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Les étudiants maintiennent la pression

par M. Aziza

Malgré les restrictions d'accès draconiennes mises en place par les services de la sécurité, empêchant les manifestants de se rassembler à la Place de la Grande Poste d'Alger, les étudiants ont pu casser, pacifiquement, le cordon bleu imposé, pour se rassembler dans l'une des principales placettes publiques de la capitale. La place de la Grande Poste d'Alger interdite durant ces dernières semaines aux manifestants, a été encerclée par un cordon de policiers exceptionnel, ce mardi. Une centaine de policiers anti-émeutes avaient investi tôt le matin la placette. Grâce à une organisation qu'on peut qualifier de parfaite, les étudiants se sont rassemblés en force au cœur de la capitale pour dénoncer la répression et pour défendre la liberté d'expression. «Vos intimidations ne nous font pas peur» scandaient hier, les étudiants venant de différentes universités d'Alger.

A noter que deux faits ont été accueillis avec satisfaction par les étudiants qui sont sortis hier, pour manifester leur refus à la continuité et maintien du système qui a servi pendant 20 ans le président sortant, Abdelaziz Bouteflika. Le premier était le retrait des policiers qui avaient encerclé la Grande Poste, laissant la voie libre aux étudiants, qui se sont approprié les lieux avec fierté. Et le deuxième, c'est l'annonce de la démission de Tayeb Belaïz du Conseil constitutionnel. Les universitaires scandaient avec euphorie «Mabrouk alina hadi el bidaya ou mazal mazal». Les étudiants ont réussi à faire entendre leurs voix sur la voie publique, tout au long de l'avenue Maurice Audin avant de s'installer à la place de la Grande Poste d'Alger, une réappropriation d'un espace public interdit qui a soulagé en quelque sorte la communauté estudiantine.

Des professeurs d'université sont venus soutenir les étudiants lors de cette manifestation, tout en étant convaincus que la jeunesse d'aujourd'hui est capable de réussir le changement pacifique et à tous les niveaux. Une enseignante de l'USTHB a affirmé au ?Le Quotidien d'Oran' qu'«aujourd'hui, on est le 16 avril, c'est la Journée nationale du Savoir et les porteurs du savoir, ceux qui vont être le futur de l'Algérie, disent au gouvernement actuel de dégager. On ne veut plus de vous. On ne veut plus de vous, car vous avez accompagné le système dès le début, vous êtes le système». En ce qui concerne les actes de répression policière enregistrés ces derniers temps, l'enseignante universitaire a estimé que «c'est une manière de montrer la faiblesse du pouvoir, car un pouvoir fort qui est dans une logique de paix ne peut pas utiliser la répression contre ses jeunes et son peuple». Un autre professeur de la faculté de Droit intervient pour affirmer que «la répression est le seul moyen aux yeux du régime capable de casser ce mouvement populaire pacifique, sortir de ce pacifisme veut dire l'instauration de l'Etat d'urgence, ce que cherche apparemment le pourvoir pour sauver sa peau» dit-il. Pour ceux qui disent que ce mouvement populaire n'a pas d'alternative pour faire sortir le pays de cette crise politique et de l'impasse, une enseignante de l'USTHB affirme que «ce Hirak a des alternatives, il a des têtes pensantes». «Est-ce que vous pensez que ces jeunes manifestants pacifiques qui ont tenu depuis déjà 2 mois, ne sont pas soutenus par des personnes patriotes et compétentes ?». «Ces gens-là, capables de faire sortir l'Algérie de la mainmise du système existent, il y en a certains qui sont déjà connus à travers les médias, mais il y a d'autres personnes patriotes qui ne se montrent pas. Et ce ne sont pas la main de l'étranger, ce sont de véritables patriotes qui sont là pour orienter les jeunes, pour les rassurer et les soutenir dans leur démarche révolutionnaire, pour une Algérie forte, libre et démocratique». Une autre enseignante de l'USTHB résume en affirmant que «ces gens qui pensent qu'ils font partie de la solution sont en fait le problème, on leur demande tout simplement de dégager et laisser les jeunes bâtir leur avenir». Les étudiants restent mobilisés sur l'ensemble du territoire du pays. Comme chaque mardi, ils ont marché dans plusieurs wilayas pour exiger le départ du système.