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Une révolution dans les esprits

par Abdou BENABBOU

L'une des plus grandes faiblesses de l'homme est de contenir son existence dans l'immédiateté. Faiblesse réparatrice aussi car s'il devait trop s'empêtrer dans les multiples considérants de ses faits et gestes et de son comportement, il s'empoisonnerait la vie. Rares sont ceux qui se satisfont de l'évolution actuelle du monde et les Algériens sont parmi les premiers à être coincés dans un déphasage existentiel dû à des étapes historiques périodiquement bouleversées. Les nombreuses contrariétés subies ont pour causes la difficulté de s'adapter au rythme du temps pour s'introduire dans l'universalité.

Les griefs contre les mauvaises gouvernances, les uns justifiés et sensés, d'autres aux origines politiciennes suspectes, sont le fruit d'élans politiques précipités. Mais le fait est que les problèmes sont là et qu'il est suicidaire de ne pas faire avec. L'idée d'une nouvelle Algérie n'est sûrement pas un appel à une sérénade de circonstance ni une suggestion à refaire les pavés d'un pays menacé par un naufrage annoncé. Certaines âmes bien avisées exigent de tout effacer et de tout recommencer. Cet impératif séduisant à de quoi tenir, mais on ne refait pas un pays en lui changeant d'habits car la plaie ne s'est pas contentée d'aller seulement se loger pendant des décennies au sommet de l'Etat mais elle s'est aussi étendue de la tête aux pieds de chacun. C'est d'un bouleversement d'un logiciel national qu'il s'agit aujourd'hui et le passage à des normes conformes à l'érection du bonheur est une expédition qui réclame de la patience et du temps. Elle est plus une révolution dans les esprits que celle des parades passagères de la politique des hommes. Rien n'est plus dangereux pour une nation que de s'en tenir à se gargariser des littératures mal emballées en méconnaissant le socle réel sur lequel repose la majorité des masses populaires jusqu'à craindre que l'on se tromperait de pays.

Les données actuelles sur la situation du pays et les perspectives qu'elles annoncent ne sont pas toutes roses. On se fourvoierait dans de faux remèdes que d'exiger d'une majorité de se plier aux générales vérités d'une minorité.