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Ecologie de l'urne

par Abdelkrim Zerzouri

Les bulletins de vote ont-ils une vie à la fin du scrutin ? A chaque rendez-vous électoral, l'environnement est gravement agressé par des milliers de bulletins de vote inutilisés, qu'on retrouve jetés sur les trottoirs, dans les poubelles, parfois brûlés, ou finissant au mieux de leur sort dans les camions de ramassage des ordures ménagères. Quel gâchis ! Quel gaspillage ! Avec un corps électoral de plus de 24 millions d'électeurs et 1.483 listes de candidats en lice, les législatives du 12 juin prochain constituent un véritable défi pour les autorités locales, qui auront à faire face aux déchets des bulletins de vote inutilisés sur un tirage qui a littéralement explosé, pour atteindre 1,2 milliard de bulletins de vote. Sûrement qu'on aura sur les bras une profusion de bulletins de vote inutilisés jamais égalée.

Comment gérer ces déchets ? A-t-on pensé à mettre en place un protocole spécial pour éviter l'agression de l'environnement et, surtout, tenter de rentabiliser ces déchets en les acheminant vers les unités de recyclage ? C'est en pareille circonstance qu'on peut mesurer si on est vraiment capable de recycler du papier ou si on ne fait que claironner au sujet d'une prétendue maîtrise de la gestion des déchets, qui placerait l'Algérie au rang de leader africain en la matière. C'est le constat fait par les participants à la 2ème édition du Salon virtuel auquel ont participé, le 5 juin dernier, plus de 170 exposants algériens et étrangers, qui ont soutenu que l'Algérie est en mesure de diriger le marché de l'économie circulaire en Afrique. C'est encourageant. Les capacités dans ce domaine du recyclage des déchets existent bien, malheureusement, on ne peut pas aller loin quand le tri des déchets, qui devrait impérativement impliquer le citoyen, est inexistant à la base. Pour le cas du recyclage des bulletins de vote inutilisés, et même ceux qui ont été utilisés, et qui sont destinés à la destruction après confirmation définitive des résultats du vote, cela implique les services des communes avec leurs EPIC dédiées à l'hygiène de l'environnement, qui devraient revendre les déchets en question aux unités spécialisées dans le recyclage du papier. Existe-t-il un protocole spécial pour la collecte des déchets de bulletins de vote en question ? C'est de l'argent que la commune ne devrait pas laisser filer, en sus de la vocation liée au respect de l'hygiène environnementale. Plus en amont, l'ANIE ne devrait-elle pas inscrire ce point dans son agenda, voire appeler, avec le concours des associations « vertes », à l'inclure dans le code électoral comme le font certains pays, pour veiller à ce que les bulletins de vote respectent des normes écologiques, visant à réduire l'empreinte carbone et la protection des forêts, en imposant le grammage du papier servant à la production des bulletins de vote, compris entre 60 et 80 grammes au mètre carré, la couleur blanche et l'impression en une seule couleur, ainsi que la condition d'un papier contenant au moins 50% de fibres recyclées au sens de la norme ISO 14021 ? Le fait que les candidats en campagne, ambitionnant de devenir de futurs députés, qui n'ont pas fait grand cas du volet « environnement » dans leurs programmes, n'inciterait pas à espérer faire régner une culture « verte » de sitôt si d'autres parties ne se mettent pas de la partie, notamment la société civile, pour nous convaincre du contraire.