Finalement le plus grand centre de rassemblement des hommes se peaufine, peu à peu, par l'implacable mainmise de l'étendue phénoménale de la révolution informatique. Grace à l'Internet, les réseaux sociaux impriment une réelle dictature que tout un chacun accepte avec une docilité entraînante. Comme tout acte et geste humains sont d'essence politique, il ne serait donc pas faux de déduire qu'un immense parti politique, tribune en tous lieux, à portée de main, où n'importe quelle pensée vindicative ou participative a le loisir de s'étaler, allant jusqu'à dévoiler les secrètes intimités profondes personnelles.

Aucun parti digne de ce nom n'est capable d'une telle prouesse où le bon et le mauvais se confrontent mais n'enlèvent rien à ce qui est devenu une tribune mondiale où n'importe qui peut s'exprimer sur tout et n'importe quoi, allant parfois jusqu'à libérer ses fantasmes délurés.

L'allergie affichée par les différents pouvoirs face à ce véritable ogre n'est pas fortuite car ils ressentent les effets contrariants imparables sur leurs démarches et leurs actions et ils comprennent, au fond d'eux-mêmes, que le militantisme et l'engagement ont changé de nature et que leur structure n'a plus pour nom que celui de parti de l'Internet.

Outils et acteurs en même temps, les réseaux sociaux ont la particularité des arènes ouvertes aux vents, tantôt réceptacles des élans dépravés tantôt réceptives aux circonspections comme aux orgies, offerts aux insultes débiles comme à la manifestation des intelligences. Quand on se surprend ébahi et épaté par la dextérité et le savoir-faire avec lesquels des enfants jonglent avec les tablettes et les téléphones portables on est forcé de déduire que le tsunami de l'informatique s'est introduit sous tous les toits.

Il est sans doute temps pour les acteurs politiques de tous les bords de se convaincre que le creuset des différents militantismes n'est plus logé dans les meetings et les rassemblements. Il est dans la maîtrise et la manipulation intelligente de la bourrasque informatique. Ceci compris, il deviendra inutile de s'interroger sur les surprises, de plus en plus nombreuses, des élections et des votations puisque chaque potentiel militant a, maintenant, convenu qu'Internet soit son vrai parti. Chaque individu s'est constitué en vrai parti.