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La monarchie jordanienne piégée par ses mauvais calculs

par Kharroubi Habib

Après avoir sécurisé la capitale Damas en chassant de la Ghouta les éléments de la rébellion armée qui en avaient pris le contrôle dès le début du conflit et dont la présence faisait peser une menace constante sur la ville, l'armée syrienne a concentré l'essentiel de son potentiel offensif à l'opération militaire destinée à la reprise de contrôle des provinces de Deraa et Soueida dans le sud du pays. L'offensive victorieuse fait que les forces gouvernementales se rapprochent à la fois de la frontière avec la Jordanie et du le plateau du Golan dont une large partie est occupée par Israël depuis 1967.

Washington, qui surveille évidemment les mouvements de l'armée syrienne surtout s'ils s'opèrent en direction de zones où il y a présence de militaires américains et de groupes armées syriens qu'ils soutiennent et encadrent, a dans un premier temps averti Damas qu'en entreprenant une offensive dans le sud du pays où sont justement présents des militaires américains, ses forces s'exposeraient à des frappes. Loin pourtant de donner suite à leur menace alors que l'offensive de ces forces bat son plein et leur a permis de récupérer une bonne partie du sud du pays, les Américains donnent même l'impression de ne rien vouloir faire qui contrecarrerait leur avance et le retour de la région sud dans le giron gouvernemental syrien.

Selon des sources, les Etats-Unis ont opéré un revirement dans leur attitude sur ce qui se passe dans les provinces de Deraa et Soueida à la pressante demande du roi et du gouvernement de la Jordanie. Les mêmes sources croient savoir que Amman a fait cette démarche auprès de Washington, car ses autorités ont pris conscience que le contrôle de la zone syrienne jouxtant la frontière avec la Jordanie par la rébellion armée syrienne dont le gros des effectifs djihado-terroriste risque de s'avérer une grande menace pour la sécurité du royaume et pour sa monarchie. Le roi Abdallah II semble avoir enfin compris que la rébellion syrienne avec laquelle son pays a noué alliance et connivence est devenue le référent pour sa propre opposition. La grave crise économique dont le royaume est la proie lui a fait considérer qu'il est urgent pour la Jordanie d'éloigner les rebelles syrien de sa frontière pour que leur exemple ne donne pas l'idée aux extrémistes d'entre les opposants jordaniens de verser dans la contestation armée en faisant alliance avec eux. Washington, qui sait la monarchie hachémite en très grande difficulté et impuissante à calmer le mécontentement populaire dont elle est la cible, a apparemment entériné l'argument jordanien en faveur de la non-intervention américaine. Israël, l'autre acteur régional qu'inquiète l'avancée des forces gouvernementales syriennes en direction du plateau du Golan, pourrait ne pas s'estimer tenu à la non-intervention, même si les groupes rebelles armés dont il tentera d'aider la résistance sont dans la mouvance terroriste d'Al-Qaïda et de l'Etat islamique autoproclamé. Il n'y aura rien d'étonnant à ce qu'il entreprenne des actions militaires dans ce sens, sachant qu'il est l'Etat qui a le plus intérêt à ce que la Syrie continue à être la proie de confrontations armées et que perdurent ses divisions auxquelles ses sombres et souterraines machinations ne sont pas étrangères.