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Vente - dédicace de l'ouvrage «Après Tamazight, la Derja (Maghribi)»: Abdou Elimam prêche pour l'officialisation du dialecte algérien

par Sofiane M.

Le dernier ouvrage du linguiste Abdou Elimam «Après Tamazight, la Derja (Maghribi)» est un coup de pied dans une fourmilière. Le titre, certes osé, a toutefois le mérite d'être sans équivoque. C'est un ouvrage qui remue le fer dans une plaie béante en reprenant un objet de crispation qu'on n'arrive aucunement de dépasser. L?ouvrage fait déjà le buzz sur les réseaux sociaux. Des internautes, dont la quasi-totalité ne connaissent ni l'auteur ni le contenu du livre, s'affrontent, entre critiques, soutiens et sarcasmes. Abdou Elimam n'est pourtant pas à son premier ouvrage consacré à la défense de la Derja ou «Maghribi», pour reprendre un terme cher à l'auteur, mais dans son dernier essai il plaide désormais pour l'officialisation du dialecte algérien. «C'est un livre, encore un autre, sur la question de la langue (...) la langue maternelle est incontournable si on veut accéder au savoir. On tue aujourd'hui le potentiel d'intelligence de nos enfants en les privant de leur langue maternelle dans les écoles», soutient l'auteur lors d'une conférence organisée samedi en marge de la vente - dédicace de son ouvrage à la librairie Arts et Cultures. Selon Abdou Elimam, la reconnaissance de la Derja est un enjeu majeur pour l'avenir de notre pays. «Tous les pays qui ont intégré la langue maternelle dans le cursus scolaire ont réussi. Les résultats sont plus que probants. Une expérience menée par des experts internationaux au début des années 2000 a révélé que le taux de réussite des enfants qui suivent un enseignement en langue maternelle est de 97%. Cette expérience a été refaite au Maroc où elle a donné des résultats plus qu'encourageants. La régression de notre système scolaire serait essentiellement causée par le rejet de nos langues maternelles», affirme ce linguiste. La reconnaissance des langues maternelles en Algérie se heurte toutefois non seulement au verrou constitutionnel, mais aussi aux représentations négatives, qui semblent ancrées dans les mentalités, des dialectes locaux. Les langues maternelles sont toujours considérées comme des ennemies de l'unité nationale, ce qui explique, en partie, la farouche résistance opposée à tout projet de reconnaissance de ces langues vernaculaires. L'ex-ministre de l'Education nationale, Nouria Benghabrit, qui avait proposé l'introduction du dialecte algérien dans l'enseignement, avait essuyé, rappelle-t-on, de virulentes attaques de toutes parts. Abdou Elimam réussira-t-il là où nombreux ont échoué ? Seul l'avenir peut apporter une réponse à cette question. Pour l'instant, ces suggestions de linguistes sont considérées par nombreux comme un «vœu pieux» sans lendemain.