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Pour moins de «feux» mal eteints

par Belkacem Ahcene-Djaballah

La Sibérie, les Etats Unis, le Brésil, le Canada, la Grèce, la Turquie, l'Italie, le Maroc, la France et l'Algérie, ceci pour le feu qui a ravagé et ravage encore des milliers d'hectares et a déjà causé des dégâts matériels et humains jamais vus auparavant. 69 décès (dont 28 militaires) en quelques jours pour la seule Algérie.

Il est évident que c'est Dame nature ? on ne la viole pas impunément- qui commence à se venger à sa manière. Et avec ses propres armes. Ici, le feu, ailleurs, l'eau (la fonte des glaciers, les inondations?)

Un peu partout dans le monde, les administrateurs des pays touchés se sont vite attelés à la tâche pour circonscrire puis éteindre les feux ou contenir les flots. Il est vrai que les plans Orsec -surveillance satellitaire à l'appui - depuis longtemps mis sur pieds et, en principe, mille et une fois expérimentés sur le terrain, donc avec des hommes et du matériel en principe toujours en éveil, démarrent généralement au quart de tour, facilitant donc la lutte. En général, beaucoup de dégâts matériels, mais peu de dégâts humains. Le sinistre peut durer mais la lutte continue avec, toujours, un soutien sans faille des populations.

Chez nous, aussi, les plans Orsec ( Voir pour l'Algérie le décret exécutif 19-59 du 2 février 2019, in Joradp n°10 du 10 février 2019 qui prévoit une plateforme numérique au niveau des 5 niveaux d'intervention du « site sensible » au « ministère de l'Intérieur » en passant pas l'inter-wilaya, la wilaya et la commune ) existent mais, en dehors des rencontres et séminaires d'explication, a-t-on eu assez de simulations pour tester les actions et réactions aux catastrophes naturelles ? Hélas, nous nous retrouvons, à chaque fois, face à des catastrophes naturelles qui nous prennent par surprise, amenant des réactions la plupart du temps tardives et, souvent, « hors sujet » ou précipitées, dont les sempiternelles « main de l'étranger » et « main criminelle ». Ce qui, est, parfois, sinon souvent ces derniers temps, en partie vrai. Ce qui amène les citoyens, surtout les plus touchés directement, à douter, dans leur douleur, de la bonne volonté des intervenants institutionnels ainsi que de leur capacité à faire face pour prévenir et éradiquer les dangers. On l'a vu avec les inondations de Bab el Oued en novembre 2001 (700 morts), avec le séisme de Boumerdès (plus de 2000 morts) et aujourd'hui avec les feux de l'été au Nord du pays, en Grande-Kabylie bien plus qu'ailleurs. Toute une région quasi-dévastée. Les doutes sont encore beaucoup virulents lorsqu'il y a, pour les attiser, de la manipulation politicienne et, hélas, peut-être, de la manipulation des « foules » ainsi d'ailleurs que de la mauvaise « gymnastique » intellectuelle, politicienne et « journalistique », par Fb et presse interposés. Ici, pour ce qui nous concerne, on a des « groupes» radicaux, classés d'ailleurs comme groupes terroristes (le Mak, régionaliste-séparatiste et Rached, islamiste-« revanchard »), ainsi que des individus toujours en « colère » contre le « Pouvoir », traité de tous les (mauvais) noms et se croyant « impunissables ». Les dérapages peuvent alors être dramatiques, tragiques même jusqu'à la mise à mort publique (lynchage). Et, dans la foulée et la confusion, toutes les accusations sont permises mettant à mal la Nation.

Dans tout ce drame, il y a, me semble-t-il, un élément absent, non en tant que victime (ici, hélas, il est toujours présent), mais en tant que coupable. Le citoyen ! En grande ou petite partie, mais tout de même coupable quelque part.

Coupable d'être, aussi, un des violeurs de Dame nature. « Iddir Rayou » ! Coupable de ne pas respecter la réglementation en vigueur en matière d'environnement et encore moins les administrations chargées du contrôle (lorsqu'elles existent dotées des moyens adéquats et soutenues par la hiérarchie et la justice). Coupable d'incivilités. Coupable de construire là où il veut (bien souvent en des endroits inaccessibles), comme il veut (avec parfois des matériaux inadéquats, sinon source de nuisances et dangers) et quand il veut. En pleine montagne comme en plaine, en bord de mer comme en pleine ville : des habitations comme des ateliers et des espaces de production, de transformation ou d'élevage avec des fils électriques qui pendouillent partout et des groupes électrogènes qui crachotent des étincelles. Une urbanisation rurale effrénée et anarchique des espaces ! Coupable de transformer des lieux de détente en lieux de beuveries, laissant derrière lui cannettes et bouteilles vides dont les tessons sont cause de départs de feux. Coupable de faire appel, lui aussi, aux démarches de corruption pour la raison que « ceux d'en haut » les utilisent sans peur. Coupable, lui aussi, de se réfugier, à chaque fois, derrière les « coups bas » et la « main » du Pouvoir » et d'on ne sait quel « service ». Ou, alors, coupable de se révolter contre les décisions administratives estimées toujours bureaucratiques et incompétentes (ce qui n'est pas totalement faux).

Dans ces conditions, et s'il n'y a pas une prise de conscience citoyenne, populaire, nationale et non pas « régionale » ou tribale (avec plus de civisme !) et étatique (avec plus de veille, de contrôle, de soutien, de prévention et de justes décisions ou sanctions !) et moins de parti-pris partisans, groupaux et /ou journalistiques, les « feux » resteront toujours mal éteints.