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Tensions sur le front

par Mahdi Boukhalfa

L'officialisation du gouvernement Bedoui, que la rue a immédiatement rejeté, et l'annonce simultanée de la démission ?'avant le 28 avril» du président ont augmenté la tension et la pression entre les clans qui se disputent toujours le pouvoir à l'ombre des manifestations pour un changement politique radical dans le pays. Les lignes sont en train de bouger de nouveau depuis l'annonce lundi d'une liste d'hommes d'affaires ciblés par des enquêtes judiciaires et celle, plus importante, que le président Bouteflika, avant de partir, va «prendre d'importantes décisions». D'où ces interrogations de savoir pourquoi et à ce moment précis le président a-t-il décidé de prendre des décisions importantes. La seule que tout le monde attend est celle du jour de son départ.

Sauf à jeter le doute et à provoquer une certaine confusion à des niveaux névralgiques de l'Etat, en particulier au sein de l'armée, ce serait une lapalissade que de dire que la présidence est en train de jouer un jeu trouble à quelques encablures de la date butoir de la fin du mandat présidentiel. Pourquoi des décisions importantes seraient-elles prises à ce moment, alors que pratiquement le mandat du président Bouteflika se termine et que le gouvernement qu'il a nommé pour gérer la transition est rejeté par le peuple ? La pression est perceptible à différents niveaux de l'Etat et chaque partie serait en train de miner le terrain de l'autre. Les informations relatives à des manœuvres en haut lieu pour pourrir encore davantage la situation et acculer dans ses derniers retranchements l'ANP et son chef d'état-major, entre désinformation et tactique de clans du pouvoir, sont à prendre avec une extrême précaution dans les circonstances actuelles.

Rien ne sera offert sur un plateau dans les heures et les jours qui suivent et des postures malsaines commencent même à se dessiner comme pour enrayer la machine de la transition, en particulier avec ce nouveau gouvernement. Provoquer maintenant des escarmouches inutiles et futiles, mais dangereuses, au plus haut sommet de l'Etat ne semble pas être une attitude raisonnable, constructive et de nature à faciliter la décantation politique.

Car si Bouteflika va partir à la fin de son mandat et renoncer à la chimère de sa prolongation, cela ne veut aucunement signifier que son environnement immédiat ne va pas laisser ensuite un terrain miné, des pièges à retardement. Comme ce gouvernement autour duquel vont se cristalliser toutes les colères de la rue dont les revendications n'ont pas été satisfaites, jusqu'à sa dernière minute, par le président Bouteflika. Comme pour laisser aux Algériens un dernier cadeau, empoisonné.