que Dieu t'accorde la vie éternelle et la félicité sans fin !), de te révéler ce que je pourrais des secrets de la Philosophie orientale communiqués par le Cheikh, le Prince [des philosophes], Abou Ali ben Sina (Avicenne).» (1) Ibn Tofaïl parle de philosophie pour révéler des secrets cachés. Mais, on peut se poser la question : «Qu'est-ce que la «philosophie» ? A un ami, j'ai donné cette réponse : «la philosophie est avant tout un art d'être, un art de vivre, un art d'être soi. Ce n'est pas tant le mot philosophie qui retient l'attention, ou les philosophes par eux-mêmes qui communiquent avec nous, ou que nous voudrions les lire, c'est surtout nous qui devenons, à notre corps défendant, objet de ce sens philosophique qui n'est finalement que notre quête de soi, dans le sens «Qui sommes-nous ? Et la question du «Qui sommes-nous revient sans cesse ?», et on n'est jamais satisfait de la «Philosophie». On repose à la philosophie toujours la même question, et une question qui n'est pas audible, parce qu'elle se pose au plus profond de notre être. S'il n'y avait pas cette question qui se poserait souvent dans le cours de nos existences, «qu'est-ce que nous sommes ?, la «philosophie» n'aurait «raison d'être».» Par cet énoncé, la philosophie nous apparaît en fin de compte une recherche de soi, et tout être humain qui médite sur sa destinée use de philosophie. Et ce faisant, notre esprit est occupé à la compréhension à travers sa méditation à sa propre compréhension. Parce que souvent, on ne se sait pas, et on s'arrête un moment quand on sait ou que l'on entrevoit que l'on va savoir. Et surtout savoir c'est plus fort que soi, nous sommes des «êtres-pour-savoir». Et, sans le savoir, on n'est pas. Et c'est notre esprit ou notre âme, sans que l'on sache ce qu'ils sont exactement, qui nous commande de penser cette pensée. Ceci nous dit que tel est notre destinée. Une destinée que les hommes n'ont pas choisie, et qui s'est imposée à eux. Et la philosophie est ce désir de connaître à la fois son origine et l'univers dont fait partie la nature humaine. Dès lors, la philosophie est une donnée pour chaque être pour peu qu'il cherche à se savoir. C'est la raison pour laquelle elle se définit comme un art d'être, d'exister, et de concilier les contraires propres en chaque homme. Dans le sens qu'il est malheureux ou heureux, qu'il apprend à exister dans le bien comme dans le mal, qu'il apprend à transcender les maux de l'existence. Par exemple, le mal, la maladie, la mort, une existence terne ou brillante, pauvre ou riche, l'essentiel est d'être, d'accepter sa destinée. Parce que tout est relatif. Malheur qui s'abat, ou qu'une joie qui arrive, prendre ce qui est comme un processus naturel relève d'une force de l'âme, elle-même tributaire de sa «philosophie d'exister». C'est-à-dire de prendre avec philosophie sa vie. Evidemment, dans ce sentiment d'exister, les concepts philosophiques n'ont pas le même sens que «ceux qu'on enseigne dans les écoles et universités qui sont plutôt méthodiques, cartésiens faits pour être enseignés». Ces concepts ont un autre sens. Ils se définissent plus dans ce qu'on pourrait appeler la «philosophie rationnelle, existentielle», ou encore ce qui est en elle, la «métaphysique» peut aussi être définie de «rationnelle». Pourquoi ? Parce que tout est rationnel dans notre existence ! L'irrationnel fait aussi partie du rationnel. Tout est réel dans l'homme, comme la réalité, c'est-à-dire ce qui nous entoure est réel. L'homme est un être de raison, et cette qualité est fondamentale dans la compréhension de notre existence. Elle nous permet de comprendre et se comprendre dans le mouvement de notre pensée qui gouverne notre existence. Aussi, partons de ce qu'a dit Ibn Tofaïl sur les secrets de la philosophie du Prince des philosophes, Abou Ali ben Sina. Tout d'abord sur la réalité du monde, et de l'univers. Cette définition du monde est exprimée par la vision que ces grands philosophes ont du monde. Et la pensée insuffle cette réalité du monde à l'homme. C'est par leurs pensées et le long questionnement sur la réalité du monde qu'ils sont arrivés à conclure que le monde est «Un» et dû à «Un» et relève d'une «Cause Première, d'une Intelligence Première, d'un Être Nécessaire». Et tous les philosophes qui ont précédé Aristote, Platon, Parménide, Protagoras? ou qui ont suivi après, Schopenhauer, Hegel, Nietzsche, Jaspers, Sartre? ont chacun apporté une «vision» de l'homme et du monde. Ils ont donc contribué à l'enrichissement intellectuel de l'humanité qui en avait besoin pour «exister». Mais ce sont surtout les religions révélées qui ont éveillé la conscience de l'humanité. Hébreux d'abord, Chrétiens ensuite et Musulmans se sont succédés dans l'histoire de la conscience humaine. Et si ces religions sont toutes nées dans le «Croissant fertile», c'est qu'il y avait un sens dans la Parole Divine d'autant plus que les trois religions prennent chacune des autres, et des autres de chacune. Le message divin est absolument rationnel. Dans l'Islam, par exemple, on trouve la «Révélation» et les «prophètes» de ceux qui sont venus avant son avènement. Il y a quelque chose de miraculeux dans la Création divine du monde et de l'humanité. Tout est rationnel dans le développement historique de l'homme. Tout est fait pour que l'homme, l'être humain, s'oriente dans la Création du monde. On a ce sentiment que les êtres humains crées ne sont pas seuls, qu'il y a une Force Invisible qui fait que leur existence a une base solide, a une rationalité objective, et qui réponde à la finalité de leur existence. Ce sont donc des êtres humains crées «de-raison-et-pour-raison», et surtout ils sont des «êtres-pour-savoir». Donc il y a une double rationalité dans l'existence humaine. LA «LOI FONDAMENTALE DE L'EXISTENCE» ? Cependant, cette approche est-elle suffisante pour se sentir être, pour justifier notre existence ? Nous sommes des êtres crées par une Puissance Divine dont nous ne savons rien sinon que nous relevons du Créateur des Mondes, du Dieu Tout Puissant. Une «Vérité» que l'on croit ou non ne changera rien ni au Principe de la Création ni à la Création du Monde elle-même. En d'autres termes, nous existons, et peu importe comment nous appréhendons notre existence. Des hommes peuvent penser que l'existence n'est en fait qu'une illusion, et libre à eux de penser ce qu'ils veulent. Mais le fait est là, nous n'existons que par cette Essence divine qui est en nous. Et le monde entier relève de cette Essence. Dès lors que notre existence est décrétée comme telle, nous n'existons et n'agissons que selon la «Loi Fondamentale» que le Créateur des Mondes a mis en nous. C'est-à-dire des «êtres-de-raison-pour-raison et des êtres-pour-savoir» qui signifient que l'humanité a un double but et signifient aussi que nous existons par une «Nécessité» dont nous ne savons rien, que nous sommes et c'est tout. Et nous ne pouvons que supputer le sens de notre destinée en regard d'une vision métaphysique rationnelle de notre histoire. Le premier élément que nous pouvons tirer de notre sens d'exister, et pourquoi exister est de définir l'humanité dans son essence. Ce qui est fondamental si on veut comprendre le sens de son existence terrestre dans l'immensité sans fin qui l'entoure. Et que représente cette immensité sans fin pour elle, et l'humanité pour l'immensité sans fin ? Non pas parce que nous appréhendons certaines dimensions de l'immensité que nous conceptualisons «soleil, Voie lactée, étoiles, galaxies, etc.», que nous pensons que nous en avons connaissance. Intrinsèquement, ces termes qui ont certes un sens et un corps dans notre définition ne sont pas suffisants pour nous situer dans cet univers infini du monde. Le monde ici n'est pas pris comme le monde terrestre ou un autre monde, mais les mondes possibles dans le monde. Et donc l'univers infini du monde devient une «immensité» qui ne peut être conceptualisé par les mots. Et le fait est que l'homme, l'être humain, est impuissant à en dire ce que c'est, et à comprendre ce «même pourquoi leur existence». Dès lors, devant cette impuissance de comprendre cet univers, nous sommes alors confrontés à cette double réalité que nous sommes des êtres humains qui n'ont de réalité sur notre existence et sur le monde que ce que la «Loi Fondamentale» a mis en nous. Le deuxième élément, est que Nous existons certes, nous activons certes pour notre devenir, nous pensons certes, nous agissons certes pour être, nous sommes dotés d'un libre-arbitre certes, nous pouvons croire comme nous pouvons ne pas croire parce que le Créateur a inscrit ce libre-arbitre dans la Loi Fondamentale, et par conséquent nous sommes libre d'agir dans le bien comme dans le mal, dès lors que toutes ces facultés nous sont octroyés «pour être» signifie aussi que nous ne sommes pas libre dans ce être même si nous sommes dotés de ce libre-être. Et le plus fondamental, doit-on dire, que la réalité intérieure et extérieure à notre être que nous témoignons relève-t-elle de notre vision propre ? Ou n'est-elle que ce que nous sommes en tant que régi par la «Loi Fondamentale» ? C'est-à-dire que nous sommes humains, nous existons et témoignons de cette existence par le fait que nous avons été conçu pour être cet «être-là», cette «présence-là» et aussi «pour cette présence-là», différente par cette conscience de «cet être-là, de cette présence-là», et des autres présences et donc nonobstant l'immensité-là. Si l'humain est cette présence-là, qui lui est différente (par son essence) de ce qui l'entoure, par cet être en lui qui pense, dès lors peut-il se suffire de son humanité ? Ou autrement dit, l'humain qu'il est est-il suffisant pour se caractériser dans l'immensité de l'existant ? Et celle-ci, cette immensité-là, est-elle suffisamment caractérisée par cet être-là, l'humain ? Ou plus encore, cette immensité-là est-elle suffisamment caractérisée «pour cet humain-là» ? Donc il y a une relation de cause à effet, et d'effet avec la cause. C'est à ces questions que l'homme tend aujourd'hui à comprendre pour se comprendre. Le monde a beaucoup avancé, la science ne cesse de se développer, et l'humanité aussi. Et l'homme ne fait que balbutier, et sa science n'est encore que commençante? Et le chemin est long, très long, et constitue l'élément le plus long de son existant? Dès lors, cette limitation-là explique tous les tourments que l'humanité ait vécus depuis sa venue sur terre. Et explique aussi les stades historiques successifs qui l'ont progressivement constitué et qui ne sont jamais terminés. Et au sein desquels un progrès humain est manifestement une réalité, et en constant développement. Ce qui constitue l'envers de la médaille des dures épreuves subies par l'homme. Dans cette flèche du temps humain, on ne peut que penser que forcément il y a un sens, non pas comme les êtres-là le pensent, parce qu'ils ne pensent que selon la «Loi Fondamentale», mais la «Loi Fondamentale, Elle-même» démontre si besoin qu'Elle n'est pas figée, qu'Elle est ouverte à tous les possibles et surtout qu'Elle est à la hauteur de cet Infini-Monde. Elle le démontre par les sauts quantitatifs et qualitatifs que l'homme fait dans les temps de l'histoire. Aussi posons-nous la question : «Connaissons-nous vraiment ? Réellement ? » Est-il suffisant ce concept d'humanité ? Sommes-nous définis suffisamment dans cette marche ancienne et surtout nouvelle du temps ? Eu égard aux enjeux qui divisent le monde ! Pour la compréhension de notre humanité, de notre humain, prenons un être de la Création, par exemple un moustique. Tout le monde sait qu'un moustique se nourrit de sang, et la plupart des êtres humains ont été piqués par un moustique, suceur de sang. Vous dormez, par exemple, et vous êtes piqué par un moustique. Vous avez mal, la piqûre vous brûle la peau, et vous savez que c'est un moustique. Vous la cherchez et elle est là, juste au-dessus de vous, accolé au mur. Si vous êtes expérimenté, vous prenez un objet plat, un journal ou plutôt une serviette, et vous vous rapprochez doucement et, brusquement la plaquiez sur elle. Vous l'écrasez, et elle est morte. Vous prenez du papier toilette humide et essuyez votre sang et des restes du moustique du mur, et vous nettoyez votre serviette dans la salle de bain. Et si c'est le seul moustique dans votre chambre, vous allez vous rendormir en paix. Prenons le cas où vous ratiez votre coup, et le moustique échappe, et vous lui couriez après de mur en mur, de mur au plafond? ? Un combat commence. Si vous êtes motivé, vous le chercherez, si vous êtes trop fatigué, vous abandonnez et de nouveau vous êtes dans votre lit. Et si, dans le premier cas, vous ne réussissez pas à l'avoir, le moustique est libre de recommencer à vous piquer. Donc, dans les deux cas, vous devez donc supporter les piqûres. Analysons le comportement du moustique. Pourquoi il pique ? Il est évident que cet être est conçu ainsi, pour piquer l'homme, et pas seulement l'homme. Pour se nourrir, il a une infime pointe qui est en fait une minuscule trompe grâce à laquelle il aspire du sang. De plus, il est intelligent, il s'échappe quand vous vous rapprochez de lui. Et il revient toujours à la charge parce qu'il a besoin de se nourrir. Et il choisit même les moments où il n'y a pas de danger pour lui. Quand le moustique sent une agression, il se cache et attend le moment propice. Mais une question se pose. Le moustique est-il réellement agressif ? Son agression, n'est-elle pas simplement un instinct pour vivre ? S'il ne piquait pas, et sans sang pour son métabolisme, il ne pourrait pas vivre et donc, il ne pourrait exister. A-t-il une foi, une croyance ? Il n'en a pas ? C'est un être animal qui est de sensibilité et de mobilité purement instinctive. Un être pour ainsi dire «programmée ». Mais cette sensibilité et cette mobilité instinctive qui est aussi intelligente lui permet le plus souvent d'échapper aux agressions par exemple de l'homme, et donc de se multiplier et d'exister. Et même l'Homme n'est pas agressif vis-à-vis du moustique. Il se défend simplement parce qu'il lui fait mal, de plus, il perturbe son logis, et l'homme cherche l'ordre dans son chez soi. Le moustique n'a pas de croyance, il existe par l'instinct de conservation, et lui aussi fait partie de la «Loi Fondamentale » du Créateur. Parlons maintenant de l'homme. A-t-il une foi ? Une croyance ? Comme chaque humain sait, tout homme a une croyance, a une foi en quelque chose, en quelque divinité, et cela depuis la nuit des temps. Si l'homme est réellement humain, c'est qu'il pense, et il pense à ce qu'il le rattache à son milieu, à son existence. Et cette pensée humaine subit un développement historique. Plus le temps et l'Histoire avance, plus l'être humain apprend et plus il se développe et devient de plus en plus fort dans son humanité. Mais l'être humain ne signifie pas qu'il est au-dessus de tout ce qui existe, il peut certes l'être par la pensée et par le mode de vie qu'il se construit. Mais il demeure néanmoins assujetti par son côté animal, lui aussi fait ce que fait le moustique pour se nourrir, pour vivre mais autrement. Par exemple, il a besoin d'abattre des animaux pour se nourrir comme le moustique qui suce le sang. Donc un destin animal commun tant à l'animal qu'à l'humain. Dès lors que nous avons ce destin commun, cela signifie que nous sommes dotés d'instincts que l'on ne peut réprimer. Et d'instincts nécessaires pour exister. Nous aussi faisons tout ce qu'il faut pour échapper à une agression, et c'est une défense instinctive. Et si on se défend, on peut aussi offenser, parce que cela fait partir de notre nature humaine. Ce qui signifie que l'homme peut aussi avoir des instincts pas seulement pour se défendre mais aussi pour agresser. Et c'est une différence fondamentale entre l'animal en général et l'être humain. Si l'animal dans son existence est mû par un instinct intelligent, donc une pensée animale instinctive, l'homme est mû à la fois par un instinct animal intelligent dont il ne peut se départir et une autre force que n'a pas l'animal, c'est le «libre-arbitre pensant » qui l'oriente dans son existence. Et c'est précisément ce libre-arbitre pensant et pensé ? l'homme pense parce qu'il se sent penser et sait aussi, il est conscient, qu'il pense ? qui lui donne ce pouvoir, par l'essence qui est en lui et qu'on appelle «pensée », et par laquelle l'homme peut s'interroger sur son existence. Et cette interrogation fatalement le confronte à l'existence du monde, et par conséquent à penser son être dans cet être-monde-là. Heidegger dira cet «Etant ». Car il n'y a pas de différence entre cet être-là et cet être-monde qui se manifeste à lui dans toute son immensité. Et ce point est fondamental. Précisément l'immensité n'est immensité que par ce qu'il définit lui-même, et lui-même n'est lui-même que ce que témoigne cette immensité de son existant. Et c'est le lien intrinsèque, indissociable entre lui et ce qui l'entoure. On peut même dire qu'il est l'Homme par quoi le monde Est. Et c'est voulu ainsi, par l'Essence même de l'Existence, de la Création. Dès lors toute croyance et incroyance ne sont que les deux faces de la même médaille qui est d'être, d'exister. Un être humain n'est humain que parce qu'il libre, et s'il est réellement libre, il peut croire comme il peut ne pas croire. Il peut avoir la foi comme il peut ne pas avoir la foi, ou une autre foi. Donc la croyance et l'incroyance est un trait caractéristique humain. C'est un peu comme si un homme peut dire que le lait est blanc comme il peut dire que le lait n'est pas blanc, qu'il a une autre couleur. Par contradiction, il peut refuser une réalité réelle. Un Blanc est blanc, peut aussi un autre blanc, mais cependant n'est pas noir. Car si cela eut été ainsi (un blanc noir), ce qui est impossible, l'être humain aurait alors perdu tous sens de la réalité. Ou encore, pour mieux comprendre la nature humaine et le libre-arbitre, argumentons par un exemple concret. Un homme peut commettre un vol ou un crime et dire que je ne l'ai pas commis. Et il peut croire dur comme fer qu'il ne l'a pas commis ? surtout s'il a une double personnalité. Et il le pense réellement. Ou encore s'il ne le pense pas réellement, et il est conscient qu'il l'a commis, mais devant le tribunal qui le juge, pour ce qu'il a commis (par son libre arbitre), ce refus de reconnaître devient un instinct de défense, dicté par son libre arbitre. Un autre exemple. Les Talibans en leur temps, en Afghanistan, ou les islamistes de l'EI en Irak et en en Syrie qui flagellent les femmes qui ne portent pas le niqab ou qui n'envoient pas leurs enfants dans une école religieuse ou les hommes qu'il leur est interdit de se tailler la barbe, par exemple, ou qu'ils leurs interdisent les pots-de-vin, donc pas de favoritisme alors que les postes de commandement de ces islamistes ne sont octroyés qu'à leurs fidèles proches, et c'est donc du favoritisme. Et qu'ils vont perpétrer des génocides (des centaines d'hommes sont assassinés) au sein des tribus irakiennes ou syriennes qui se révoltent à leur diktat. N'est-ce pas qu'ils le commettent dans la croyance et la foi qu'ils ont ? Qu'ils croient qu'ils sont dans le vrai alors qu'ils sont dans le faux. Pour ces talibans, ou les islamistes de l'EI, qu'ils tuent, qu'ils décapitent, ils n'en ont pas conscience qu'ils font du mal, qu'ils commettent des monstruosités. Ou même s'ils ont en conscience, cela ne changera rien. Alors que c'est un mal à l'état nu. Ces hommes n'ont plus rien d'humain et pourtant ce sont des humains. Et cette foi dans l'Islam qui est déviée par leur libre-arbitre, parce qu'ils veulent croire qu'ils sont dans le vrai. En réalité, ils savent très bien qu'au fond d'eux-mêmes qu'ils sont dans le faux, mais ils ont pris une trajectoire qui les poussent à ne plus reculer sinon à se renier. Et justement le libre-arbitre, combien même il leur a été octroyé libre par l'Essence, demeure qu'il est punissable d'abord par l'«Essence» avant de l'être par l'homme. Parce que l'Essence est Maîtresse de la Création. Et si on voit qu'il est «punissable d'abord par l'homme», et ce que procède la coalition occidentale et la dernière entrée dans le «théâtre de combat», la Russie, c'est que ce processus confirme bien que l'humanité est rattachée à l'«Essence». Et qu'au désordre vient progressivement l'ordre. Dans l'Essence, il y a cette idée de justice, et d'ordre. Que l'on n'échappe pas à son destin, à son crime, qui nous rejoindra tôt ou tard. Et même si on échappe à la justice des hommes, on n'échappe pas à la justice de l'Essence. Un dernier exemple qui éclaire la complexité du libre-arbitre auquel fait face l'homme. Prenons un responsable, ou un haut responsable d'un Etat, qui occupe une haute fonction de l'Etat à quelque niveau que ce soit. Supposons que ce haut responsable détourne des deniers de l'Etat à son profit, à l'intérieur ou à l'extérieur de son pays, ou les deux. Est-il conscient ce responsable de son acte délictueux envers l'Etat et envers le peuple de son pays ? On peut croire qu'il en est conscient ! En réalité, il peut être conscient comme il peut ne pas l'être pour la simple raison qu'il n'est conscient surtout que de son rang dans l'Etat et qu'il pense que cela suffit pour sa conscience et son rang qui l'autorise à puiser dans les caisses de l'Etat. D'autre part, il est conscient qu'il ne peut être inquiété parce que c'est lui, l'Etat. Là encore, c'est une «croyance qui peut être de l'incroyance », ou de la fausse croyance parce que ce que l'on croit est seulement ce que l'on veut croire parce qu'il sert notre intérêt. Et ce que ne sait pas ce responsable, c'est que si le peuple ne l'observe pas, ou seulement ceux qui sont proches de lui en sont informés, c'est qu'il est aussi observé par l'«Essence » (à son insu). En d'autres termes, la «Conscience du Monde l'observe » et sait tout ce qu'il fait de répréhensible jusqu'au moindre recoin de sa conscience. Ce qui signifie qu'il ne pourrait échapper au «Tribunal du Monde », un «Tribunal bien au-dessus des hommes ». Mais l'homme peut-il craindre ? Ou en est-il conscient de ce «Tribunal du Monde » ? Et c'est parce qu'il est humain, et fort de son libre arbitre, qu'il ne peut craindre. Mais combien même il ne craint pas, il demeure néanmoins assujetti à son «destin ». Et le destin de ce responsable n'est, en vérité, pas à envier. Parce que, si nous poussons loin dans son existence, et combien même il est immunisé de la justice des hommes, il est néanmoins malheureux par sa conscience. Et s'il n'est pas malheureux par sa conscience, il reste toujours malheureux par quelque chose qu'il ne sait pas. Et on n'a point besoin de disserter sur ce quelque chose. Et c'est ce quelque chose qui le différencie de celui qui est intègre. Dans le langage populaire, il est dit «que le bien mal acquis ne profite jamais ». Dès lors, la croyance en ce que nous sommes devient parfois même un instinct qui est irraisonné. Et c'est précisément dans ce «double combat » entre la croyance et l'incroyance, entre le bien en nous et le mal qui est aussi en nous, que nous devons se poser la question : «Connaissons-nous réellement ? » Et la foi divine, la foi que nous avons en en Dieu essaie d'y répondre. Parce que nous sommes religieux par essence, reliés à Dieu, que nous voulions le croire ou non, Nous sommes des êtres faits par Dieu, nous devons nos existences à Dieu, et c'est son Essence qui fait que nous soyons «nous », croyants et incroyants et avec une infinité de degré entre les deux. Et surtout parce que l'homme, avant de croire, est d'abord homme qui est mené aussi par ses instincts. Parce que croire en Dieu ne signifie pas qu'on suit les préceptes de Dieu. Et c'est là tout le drame de l'homme dans ce nous pensons être notre «existence », dans ce «connaissons-nous réellement ? ». Et, dans un certain sens, c'est aussi le «sens de l'existence », c'est-à-dire de s'efforcer de se connaître dans cet «inconnaissant ». * Auteur et Chercheur indépendant en Economie mondiale, Relations internationales et Prospective Note : 1. «HAVY BEN YAQDHÂN, Roman philosophique d'Ibn Thofaïl», texte arabe traduit en français par Léon Gauthier, chargé de cours à la chaire de philosophie de l'École supérieure des Lettres d'Alger. 1900. Site pour télécharger gratuitement (à la fin de la page Internet) plusieurs éditions et une thèse complémentaire pour le de doctorat ès-lettres sur Ibn Thofaïl, sa vie et ses œuvres. http://www.notesdumontroyal.com/note/498 |
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