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Tlemcen: Nouvelle découverte au site de Pomaria

par Khaled Boumediene

Une pierre funéraire de l'époque romaine a été découverte lors des travaux d'assainissement menés au cours de la semaine dernière sur le site de Pomaria, à la cité Agadir, a-t-on appris de jeudi auprès des services techniques de l'APC de Tlemcen. La découverte encore une fois de ce cippe démontre la richesse du site archéologique classé d'Agadir, a précisé M. Chennoufi Brahim, ex-conservateur en chef du patrimoine culturel auprès de la culture de Tlemcen. « De nombreuses découvertes fortuites de ces stèles funéraires datant de l'époque romaine sont signalées lors des fouilles et travaux de construction à la cité Agadir. Ce cippe romain appartient au cimetière antique de Pomaria, situé au Sud-Est des ruines de la Mosquée. Cette petite colonne est rehaussée de lettres en relief formant les mots DIIS Manibus Sacrum (Initiales des Dieux mânes sacrés), Acru/Saturninus (Nom et prénom du défunt) sur le cartouche. Saturnus étant le Dieu adoré par les masseyssiles et les massyles alors que les romains adoraient la triade capitoline. L'on peut également décrypter Vixit (a vécu), Annis (années). La suite qui concerne le chiffre est illisible et Fecit (un parent lui a fait sa tombe). Le reste de l'inscription est illisible », a souligné M. Chennoufi Brahim. Et d'ajouter : « cette épitaphe date de l'époque qui précède la chrétienté en Afrique du Nord. Les inscriptions chrétiennes de notamment le cinquième, sixième et septième siècle débutent par des signes du christ, donc une croix. Le site de Pomaria la romaine de Tlemcen a été construit par les Sévère, une dynastie d'empereurs romains du haut empire ayant régné approximativement durant le premier tiers du troisième siècle, après l'empire d'Auguste, et avant la crise de l'empire romain. Les Sévère se sont toujours présentés comme les successeurs légitimes des Antonins du siècle précédent et ont mis l'accent sur la continuité dynastique. Le site de Pomaria a été construit en même temps que les garnisons militaires numerus (tireur à l'arc) Syrorum (vétérans en provenance de la Syrie) de Maghnia, plus précisément à la caserne militaire qui se trouve aujourd'hui au centre-ville de Maghnia. Dès l'âge de la préhistoire, le site de Maghnia a été occupé par des groupes importants comme en témoignent les quantités de quartzites, basaltes, grès, silex taillés et ouvrés, recueillis sur le territoire de Maghnia et dans ses environs immédiats d'Oued Mouilah. Le site de Pomaria a été aussi construit en même que la cité romaine d'Altava dans l'actuelle Ouled Mimoun par le royaume berbère indépendant, un état successeur de l'ancien royaume des Maures et des Romains, qui contrôlait une grande partie de l'ancienne province romaine de Maurétanie césarienne. Altava était située sur la route stratégique romaine de Théveste à Numerus Syrorum. Pendant la présence française, la ville s'appelle Lamoricière. Altava est un nom propre à la population locale. Cette ligne de cargaison garnison militaire suivait les barrières naturelles montagneuses méridionales, séparant le territoire occupé par les romains, afin de surveiller les attaques des tribus des Gétules qui occupaient le désert. Ces garnisons militaires se sont ensuite transformées en cités civiles. Les vétérans siciliens, perses et de la Grèce romaine venus en renfort pour conquérir l'Afrique du Nord se sont reconvertis en paysans, pour exploiter des terres champs et vergers et pour employer des autochtones berbères ».

 Par ailleurs, notre interlocuteur a fait savoir que le musée de Tlemcen est riche de ces pierres funéraires et tombales datant de la période païenne avant la chienneté et pendant la chrétienté qui proviennent du site Pomaria notamment à l'époque de la colonisation française. Le musée dispose également de pierres non funéraires, comme les pierres milliaires, d'une grande importance, érigées le long des voies, car elles contiennent selon M. Chennoufi, de précieuses informations sur la situation politique, la garnison, le détachement militaire et la distance entre les villes, avec un style d'écriture latine. M. Chennoufi qui détient une riche expérience de 30 ans au service du patrimoine culturel de toute la région de Tlemcen a saisi cette occasion pour adresser le message suivant : « Je lance un appel à tous les citoyens, habitants et responsables, afin de protéger ce site historique très riche. Parfois certaines personnes construisent leurs habitations sur des pièces tombales. Elles détruisent ou enterrent ces pièces de valeur dans des fouilles et fondations de leurs constructions. Le citoyen est tenu de signaler sa découverte fortuite de pièces archéologiques à la direction de la culture, au musée, au service communal et aussi à la police et à la gendarmerie, pour ne pas occulter ces découvertes. Ces pierres archéologiques une fois disparues à jamais privent les chercheurs et toutes les générations de pans entiers et d'éclairages sur l'histoire très riche et mouvementée de la région de Tlemcen ».